Sensorialisation de la nutraceutique, une voie d'innovation

Compatibility
Save(0)
Share

On pourrait dire que tout a commencé avec la foodification : cette volonté de la nutraceutique à innover vers des formes food pour les rendre plus lifestyle. Ce phénomène, que nous décrivons depuis plusieurs années, a démontré son intérêt. Cependant, face à un marché des compléments alimentaires pléthorique, l’offre a besoin de différenciation pour mieux exister et toucher les consommateurs en devenir. Que recherchent-ils ? Une consommation inédite, ludique, émotionnelle, voire à forte identité. Pour répondre à cet enjeu, nous voyons la sensorialisation de la nutraceutique comme une quatrième voie d’innovation, après les plus classiques que sont la galénique, la formule et la médicalisation. Ainsi, la sensorialisation, c’est faire appel à nos cinq sens pour créer une expérience de consommation, participant au plaisir, à l’efficacité et, pourquoi pas, à la fidélisation. Voyons dans cet article comment s’y positionner.

Comprendre le marché des compléments alimentaires pour se familiariser avec la sensorialisation de la nutraceutique.

La nutraceutique : un marché qui ne connaît pas la crise

L’industrie de la nutraceutique, ou du complément alimentaire, cumule en 2023 en France 2,7 Mds € de chiffre d’affaires[1]. Un marché historique de la santé et du bien-être qui, au gré des évolutions technologiques et de la société, évolue lui aussi. Les dernières tendances font état d’un marché qui se démédicalise, avec des frontières de plus en plus fines avec l’industrie agroalimentaire. Cette évolution est intimement liée à la recherche des consommateurs de produits plus pratiques, agréables à consommer, jusqu’à réellement procurer du plaisir.

Plus que cela encore : le complément alimentaire a vécu une réelle transition esthétique, essentiellement grâce à la naissance des DNVB (Digitally Native Vertical Brands). Ces jeunes marques empruntent tantôt les codes de la cosmétique, tantôt ceux des marques ultra lifestyle qui vivent sur les réseaux sociaux. Cette évolution esthétique se ressent tant dans le packaging que dans la communication, et a permis aux produits nutraceutiques de sortir de la salle de bain pour se retrouver dans la cuisine ou le sac à main. On assume, entre autres parce que c’est beau.

Exploiter le pouvoir des sens pour se différencier

Innover est devenu indispensable pour perdurer sur le marché de la nutraceutique. Il s’agit d’ailleurs d’un des critères choix des consommateurs : près d’1 consommateur sur 2 considère la nouveauté des ingrédients actifs comme importante lors de l’achat d’un complément alimentaire[2].

Ce volet innovation devient nécessaire pour émerger. On dénombre 520 acteurs du complément alimentaire sur le circuit officinal en 2023. Une intensité croissante qui ne semble pas faiblir et qui impose à chacun de se renouveler constamment. Jusqu’à présent, nous dénombrions trois leviers d’innovation majeurs en nutraceutique : la formule, la galénique et le positionnement santé. Classiquement. Nous sommes convaincus d’assister à l’émergence d’un quatrième axe : celui d’innover sur l’expérience de consommation des compléments alimentaires.

Si les bénéfices santé sont une raison de consommer un complément alimentaire sur le temps long, la sensorialité fait partie des raisons de le consommer sur le temps court, et donc d’atteindre les bénéfices long terme.

Le terme sensorialisation est un néologisme issu du mot sensoriel. Il renvoie aux sensations perçues par les sens. La sensorialisation de la nutraceutique évoque ainsi le lien que les compléments alimentaires entretiennent avec nos sens.

Si les bénéfices santé sont une raison de consommer un complément alimentaire sur le temps long, la sensorialité fait partie des raisons de le consommer sur le temps court, et donc d’atteindre les bénéfices long terme. Grâce à l’observance.

Un produit pénètre dans notre corps, mais aussi dans nos têtes. Comment ? Grâce à l’émotionnel. On ne demande pas à un complément alimentaire d’être notre Madeleine de Proust, mais on attend pour autant que l’expérience soit plus qu’un geste médical.

Vue, goût, toucher, odorat, ouïe. À l’heure actuelle, une partie d’entre eux seulement est travaillée dans les innovations ; demain, ces cinq sens seront sollicités pour créer un spectre traduisant la promesse et l’identité du produit. On sort le complément alimentaire de son côté médical, froid et triste, pour emmener le consommateur dans une expérience, dans un moment de consommation agréable, qui participe à l’efficacité du produit.

On pourrait presque dire que la sensorialisation de la nutraceutique est la digne descendante du marketing sensoriel, utilisé pour déclencher un acte d’achat, et que vous connaissez probablement à titre personnel pour avoir déjà aimé une marque pour l’odeur diffusée dans ses magasins ou ses colis.

Pour bien comprendre, décortiquons l’exemple de Reset, ce complément alimentaire US que nous avions découvert à l’occasion du Start-up Innovation Challenge Vitafoods en 2023. Il ne se positionne pas spécifiquement sur la sensorialisation de la nutraceutique, puisqu’il s’agit d’un concept inédit… Mais nous en apercevons les prémices.

@reset / Reset et les prémices de la sensorialisation nutraceutique

Positionné sur la récupération et la santé mentale, Reset a travaillé la stimulation de plusieurs sens. Dans l’ordre :

  1. La vue avec une gamme diversifiée de packagings premium.
  2. Le toucher avec un pack primaire étudié, un pilulier facile à prendre en main.
  3. L’ouïe avec un QR Code amenant à un univers sensoriel, à écouter le temps de la prise.

Vous l’avez ? Oui ? Alors entrons dans le détail.

Le goût, l’axe exploité le plus instinctivement.

Le goût, c’est une affaire personnelle et subjective. Et cela se complexifie d’autant plus lorsqu’il est lié à la santé. En effet, nous sommes a priori prêts à accepter des goûts déplaisants tant qu’ils sont associés à des bénéfices santé qu’on ne trouve nulle part ailleurs. Un exemple ? L’huile de foie de morue. Un ingrédient qui a traumatisé toute une génération en quête de santé, et qui perdure pourtant !

Ainsi, s’agissant de produits à ingérer, les fabricants de compléments alimentaires peuvent se positionner sur deux courants opposés :

  • Faire avec le « vrai goût » des ingrédients, des recettes pures, appuyant sur une notion traditionnelle de goût de l’efficacité. Une détox au bon goût, est-ce vraiment une détox ? Vous connaissez Regulatpro? Un goût particulièrement acide, un produit à garder en bouche qui plus est… Pas acceptable ? Si on regarde du côté des avis consommateurs, qui sont majoritairement positifs, on peut supposer que si le produit était bon sans être efficace, il ne serait sans doute pas plébiscité. 
  • Travailler le goût comme vecteur de plaisir, en masquant parfois les notes désagréables. Parmi les « off-notes » à masquer les plus courantes, on retrouve l’amertume (guarana, ginseng, maté), le métal (fer, zinc, manganèse), le soufre (radis noir, ail, sélénium), l’acidité (baies rouges, superfruits) et les notes marines (oméga 3, spiruline). De ce côté, les gummies ont bien préparé le terrain avec des goûts qui se doivent d’être impeccables. Qui a envie de mâcher une gummy amère ou acide ? Résultat, le goût devient un argument comme pour Bears with Benefits.

Bears with Benefits et la sensorialisation nutraceutique

Quel que soit le courant choisi, gardons en tête que le goût peut être le reflet d’une promesse : un coating lavande pour un produit relaxant, agrume pour un produit tonique, ou pourquoi pas du piment, pour un effet chauffant dans un complément alimentaire immunité au cœur de l’hiver.

Enfin, gageons que l’identité gustative deviendra aussi légitime que l’identité visuelle avec, pourquoi pas, des partis pris floraux et épicés plutôt que fruités, pour plaire à une cible jeune et diversifiée.

L’odorat, indissociable du goût.

L’odeur est une chose, mais via la rétro-olfaction, odorat et goût sont intimement liés. En effet, les arômes sont perçus par deux voies[3] :

  • La voie nasale directe
  • La voie rétronasale, via les molécules aromatiques qui remontent par l’arrière de la bouche

Le goût et l’odorat en nutraceutique

(Visuel Au cœur des arômes – SNIAA)

On trouve déjà un lien fort entre les arômes et la nutraceutique via la pratique de l’aromathérapie. En effet, cette pratique utilise les huiles essentielles à des fins de bien-être. On utilise dans ce cas les propriétés odorantes des plantes.

Alors, sur quelles odeurs la nutraceutique peut-elle se positionner ?

Nous aimerions vous dire que la nutraceutique de demain sera boisée ou encore vanillée, mais il s’agit plutôt d’une utilisation de l’odeur comme levier de choix pour le consommateur, comme facteur d’appétence. Qu’il s’agisse de l’ouverture du pilulier ou du colis lors d’une commande, une attention particulière doit être portée à l’odeur.

Ainsi, à la croisée des chemins entre la parfumerie, l’aromathérapie et les parfums d’intérieur, l’avenir de la nutraceutique passera peut-être par le développement d’une nouvelle catégorie : celle des parfums nutraceutiques. L’encens possède des vertus apaisantes, pourquoi ne pas en faire un parfum stress-sommeil ? Certains y ont déjà pensé : les Fragrances supplements de TheNueCo sont une gamme complète de parfums nutraceutiques, énergisants, relaxants, favorisant la concentration. En France et du côté des ingrédients, nous avons Innolphaé®, la sensorialité olfactive de Phodé : un ingrédient hautement concentré en actifs qui agit sur le stress en synergie avec notre olfaction via la voie rétronasale.

The Nue Co et ses fragrances supplements

La vue, un incontournable du marketing.

Bien entendu, la vue est l’un des sens les plus sollicités lorsqu’il s’agit du choix d’un produit. Notre société du 21ème siècle est largement portée sur l’apparence. Celle de chacun mais aussi celle des produits. Alors, comment décrypte-t-on un complément alimentaire visuellement ?

En scrutant sa galénique

Eh oui ! Désormais, une galénique peut être choisie pour son aspect.

  • Une capsule transparente qui laisse entrevoir des actifs, jusqu’à véhiculer une image de transparence du sourcing et de la marque.
  • Les liquides en ampoules et leur aspect transparent, haut de gamme.
  • Les solutions effervescentes et leur effet surprise au moment où les bulles s’échappent.
  • Mais aussi les poudres, préparées comme de véritables milk shakes pour les réseaux sociaux.

Le collagène Nutri&Co, préparé comme une véritable recette

Pour peupler le marché Nutra de demain, attendons-nous à des galéniques toujours plus différenciantes : gommes au cœur liquide comme les Gummy Caps Rousselot, bulles plus fines, perles d’alginates, microbilles en pipette, transparente, haute en couleurs… Tous les moyens seront bons pour devenir la référence la plus chère aux yeux des consommateurs.

En s’attardant sur l’apparence du pack

Primaire ou secondaire, en rayon ou sur les réseaux, il est l’image du produit. Il est ce que l’on voit en premier, bien avant de se poser la question de l’efficacité du produit.

La couleur, bien sûr, peut véhiculer l’ADN d’une marque. Blanc pour la science, noir pour le haut de gamme, couleur pour le lifestyle. Elle peut aussi véhiculer une promesse. Bleu pour le stress, rouge pour le cardiovasculaire, rose pour la santé féminine.

Ou encore jouer sur les matières comme le fait le Laboratoire Richelet.

Et pour demain ? On recherchera des solutions pratiques. Un pilulier plus fin viendra par exemple traduire une notion de praticité, facile à prendre en main ou à glisser dans un sac à dos. Les innovations seront bien entendu dictées par les questions environnementales, avec des matériaux plus sobres et plus économes : moins d’emballages secondaires, des encres à base d’eau. Et si le complément alimentaire de demain n’avait plus de packaging ?

Le toucher pour séduire jusqu’au bout des doigts

Le toucher est un sens qui est, entre autres, mis à contribution lors d’un achat en point de vente physique. Mais lors d’un achat en ligne, la sensation au premier contact avec le produit est tout aussi importante. On travaillera la douceur, les textures, les sensations, pour une nutraceutique avec toujours plus d’expériences positives.

On voit d’ores et déjà un travail sur les matériaux qui se diversifient, avec l’utilisation de carton recyclé par exemple, ou encore de bouchons en liège. Un travail amorcé pour des

Contact details
Mélanie Lavaysse