L’EcoTrail Paris est de retour, en ce week-end du 22 et 23 mars 2025. Au programme : un événement qui fait toujours le plein dans un contexte ultra-favorable au trail, et des engagements environnementaux toujours forts. Ecolosport en a parlé avec Jérôme Toulouse, directeur de l’événement francilien.
Ecolosport : Que met en place l’EcoTrail Paris cette année pour limiter son empreinte carbone et écologique ?
Jérôme Toulouse : On continue sur notre lancée depuis la création de l’EcoTrail Paris, c’est-à-dire travailler sur les fondamentaux que sont les transports. Nous recrutons depuis quelques années des coureurs en local, sur le bassin francilien. Nous avons près de 80% des participants qui vivent en région Ile-de-France. Toute la communication que nous pouvons faire est centralisée sur cette région. Le volet transports est fondamental. Nous offrons toujours le ticket de transport en commun à l’ensemble des participants qui en font la demande. Cette année, la nouveauté est le partenariat avec la startup spécialisée dans le covoiturage StadiumGO (porté par le partenariat avec MAIF, ndlr). Pour ceux qui, malheureusement, ne peuvent pas prendre les mobilités douces, on incite fortement au covoiturage. Cette année, nous avons aussi poussé davantage la mobilité à vélo, en installant des parcs à vélos sur beaucoup plus de sites qu’on ne le faisait. On a testé ces parcs il y a deux ans au Stade Emile Anthoine, et ça avait plutôt bien pris. L’année dernière, on a poussé ça en en installant à Saint-Cloud, et ça a plutôt bien pris aussi. Et donc cette année, on continue sur les zones en proximité de Paris puisque mettre un parc à vélos à Saint-Quentin-en-Yvelines, c’est un peu compliqué. Ce sera par contre le cas à Meudon, qui sera un village d’arrivée cette année, pour la première fois sur la journée de dimanche.
Et sur les autres sujets environnementaux ?
Sur le volet alimentaire, nous continuons à proposer un ravitaillement bio, de saison et local. On a beaucoup travaillé avec le département des Yvelines pour se mettre en relation avec les agriculteurs et les fermes du département pour essayer de s’approvisionner au maximum localement. Ça, c’est génial ! Et il y a toujours les autres sujets, qu’on ne délaisse pas. Sur la partie textile, on recommence l’expérience menée l’année dernière sur le marquage des t-shirts des coureurs, qui a très bien fonctionné. L’idée est de venir apposer le logo de l’édition 2025 de l’EcoTrail Paris sur le t-shirt fétiche du coureur, et ainsi éviter la production de milliers de t-shirts finishers. Enfin, sur l’eau, on a supprimé complètement le plastique, nous aurons des rampes à eau un peu partout, sur tous les sites. On travaille avec les collectivités que l’on traverse pour avoir, autant que possible, un raccordement à l’eau de ville. Pour certains sites, qui ne sont pas événementiels, c’est un peu compliqué. À Chaville par exemple, une zone en pleine forêt, nous avons réussi cette année à trouver un raccordement à l’eau sur lequel on va installer des rampes.
Les rampes seront raccordées à l’eau de ville ou à des citernes ?
À l’eau de ville. Cette année, malheureusement, deux partenaires nous ont quitté, les Eaux de la SEDIF et les Eaux de Paris, nos partenaires principaux sur l’approvisionnement en eau. On a dû trouver des solutions de remplacement pour s’éviter de remettre des bouteilles en plastique. On a travaillé d’arrache-pied pour trouver d’autres solutions. On va y arriver, même si c’est un sujet qui est compliqué et qui coûte très cher aussi. Si on met des bouteilles d’eau, ça va nous coûter quelques centaines d’euros. Les rampes à eau, avec le raccordement et tout ce qui est nécessaire à son fonctionnement, nous coûtent une dizaine de milliers d’euros environ. L’impact financier n’est pas du tout le même. On a décidé de le prendre en charge nous-même, parce qu’on pense que c’est essentiel, tout simplement.
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L’engouement autour du trail est de plus en plus fort. Certaines courses sont prises d’assaut, c’est le cas de l’EcoTrail Paris. Comment gère t-on cet engouement, en gardant le cap écologique propre à l’événement ?
Cette année, nous serons sur notre capacité maximale, à hauteur de 17 000 participants. L’EcoTrail Paris est l’un des plus gros trails de France. On sait qu’on a un impact, on a près de 15 000 personnes sur liste d’attente. C’est un engouement qu’on n’a jamais connu non plus. Beaucoup de courses, de trails, le connaissent cette année.
Nous avons conservé les capacités maximales de chaque épreuve. On n’a pas augmenté les jauges malgré l’afflux et la demande croissante des coureurs. On reste sur cette volonté de limiter l’impact environnemental. Il s’agit aussi de garder un confort de course pour chacun. C’est le premier pré-requis. Après, on sait que l’événement “zéro impact” n’existe pas. Notre événement laissera forcément une trace, mais on essaie de travailler sur deux leviers. Le premier, c’est notre réduction d’impact et j’ai détaillé nos actions juste avant. Le deuxième, c’est de sensibiliser notre communauté. Plus on a de monde sur l’événement, plus on se dit qu’on peut sensibiliser nos participants à tous les enjeux climatiques d’aujourd’hui et de demain. Peut-être que tous les participants ne sont pas sensibles à ça, mais au moins, si on arrive à toucher une, deux, trois, quatre personnes, qui vont ensuite en parler à leurs proches, on se dit qu’on réussit notre mission de sensibilisation des participants par le biais de l’événement.
Est-ce que, justement, ces engagements ajoutent une certaine forme de pression supplémentaire dans l’organisation ? Certains coureurs participent à l’EcoTrail Paris parce que l’événement a cette démarche écologique…
La pression, nous nous la mettons par l’exigence que nous voulons sur la qualité de l’événement et sur l’expérience vécue. Effectivement, sur cette thématique de l’éco-responsabilité, c’est un enjeu crucial pour nous, pour les participants, pour les bénévoles, pour les partenaires et pour tous les citoyens. On teste beaucoup de choses, on est un laboratoire qui expérimente depuis des années. Les actions que nous testons sur l’événement, on essaye d’avoir quelques garanties en amont par rapport aux besoins ou aux répercussions qu’elles peuvent avoir. On a cette pression, mais elle est permanente.
De manière générale, comment faire face à cet engouement sans abimer les espaces naturels qui sont traversés ? Y a t-il un risque supplémentaire avec ce nouveau public, peut-être moins averti aux enjeux de protection des espaces traversés ?
Nous avons toujours eu ce public de néophytes. L’EcoTrail Paris, c’est 40% de renouvellement chaque année. On ne se dit pas, à chaque édition : “Ça, on en a déjà parlé l’année dernière, on n’en reparle pas.” Chaque année, on rabâche effectivement les mêmes choses parce que ce sont des éléments qui sont essentiels et qu’il vaut mieux répéter 10 ou 20 fois.
Ce n’est pas un risque que nous mesurons sur cet événement parce que nous avons toujours fait avec cette population de néophyte en trail. On a beaucoup de participants qui viennent de la route également, un milieu qui est en train d’évoluer aussi. Avant, sur les épreuves sur route, c’était profusion de plastique et de déchets, que l’on jetait où on voulait, dans la nature, sur la route, etc. C’est en train de changer, c’est bien. En tout cas, nous avons toujours eu en tête cette obligation d’essayer d’être le plus exemplaire dans cette démarche.
Un trail à Paris, ça peut paraitre contre-intuitif, car il y a très peu de dénivelé, et nous sommes dans une zone très urbaine. Pourquoi il est important d’en avoir un en Ile-de-France ?
Oui, alors effectivement, l’EcoTrail Paris a été le premier trail en région Ile-de-France. Initialement, on s’adressait beaucoup à une population qui venait essayer le trail, avant d’aller vers des terrains de jeux un peu plus techniques, un peu plus pentus, dans les Alpes ou les Pyrénées par exemple. Je pense que c’est encore le cas. Je ne dis pas que l’EcoTrail Paris n’est pas dur, c’est juste un autre profil de trail. De plus, il est crucial d’avoir ce type de courses en Ile-de-France parce que nous avons un gros bassin de coureurs sur le territoire et, effectivement, si les gens peuvent se contenter de l’EcoTrail Paris ou d’autres trails de la région, ça nous va bien.
Aujourd’hui, il y a une profusion de courses, il y en a certainement trop par rapport à ce que l’on devrait faire. Je suis coureur aussi et quand je fais des courses, je regarde d’abord ce qui se passe en local, ce que je peux faire sur place. Je pense qu’il est important aussi pour chaque coureur d’essayer de rester sur son bassin, ou alors de voyager par l’intermédiaire de transports doux ou en commun. On peut prendre le train assez facilement, pour aller un peu partout.
Quels sont les axes de progression pour les prochaines éditions ? Quels sont les domaines sur lesquels vous pouvez aller économiser des émissions de CO2 ou sur lesquels vous pouvez limiter votre impact ?
Nous avons encore un gros travail à effectuer sur le volet énergie. On parlait tout à l’heure du raccordement de nos sites à l’eau. Il y a aussi le raccordement électrique de ces sites événementiels. On est toujours en phase de test de solutions qui nous permettraient d’éviter l’utilisation de groupes électrogènes thermiques. En 2024, nous avons essayé des groupes électrogènes avec des panneaux solaires qui ont plutôt bien fonctionné, malgré deux limites : le matériel existant et le coût de ces nouvelles énergies. C’est un axe de progression sur lequel nous travaillons avec les institutions. L’idée est d’avoir des raccordements pérennes qui soient installés et qui profitent autant à l’EcoTrail Paris qu’aux autres événements sportifs ou culturels, comme par exemple sur le domaine de Saint-Cloud. C’est notre gros axe. Et puis, nous continuons à travailler à la réduction de l’impact de l’événement et à la sensibilisation de nos parties prenantes.