🌱 PRINTEMPS – RÉCONCILIER LA ROUTE ET LE VIVANT
Quand l'eau de pluie devient ressource
Direction le Sud de la France, où les équipes de la DIR Méditerranée expérimentent une valorisation inédite des eaux de ruissellement.
Dans le Gard, au bord de la RN106, un projet pilote repense l’usage d’un bassin de rétention des eaux pluviales, jusqu'ici cantonné au traitement de la pollution routière et à la collecte des pollutions accidentelles.
L'idée germe d’abord dans l'esprit de Christophe Berzosa, chargé de travaux à Montpellier : face aux épisodes de sécheresse qui se multiplient, pourquoi laisser stagner cette eau alors qu'elle pourrait servir ?
En effet, ce sont plusieurs centaines de mètres cubes d’eau de ce bassin, aujourd’hui inutilisés, qui pourraient demain servir aux pompiers contre les feux de forêt, à la commune pour l'arrosage des espaces verts et l’entretien des réseaux d’assainissement, ou encore aux agriculteurs pour l'irrigation de cultures non alimentaires.
L'expérimentation est menée en collaboration avec l'agence régionale de santé (ARS), l'agence de l'eau et la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) du Gard.
Delphine Ballay, chargée de mission qualité et développement durable à la DIR Méditerranée, nous explique :
« Tout l’enjeu de ce projet, c’est d’inventer un cadre sanitaire pour des eaux qui n'en ont pas encore. Le défi est réel, et motive tous les partenaires à avancer dans ce cadre expérimental, mais sécurisé. »
En cas de succès, la démarche pourrait s'étendre à d'autres bassins, quel que soit l’organisme en charge de leur gestion.
Une idée prometteuse lorsque l’on sait que nos routes sont bordées de plusieurs milliers de bassins de rétention et que l’eau, sous l’effet du réchauffement climatique, tend à se raréfier. À l’échelle européenne, le projet Rural Roadwater Rescue s’intéresse aussi à l’utilisation des eaux routières pour lutter contre la pénurie d’eau dans des régions rurales.
À plusieurs reprises, les eaux ont été prélevées et analysées en laboratoire.
« Les premières analyses de la qualité de l’eau, partagées début 2025, nous encouragent. Maintenant, il nous faut confirmer ces résultats sur quatre saisons complètes avant de pouvoir passer des conventions avec les futurs bénéficiaires. Nous sommes fiers de contribuer, à notre niveau, à ce sujet novateur et porteur ! » Thierry Clément, adjoint à la cheffe du service d’ingénierie routière Mende Montpellier.
Une charte pionnière pour protéger la biodiversité
Accotements, fossés, talus, terre-pleins, aires de repos : avec plusieurs dizaines de milliers d’hectares de zones enherbées et arborées aux bords des routes, les dépendances des DIR abritent une faune et une flore diversifiées, parfois protégées, et souvent d’une grande valeur patrimoniale.
Aussi les pratiques de gestion et d’entretien de ces espaces ont un impact direct sur les espèces qui les peuplent. C’est avec cette conviction que la DIR Nord Ouest a adopté, au printemps 2025, une charte d'engagement inédite pour la gestion et l'entretien durable des dépendances vertes et bleues de son réseau routier.
Pascal Gabet, directeur de la DIR Nord-Ouest
« Cette charte d’engagement, nous l’avons réalisée en collaboration avec l'Office français de la biodiversité (OFB), la direction régionale de l'environnement (DREAL) et avec nos partenaires normands. Pour l’élaborer, nous avons voulu y associer l’ensemble des agents de la DIR, afin que chacun – chef d’équipe, chef de centre, chargé d’étude, agent d’exploitation… – prenne conscience de son rôle dans la préservation des écosystèmes routiers. »
Cette initiative s'inscrit pleinement dans la Stratégie nationale biodiversité 2030, qui vise à réduire les pressions sur la biodiversité et à protéger les écosystèmes.
En redéfinissant concrètement les calendriers et modalités d'intervention, cette charte vient bouleverser les pratiques d'entretien traditionnelles : fauchage, débroussaillage, abattage ou élagage d’arbres, curage des fossés, entretien courant… autant de gestes qui ne sont plus automatiques mais raisonnés, tenant compte des périodes de reproduction et de nidification des espèces.
Des corridors pour la faune sauvage
Après avoir vu sa répartition se réduire considérablement jusqu’aux années 1950, la loutre d'Europe opère, depuis sa protection légale, un lent mouvement de recolonisation. Mais malgré cette évolution positive, des pressions et menaces continuent de peser sur ses populations. 👇
Dans la Sarthe, l'Orne et le Calvados, la DIR Nord-Ouest ne se contente pas de faire rouler les véhicules : elle fait aussi traverser les loutres ! Quatre ouvrages d'art ont été récemment aménagés pour permettre à ces mammifères de franchir les infrastructures routières sans risquer leur vie.
Au-delà des seules loutres, visons, hérissons, belettes et amphibiens peuvent aussi emprunter ces corridors écologiques. Une démarche qui s'inscrit dans l'amélioration des continuités écologiques, permettant aux espèces de circuler librement entre leurs zones d'habitat, de reproduction et d'alimentation.
☀️ ÉTÉ – ÉNERGIES NOUVELLES, ESPACES RENATURÉS
Des panneaux pour suivre le soleil
On les aperçoit depuis la D924 : en pleine campagne normande, ces deux structures, que l’on croirait tout droit sorties d’un décor de science-fiction, saisissent le regard.
Ces suiveurs (ou trackers) solaires orientent automatiquement leurs 40 panneaux photovoltaïques selon la course du soleil, maximisant ainsi la captation de lumière.
Au centre d'exploitation et d'intervention de Fleury, premier équipé de ce dispositif innovant, le résultat est probant : sur une consommation annuelle de 35 000 kWh, les trackers fournissent 20 000 kWh, soit plus de 55 % des besoins énergétiques du site. D'autres centres de la DIR Nord-Ouest seront équipés prochainement, dans le cadre d'un déploiement progressif.
Pierre Vedel, chef du pôle patrimoine, chaussées et immobilier et Hélène Buhot, cheffe adjointe du service des politiques et des techniques à la DIR Nord-Ouest, ont tous les deux œuvré à ce projet.
« Avec le décret Tertiaire, nos bâtiments de plus de 1 000 m² doivent réduire leur consommation de 40 % d'ici 2030. Plutôt que de subir, nous anticipons en produisant notre propre énergie verte », explique Pierre Vedel.
L’aire de repos devenue refuge LPO : le pari réussi de Téteghem
Tout près de la Belgique et de la Manche, l'été 2025 a marqué une étape importante dans la vie de l’aire de repos de Téteghem, au bord de l’A1.
Fermée depuis 2016, cette aire de 13 000 m² a connu une transformation remarquable sous l'impulsion de la DIR Nord, et grâce à un financement des ministères de l'Aménagement du territoire et de la Transition écologique dans le cadre d'un appel à projets visant à soutenir les actions en faveur de la biodiversité.
Terrain avant sa désartificialisation (© LPO)
Située au cœur de la zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) du « Marais de la Briqueterie et lac de Téteghem », l’aire a été entièrement renaturée suite à la réalisation d’un diagnostic écologique par la ligue de protection des oiseaux (LPO) révélant le potentiel du site.
Démantèlement des anciennes infrastructures, démolition des blocs sanitaires puis apport de plus de 325 tonnes de terre végétale et éclaircissement des ronciers : les travaux d’envergure ont mobilisé les agents volontaires du centre d’exploitation et d’intervention de Coudekerque. Par la suite, la LPO s’est chargée des plantations de haies, arbres et arbustes locaux avec la participation des agents de la DIR Nord et de citoyens volontaires.
Insectes, oiseaux, mammifères, amphibiens, roseau, bouleau ou encore persicaire maculée… l’aire de Téteghem pourra accueillir des dizaines d'espèces animales et végétales patrimoniales ou protégées, dans des conditions favorables à leur développement.
« C’était un beau travail d’équipe ! Le projet a été très motivant, à la fois pour les agents du district et pour les agents du siège qui, grâce aux formations organisées par la LPO, ont pris conscience de la richesse écologique des lieux dont ils s’occupent au quotidien », se félicitent Sophie Lacherez, responsable de la mission Transition écologique du réseau routier à la DIR Nord et Marc Meurice, chef d'équipe du CEI de Coudekerque.
Les services routiers de l’État
Gérer et entretenir le réseau routier national (environ 11 800 km de routes à travers le pays), c’est la mission des services routiers de l’État. Les 11 directions interdépartementales des routes (DIR), rattachées aux ministères de l’Aménagement du territoire et de la Transition écologique, ont trois missions principales :
- exploiter les autoroutes non concédées et les routes nationales restant sous la responsabilité de l’État (surveillance du réseau, gestion du trafic, information, interventions lors d’accidents, viabilité notamment en période hivernale) ;
- entretenir les chaussées et leurs dépendances (accotements, fossés, bassins, plantations), les aires de service, les ouvrages d’art (ponts, viaducs, tunnels, murs) et les équipements de la route (signalisations, dispositifs de retenue, dispositifs de surveillance...) ;
- assurer l’ingénierie et le contrôle des travaux des projets routiers de l’État.
Les 11 directions interdépartementales des routes emploient plus de 6 500 agents.
Crédits :
Ministères de l'Aménagement du territoire et de la Transition écologique - SG/DICOM [ Photos : Hugues-Marie Duclos / ANCT, Thierry Degen / Terra, Laurent Mignaux / Terra, DIR Méditerranée, Sven Dorez, DIR Nord-Ouest, Arnaud Bouissou / Terra, Damien Valente / Terra, Daniel Coutelier, Terra, Ligue de protection des oiseaux (LPO) ] [Texte : Mathilde Christiaens ]