Analyser et cartographier les communautés végétales grâce à l’IA et à l'outil Pl@nBERT

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Mis à jour le 21/11/2025

Une étude menée par le Cirad, Inria, l'Université de Montpellier et plusieurs partenaires français et européens montre l’intérêt d’un modèle de langage appliqué aux végétaux pour mieux comprendre les communautés végétales et cartographier les habitats naturels européens. Il s’agit de l’un des premiers travaux s'appuyant sur un modèle d'intelligence artificielle pour caractériser les communautés végétales à grande échelle.

© P. Bonnet, Cirad

Menée dans le cadre d’une thèse et soutenue financièrement par les projets européens GUARDEN et MAMBO, cette étude ouvre la voie à une meilleure compréhension et préservation de la biodiversité grâce à l’intelligence artificielle (IA). Si ce travail s’est focalisé sur la compréhension des assemblages d’espèces végétales et la cartographie des habitats naturels européens, les applications du modèle d’IA développé dans cette étude sont nombreuses, estiment les chercheurs. 

Pl@ntBERT, un modèle de langage appliqué aux végétaux   

Pour élaborer leur modèle, les scientifiques se sont appuyés sur l’outil BERT, une intelligence artificielle qui sert à comprendre du texte, qu’on utilise au quotidien sans même le savoir lorsque l’on fait des recherches sur Google. Pour la rendre plus performante sur les végétaux, les chercheurs l’ont entraînée en la nourrissant de plus d’un million de relevés de végétation européens. Baptisé Pl@ntBERT, ce modèle de langage appliqué aux végétaux est ainsi capable de décoder la « syntaxe » des phrases formées par des séquences d’espèces végétales qui cohabitent, classées par ordre d’abondance. 

César Leblanc, premier auteur de l’étude, doctorant au sein de l'équipe-projet IROKO, commune à Inria et à l'Université de Montpellier :

Tout comme un modèle de langage classique est capable de retrouver un mot manquant dans une phrase, Pl@ntBERT peut prédire les espèces végétales susceptibles d’être présentes dans un assemblage d’espèces et ainsi compléter des relevés de terrain. 

Concrètement, Pl@ntBERT facilite les inventaires de végétation en suggérant des espèces probablement présentes mais non recensées. L’outil va encore plus loin, en prédisant des assemblages d’espèces cohérents jusqu’alors jamais observés.  

Cartographier les habitats pour mieux les protéger

L’étude met également en évidence la capacité de Pl@ntBERT à classifier avec une grande précision, à partir de listes d’espèces, les types d’habitats, parmi les 250 habitats naturels européens recensés. Les cartographies d’habitats sont accessibles à tout public sur le site geo.plantnet.org

Pierre Bonnet, chercheur en informatique de la biodiversité au Cirad au sein de l’Unité AMAP, et coauteur de l’étude. 

Le Règlement européen sur la restauration de la nature, adopté en 2024, s’appuie sur cette notion d’habitat pour identifier des stratégies de restauration. C’est pourquoi il est important d’effectuer ce recensement des habitats à l'échelle européenne afin de pouvoir suivre leur évolution dans le temps. 

Des écarts entre les assemblages d’espèces attendues pour un type d’habitat et ceux recensés sur le terrain pourraient ainsi révéler des perturbations d’écosystèmes et mener à la mise en place d’actions de conservation précoces et adaptées. 

Au-delà de l’Europe, ce type d'approche ouvre des perspectives majeures pour les régions tropicales, où la biodiversité, exceptionnelle mais encore largement méconnue, pourrait être mieux appréhendée, notamment pour orienter les efforts de conservation et de restauration dans ces écosystèmes parmi les plus menacés de la planète. 

Lever le voile sur la diversité fantôme : une autre application envisagée

Prédire les espèces manquantes dans un assemblage, cartographier les habitats… oui, mais pas que ! L’utilisation de Pl@ntBERT va au-delà de ces deux objectifs, soulignent les chercheurs, qui espèrent voir la communauté scientifique s’emparer de cet outil en libre accès. Le terrain de jeu est immense, par exemple pour mieux appréhender la diversité fantôme – ou dark diversity en anglais. Ce concept à la mode désigne les espèces qui pourraient vivre dans un habitat donné mais qui n’y sont pas pour des raisons encore mal comprises. Pl@ntBERT pourrait bientôt apporter des éléments de réponse. 

Référence :

Leblanc, C., Bonnet, P., Servajean, M., Thuiller, W., Chytrý, M., Acic, S., Argagnon, O., Biurrun, I., Bonari, G., Bruelheide, H., Campos, J.A., Carni, A., Custerevska, R., De Sanctis, M., Dengler, J., Dziuba, T., Erenskjold Moeslund, J., Garbolino, E., Jandt, U., Jansen, F., Lenoir, J., Perez Haase, A., Pielech, R., Sibik, J., Stancic, Z., Uogintas, D., Wohlgemuth, T. & Joly, A. Learning the syntax of plant assemblages. Nat. Plants 11, 2026–2040 (2025). https://doi.org/10.1038/s41477-025-02105-7.

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