Le film nous tient sur le fil, entre rire et tragique, avec cette histoire (vraie) du clown Chocolat (Omar Sy), noir d’origine cubaine échappé de l’esclavage des plantations, d’abord cannibale de cirque tenu en laisse devant un public apeuré, et qui connait un succès sans précédent, en devenant le souffre-douleur d’un duo de clowns, “Footitt et Chocolat”, qui fit rire le tout Paris dans les années 1900. Juste bon à se faire botter les fesses, le public ne l’autorisera pas à endosser le rôle du noir Othello, le Maure de Venise, de Shakespeare… Chocolat de Roschdy Zem, avec Omar Sy et James Thierrée, ou le film du rire noir !
Chocolat, nègre stupide en culotte de soie noire
« D’un toréador, Footitt avait les paillettes, la souplesse, le charme, la gloire et le prestige. Chocolat, nègre stupide en culotte de soie noire collante et frac rouge, servait de prétexte aux brimades et aux taloches. » dit Jean Cocteau après avoir vu le spectacle
Et si le film prend pas mal de liberté avec la vérité historique, il restitue de façon très palpable la solitude de ce noir devenu riche dans un Paris où les noirs sont au mieux pauvres, quand il ne sont pas exhibés comme des animaux qu’il ne faut pas nourrir à la Foire Universelle de 1900.
Une France raciste
Racisme ordinaire d’une Troisième République, si sûre de la supériorité de ses Lumières dont les savants, un siècle auparavant, avait autopsié la “Vénus Noire” (le film d’Abdellatif Kechiche) pour s’assurer de son humanité, supériorité de la race blanche qui autorisera l’asservissement colonial de l’Afrique sous couvert d’une mission civilisatrice d’une France raciste, dont Chocolat sera la première vedette noire, mais pas la dernière victime.
Une autre forme de rejet social
Reste la relation entre les deux artistes que le succès lie par nécessité, et si le clown Footitt (l’excellent James Thierrée, petit fils de Chaplin, pour l’anecdote) s’arroge un cachet double de son duettiste, il porte à l’évidence sur son compagnon de fortune, un regard de respect, partageant avec lui la solitude dans une autre forme de rejet social, celui d’une homosexualité suggérée par le film.
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Par Gérard Poitou. MagCentre.