Ave César de Joel et Ethan Coen, ou le film des clefs du paradis hollywoodien ! - CulturAdvisor

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Disons le tout de suite, Ave César n’est pas le meilleur film des frères Coen ! Mais tous les amateurs de la grande époque du cinéma hollywoodien trouveront un vrai bonheur à revisiter les coulisses des péplums, en vivant la journée de ce producteur (Josh Brolin) au bord de la crise de nerf permanente. Et surtout, dans ce jeu fascination/dérision, les frères Coen nous dévoilent sur le mode d’une comédie érudite bourrée de citations, l’inconscient du cinéma américain des années cinquante, les clefs de lecture de ces bijoux de mise en scène d’un cinéma devenu “vintage”, revisité sur le mode jubilatoire d’une mise en abime du cinéma dans le cinéma. Ave César de Joel et Ethan Coen, avec Josh Brolin, George Clooney et Alden Ehrenreich, ou le film des clefs du paradis hollywoodien !

Les secrets de la direction d’acteur

Il y a les secrets de la direction d’acteur, avec ce cow-boy, roi du lasso et de la cascade chevaline, soudain promu au rôle de jeune premier d’un film “psychologique”, les péplums romains, transposition métaphorique du destin impérial de la encore jeune nation américaine, la vie dissolue des stars surveillée par la critique en mal de ragots, et l’inavouable homosexualité affleurant dans les reconstitutions d’un ballet aquatique ou d’une superbe danse de marins “privés de femmes”, petites perles de la comédie musicale, entre rire et nostalgie.

Ave César de Joel et Ethan Coen, avec Josh Brolin, George Clooney et Alden Ehrenreich, ou le film des clefs du paradis hollywoodien !

La grande peur du communisme

Et puis, il y a la grande peur du communisme, l’étoile rouge dominant le monde, et prenant au pied de la lettre ce qui fut sans doute la pire chasse aux sorcières de l’histoire des États-Unis. Ainsi, les frères Coen passent à la moulinette de leur dérision, l’inquisition conduite par le sénateur McCarthy, dont la croisade anti-communiste mit au chômage bon nombre de scénaristes et de metteurs en scène holywoodiens, retour sarcastique sur ce prétendu complot qui visait à inoculer subrepticement l’idéologie communiste dans la tête des naïfs américains. Le complot est couronné par l’apparition du professeur Marcuse, philosophe freudo-marxiste, gourou des révoltes étudiantes des sixties, et allusion au troisième degré à ce grand pourfendeur de l’aliénation au travail dont notre producteur besogneux, constitue l’exemple vivant, incapable de renoncer à son addiction professionnelle, passionné par son job éreintant…

Un cours d’histoire du cinéma américain

Suprême dérision enfin, la religion avec ce film qui s’ouvre et se ferme dans un confessionnal, que notre producteur visite plusieurs fois par jour, pour se faire pardonner de mentir à sa femme à propos de son tabagisme, ou cette séquence “péplum” au pied du Calvaire, quand le romain George Clooney oublie “la foi” dans un trou de mémoire digne d’une scène des Monty Python.

Si le film sombre parfois dans le grotesque, comme dans la scène avec la vieille monteuse acariâtre, les frères Coen se sont visiblement bien amusés à nous concocter ce cours d’histoire du cinéma américain, dont l’abondance des citations en fait la richesse et la limite du genre.

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Par Gérard Poitou. MagCentre.

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