Le centre hospitalier universitaire (CHU) d’Amiens est l’un des 32 CHU français. À ce titre, il joue un triple rôle de soins, de formation et de recherche. En 2023, il employait 6 800 agents et gérait un budget de 820 M€. Les services cliniques sont regroupés, depuis début 2023, sur un seul site, au sud de l’agglomération, dans un patrimoine largement renouvelé, ce qui est un atout. Le second site, Saint-Victor, obsolète, accueille les activités pour personnes âgées.
Avec un peu plus de 1 200 lits et places en médecine, chirurgie et obstétrique, le CHU offre des services variés. La certification de la qualité des soins par la Haute Autorité de santé lui a été renouvelée en mars 2024. Il est cependant confronté, plus que d’autres de même catégorie, à une baisse d’activité d’hospitalisation complète depuis la crise du covid. En médecine et chirurgie, elle s’explique par un virage ambulatoire volontariste, et une difficulté de recrutement du personnel médical et soignant, qui a conduit à des fermetures de lits et de blocs opératoires. Par contraste, l’activité d’obstétrique a augmenté, mais reste encore limitée. Son potentiel de croissance mériterait d’être analysé. Les capacités de prise en charge des personnes âgées sont en décalage avec la réalité des besoins, avec une unité de soins de longue durée occupée pour moitié seulement. Il importe, pour l’avenir, de redéfinir les activités en question, au regard de celles que l’établissement entend porter.
Paradoxalement, la baisse d’activité ne s’est pas traduite par des pertes proportionnelles de produits, grâce aux aides reçues pendant la crise sanitaire, notamment la garantie de financement. L’extinction progressive de ces mécanismes protecteurs lui impose de retrouver de l’activité et d’allouer ses ressources en cohérence avec le développement de l’ambulatoire. Cela est d’autant plus nécessaire que la marge brute d’exploitation actuelle (50 M€, soit 6 à 7 % des produits courants), ne suffit pas à couvrir les remboursements d’emprunts, le CHU d’Amiens étant l’un des plus endettés de France (510 M€ d’encours fin 2023).
Comme son autofinancement est faible, l’établissement finance ses investissements par de nouveaux emprunts (20 à 30 M€ par an), ce qui ralentit fortement sa trajectoire de désendettement. De plus, ces emprunts excèdent les dépenses effectives de travaux, moins rapides que prévu, ce qui alimente son fonds de roulement, particulièrement élevé (50 jours de charges courantes, contre une cible de 20 à 30), et sa trésorerie. Or, celle-ci pourrait être plus avantageusement trouvée par une réduction du besoin en fonds de roulement, lui aussi très élevé (40 jours), au travers d’un meilleur recouvrement des créances (comme le crédit de TVA lié aux travaux). Le CHU se trouve dans la situation paradoxale et peu efficiente de ne pas avoir de problème de liquidité, du fait d’une trésorerie en expansion, alors que la soutenabilité de son modèle économique est en question.
Il a pris des mesures récentes pour renforcer sa gestion financière et médico-économique, et prépare un « plan d’excellence opérationnelle » destiné à accroître ses produits et à limiter ses charges. Pour autant, ses leviers d’action apparaissent limités.
Durablement surendetté, dépendant d’aides publiques en tous genres, pour 35 M€ environ par an désormais, il ne pourra pas compter sur la seule amélioration de sa marge brute d’exploitation pour faire face à ses charges d’exploitation tendanciellement dynamiques et aux investissements à venir, notamment pour le site Saint-Victor et les instituts de formation. Il doit construire une prospective réaliste, en concertation avec l’agence régionale de santé.