Jubilé 2025 : vers un effacement de la dette des pays du Sud ?  - CCFD-Terre Solidaire

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En 2025, le sujet de la dette risque de faire du bruit, et c’est une bonne chose. Alors que les montants de la dette atteignent des niveaux records, le Pape François a appelé à un effacement des dettes des pays du Sud à l’occasion de l’année jubilaire, comme ce fut le cas au début des années 2000. Il s’agit d’un enjeu de justice sociale, économique, mais aussi climatique, pour lequel se mobilise le CCFD-Terre Solidaire depuis de nombreuses années. 

Plus qu’une question de générosité, c’est une question de justice

Pape François, Bulle papale « L’espérance ne déçoit pas », 9 mai 2024

Qu’est-ce qu’une année jubilaire ?

Le 24 décembre à 19h, commencera à Rome une nouvelle année jubilaire. Décrétée tous les 25 ans par l’Église catholique, l’année jubilaire est une année particulière de réconciliation et de pardon qui invite à se mobiliser pour la justice sociale et la solidarité.   

Cet événement trouve ses origines dans une ancienne tradition juive. Tous les 49 ans, le son d’une corne de bélier annonçait une année de libération pour le peuple, où les terres aliénées devaient être rendues, les dettes remises et les esclaves libérés. 

Le précédent Jubilé a eu lieu en l’an 2000, pendant le pontificat de Jean-Paul II. 

Dette, Jubilé : quel est le lien ? 

En 2000, le Pape Jean-Paul II avait profité de l’année jubilaire pour appeler urgemment à une remise de la dette pour permettre aux pays en développement de lutter contre la pauvreté. Les années précédentes, une vaste campagne internationale, intitulée Coalition Jubilee 2000 et à laquelle participait déjà le CCFD-Terre Solidaire, avait permis de sensibiliser aux conséquences destructrices de la crise de la dette des pays du Sud et de mobiliser pour demander l’annulation des dettes.  

Cette campagne, conjuguée à la forte caisse de résonance offerte par le Jubilé, a permis de renforcer les demandes formulées dans les années 1990 pour l’annulation des dettes détenues par les pays du G8 dont la France. Ces annulations ont été mises en place par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale et ont concerné plus de 40 pays.  

En 2025, nouvelle année jubilaire, il est fondamental de porter à nouveau la question de la dette des pays du Sud, qui font face à une crise encore plus forte que celle de la fin des années 1990.  

Dans son message pour la 58e journée mondiale pour la paix, rendu public le jeudi 12 décembre 2024, le Pape François reprend la demande de Jean-Paul II il y a 25 ans et appelle à une « réduction importante, sinon à un effacement total, de la dette internationale qui pèse sur le destin de nombreuses nations ». 

Fait notable, le Pape François lie directement la question de la dette extérieure à celle de la dette écologique, qui sont pour lui “deux faces d’une même médaille, de cette logique d’exploitation qui culmine dans la crise de la dette”. 

Profitant de cette année jubilaire, j’invite la Communauté internationale à agir pour remettre la dette extérieure, en reconnaissant l’existence d’une dette écologique entre le Nord et le Sud. C’est un appel non seulement à la solidarité, mais surtout à la justice.

Pape François, Message pour la 58e journée mondiale de la paix, 12 décembre 2024

Pourquoi il est urgent d’annuler la dette des pays du Sud ? 

Ces dernières années, la dette des pays du Sud a explosé. Selon la dernière édition du Rapport sur la dette internationale de la Banque mondiale, les pays en développement ont dépensé 1 400 milliards de dollars au titre du service de leur dette extérieure en 2023. Les intérêts remboursés s’élèvent à eux seuls à 406 milliards de dollars. 

Depuis les années 2000, la nature de la dette a également évolué. Aujourd’hui, ce sont des créanciers privés (des banques commerciales, des fonds de pension, des fonds d’investissements…) qui détiennent la majorité des dettes des Etats. Or, ils n’ont aucune obligation de participer aux initiatives internationales publiques de restructuration et d’annulation de dette. 

La dette étouffe de nombreux pays et les empêche d’investir dans les politiques publiques qui permettraient de subvenir aux besoins de leurs populations. Ainsi, le service de la dette représente 2,7 fois les dépenses d’éducation, 4,2 fois les dépenses de santé, 11 fois les dépenses de protection sociale et 54 fois les dépenses climatiques.  

La dette retarde d’autant plus la transition écologique de ces pays qui sont pourtant bien souvent en première ligne face au changement climatique.

406 milliards

de dollars : c’est le montant des intérêts remboursés par les pays en développement pour la seule année 2023.

60%

de la dette des pays en développement sont détenus par des créanciers privés.

Que fait le CCFD-Terre Solidaire au sujet de la dette des pays du Sud ? 

Le CCFD-Terre Solidaire se mobilise en faveur de la justice économique. Nous menons des actions de plaidoyer à l’échelle nationale et internationale pour défendre des solutions justes et durables face à la problématique de la dette insoutenable des pays du Sud. 

Exiger des pays du Sud le remboursement d’une dette insoutenable revient à priver des populations entières de conditions de vie dignes et de leurs droits à un environnement sain. Il est urgent que les pays et créanciers du Nord prennent leurs responsabilités et annulent une partie conséquente de la dette pour ne plus obliger les pays du Sud à choisir entre lutte pour leur développement et lutte contre le changement climatique.

Mathieu Paris, Chargé de plaidoyer Dette au CCFD-Terre Solidaire 

Le CCFD-Terre Solidaire demande : 

  • L’annulation de la dette insoutenable des pays en développement, et non sa “simple” suspension afin de rétablir la viabilité de la dette pour permettre aux gouvernements de garantir les droits humains, de lutter contre le changement climatique et d’assurer l’égalité entre les hommes et les femmes. 
  • La participation obligatoire des créanciers privés aux initiatives de restructuration de la dette et l’impératif pour eux de les respecter. 
  • La création à l’ONU d’un mécanisme multilatéral de restructuration des dettes et non plus dans des instances dominées par les pays riches (G20, G7, FMI, Banque mondiale, Club de Paris…) où la voix des pays du Sud ne porte pas. 

En 2025, une coalition d’ONG, dont le CCFD-Terre Solidaire est membre, lance une campagne internationale pour obtenir l’annulation de la dette et la réforme des espaces de gouvernance sur la dette. Gageons que, comme il y a 25 ans, la mobilisation croisée de la société civile et de l’Église permettra d’obtenir l’effacement d’une partie de la dette des pays du Sud, dans un souci de justice sociale et climatique.  

Signer la pétition

Photo de couverture : Roberta Valerio

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Lili Payant