Avec 260 licenciés, dont 130 jeunes, le Club sportif corbigeois est un fringant centenaire qui rayonne loin dans le Haut-Nivernais. À sa tête, Jean-François Ducrot, dit Jeannot, joueur, éducateur puis président, dont la conception du foot est ultra… citoyenne. Aide aux devoirs avant l’entraînement, étapes dans les musées de la Résistance ou à Oradour-sur-Glane lors des voyages, projets collectifs ambitieux : plus qu’un club, le CSC est un étonnant espace d’éducation, d’intégration, de tolérance. Et ça marche : le club a gagné 100 licenciés en dix ans.

Avant de plancher sur les centres en retrait, la jonglerie et le une-deux, les enfants de l’école de foot du Club sportif corbigeois (CSC) passent, deux soirs par semaine, par la case devoirs dans le club-house. Le bon usage du « et » et du « est », du « se » et du « ce » est contrôlé par une maman, tandis qu’un garçon en maillot de Manchester City aide un camarade. L’exercice est rodé, comme l’explique Antoine Guillaudat, responsable des éducateurs : « Ceux qui viennent de loin n’ont pas besoin de faire leurs devoirs en rentrant ; les parents sont tranquilles. Ça nous permet de voir les enfants différemment, de mettre l’accent sur le côté scolaire comme sur le côté sportif. Et ça développe l’entraide, on le ressent sur le terrain. »

En place depuis trois ans, l’aide aux devoirs est une des initiatives imaginées par Jean-François Ducrot pour faire grandir un club né en 1919 et dans lequel il a passé l’essentiel de sa vie : « J’ai eu ma première licence en 1979 ou 1980. Mon grand-père et mon père ont joué dans ce club avant moi. Je voulais être avec les copains et puis à l’époque, à Corbigny, il n’y avait pas trop le choix, c’était foot ou foot », rigole le président qui, à 50 ans, dépanne encore dans les buts : « J’ai commencé avant-centre, mais avec l’âge… »

Citoyenneté à tous les niveaux

Capitaine, éducateur à 25 ans, devenu président il y a dix ans, le « paysan », comme il aime à se définir lui-même, fait croître son club de toujours avec une approche raisonnée, qui s’attache à prendre à contre-pied l’image violente du foot. Au CS Corbigeois, la citoyenneté est ancrée à tous les niveaux : « Quand un supporter s’en prend à un arbitre, je traverse le terrain pour aller lui parler, et il n’y a plus de souci. Le respect de l’arbitre, de l’adversaire, de l’éducateur, c’est primordial. Tous les ans, en début de saison, on fait un rappel à l’ordre. On sensibilise les joueurs comme les parents. Avec les familles décomposées, recomposées, nous les associations, nous jouons un rôle important. Nos quatorze éducateurs sont diplômés, et tous les enfants apprennent à dire bonjour, au revoir, à ranger le vestiaire, jeter les déchets à la poubelle. »

Travaillé toute l’année, le savoir-vivre ensemble est peaufiné lors des stages organisés pendant les vacances scolaires, qui réunissent une quarantaine de jeunes de toutes les catégories : « Je crois beaucoup à l’intégration par le sport. On peut rassembler tous les niveaux sociaux, toutes les couleurs, toutes les religions. » Président engagé, « Jeannot » Ducrot ajoute sa touche humaniste à la vie du club, en donnant aussi du sens aux longs voyages vers les tournois : « Par exemple, quand on est allés en Belgique, on s’est arrêtés à Verdun. On est allés dans des musées de la Résistance, au Chambon-sur-Lignon, à Oradour-sur-Glane. Je me souviens de Genia Obœuf et de Serge Antoine, qui venaient nous parler en classe de la Seconde Guerre mondiale, de la déportation, de l’Occupation. Ils nous disaient que les Allemands n’avaient pas vu le nazisme arriver. On a toutes les origines dans le club, on fait le tour du monde. Corbigny s’est construit avec les Polonais, les Grecs, les Nord-Africains. On a des joueurs du Guatemala, d’Australie, des Pays-Bas, d’Italie ; si tout le monde apprend à se connaître, on va éviter que ce genre de méfaits se reproduise. »

Deux grands tournois organisés chaque année

Si les jeunes Corbigeois voyagent au long cours grâce au foot, le club s’attache également à créer des événements qui rayonnent au loin. Deux « gros » tournois sont ainsi organisés chaque saison, comme le détaille Jean-François Ducrot : « On va vivre la 6e édition de notre tournoi de futsal, qui a lieu à la fin des vacances de Noël. On rassemble 400 joueurs des U9 aux U18, et ça dure plusieurs jours. Et on aura en 2025 la 3e édition de notre tournoi de l’Ascension, à 20 équipes de U18, sur deux jours. On mobilise beaucoup de parents dans l’organisation. On est des ambassadeurs de la Nièvre, le plus beau des départements à mes yeux. Les équipes qui viennent de loin en profitent pour le visiter. »