En utilisant le modèle dynamique le plus sophistiqué de la galaxie d’Andromède et de son histoire, une équipe dirigée par un astronome du LIRA de l’Observatoire de Paris – PSL et CNRS a démontré que sa masse était bien plus faible que ce que l’on pensait, impliquant un net déficit de matière sombre par rapport aux prédictions de la cosmologie moderne. L’étude paraît en ligne dans la revue Astronomy & Astrophysics, en date du 3 Février 2025.
Parce qu’elle est notre grande voisine, la galaxie d’Andromède a joué un rôle essentiel en cosmologie. C’est en 1970 que Vera Rubin et ses collaborateurs ont découvert que les nuages de gaz au bord de son disque avaient une vitesse trop grande pour être en équilibre avec la masse en étoiles et en gaz d’Andromède. Cela démontrait la nécessité d’un gigantesque halo massif de matière sombre entourant cette galaxie.
L’équipe scientifique d’astronomes de l’Observatoire de Paris – PSL, des Universités Aix-Marseille, Andres Bello de Santiago du Chili, de Padoue (Italie), et de l’Institut d’Astrophysique de Paris, a mis au point le modèle dynamique le plus sophistiqué pour déterminer la masse totale d’Andromède. Ce modèle, réalisé avec les moyens de calcul de l’Observatoire de Paris (MesoPSL), reproduit en effet toutes les observations de cette galaxie, depuis la barre centrale jusqu’aux grands courants stellaires qui peuplent son halo. Pour reproduire toutes ces propriétés ainsi que la courbe de rotation d’Andromède, les astronomes ont démontré que sa masse totale était de 450 milliards de masses solaires.
Par le passé, la masse totale d’Andromède était estimée deux à quatre fois plus élevée que la nouvelle valeur. Cette révision déchirante de la masse d’Andromède est principalement liée à l’histoire de cette galaxie qui a subi une gigantesque collision il y a 3 milliards d’années. L’étude publiée démontre qu’au-delà d’un rayon de 80 000 années-lumière, la matière n’est plus à l’équilibre avec les forces gravitationnelles de la galaxie, parce qu’elle n’a pas eu le temps de décrire suffisamment d’orbites depuis la grande collision. Cela rend obsolètes les estimations d’une grande masse pour la galaxie d’Andromède qui étaient basées sur des objets astrophysiques orbitant à des distances entre 100 000 et 1 000 000 d’années-lumière.
La réduction de la masse d’Andromède pose immédiatement une question à la cosmologie moderne. Pour celle-ci, la matière ordinaire, faite de gaz et d’étoiles, représente moins d’un sixième du contenu matériel de l’Univers. Avec la nouvelle mesure, c’est un tiers de la masse d’Andromède qui est constituée de matière ordinaire. Cela induit une déficience de matière sombre dans la galaxie d’Andromède, à la différence de ce qui avait été établi pour la plupart des grandes galaxies spirales avec leurs courbes de rotation plates. En résumé, il manque de la masse manquante dans la galaxie où on l’avait identifié pour la première fois. Une contradiction qui pourrait bouleverser les modèles cosmologiques.
Référence
Ce travail de recherche a fait l’objet d’un article intitulé “Dark matter fraction derived from the M31 rotation curve”, par F. Hammer et al., à paraître le XXX 2025 dans la revue Astronomy & Astrophysics (arXiv : 2412.02737).
https://www.aanda.org/10.1051/0004-6361/202452753
Collaboration
L’équipe est composée de François Hammer (Observatoire de Paris – PSL), Yanbin Yang (Observatoire de Paris – PSL), Philippe Amram (Université d’Aix Marseille), Laurent Chemin (Universidad Andres Bello), Gary Mamon (Institut d’Astrophysique de Paris), Jianling Wang (Observatoire de Paris – PSL), Istiak Akib (Observatoire de Paris – PSL), Yongjun Jiao (Observatoire de Paris – PSL) et Haifeng Wang (Universita di Padova).