Dans un article publié dans Nature portfolio journal – Sustainable Mobility and Transport intitulé “How gasoline prices influence the effectiveness of interventions targeting sustainable transport modes? ”*, Guillaume CHEVANCE – chercheur à l’Institut de recherche en santé, environnement et travail (UMR_S Inserm 1085 – Irset) et titulaire de la Chaire en santé mondiale de l’École des hautes études en santé publique (EHESP) – s’est intéressé au rôle du prix de l’essence sur l’efficacité des interventions visant un report de la voiture vers des modes de transports actifs et publics.
Avec ses collègues, il montre que si la hausse du prix de l’essence favorise dans certains cas l’abandon de la voiture au profit de modes de transports plus sains et durables, c’est à la condition que les territoires aient investi dans des infrastructures offrant des alternatives à la voiture.
L’article ci-dessous synthétise les principaux enseignements issus de cette étude accessible dans son intégralité sur le site Nature.com (version anglaise)
*Comment les prix de l’essence influencent-ils l’efficacité des interventions ciblant les modes de transport durables ?
Réduire le recours à la voiture : un enjeu écologique et de santé publique
Le secteur des transports est dominé par l’usage de la voiture individuelle, et représente près de 25 % des émissions directes de CO₂ dans le monde. Réduire ces émissions est donc un enjeu écologique important, et passe notamment par la réduction de l’usage de la voiture individuelle. En plus de lutter contre le changement climatique, réduire la dépendance à la voiture présente des bénéfices pour la santé. En effet, lorsqu’on évite de prendre la voiture, on pratique davantage d’activité physique (vélo, marche) et on diminue la pollution de l’air et sonore.
Des interventions pour favoriser les mobilités douces
Les transitions vers des modes de transport sains et durables sont généralement encouragées par des interventions visant soit à modifier les comportements individuels, par exemple en favorisant l’accès à des vélos via des aides financières, ou en modifiant l’environnement bâti, comme avec la construction de pistes cyclables. Ces deux types d’interventions ont déjà montré leur efficacité pour promouvoir un report de la voiture vers des modes de transports actifs et publics.
Les prix de l’essence : un levier supplémentaire ?
Parallèlement, il a été montré que le prix de l’essence influence les comportements de transport. Les chercheurs ont donc souhaité savoir si l’augmentation du prix du carburant permettrait d’augmenter l’efficacité des interventions visant un report de la voiture vers des modes de transports actifs et publics. Ils ont ainsi compilé plus de 50 interventions testant l’efficacité des mesures de promotion des transports actifs et publics conduites en Amérique du Nord, Asie, Europe et Australie au cours des 30 dernières années, et estimé l’impact du prix des carburants sur l’efficacité de ces interventions.
Des résultats différents selon les contextes
Leurs résultats montrent que les prix du carburant influencent significativement l’efficacité des interventions visant des modes de transport actifs et publics en Europe, mais pas pour les autres continents. En Europe, les interventions se sont révélées plus efficaces lorsque les prix du carburant étaient plus élevés. Les sites européens où les interventions ont été menées disposaient d’un meilleur accès aux transports publics, d’une plus grande proportion de rues et d’espaces publics ouverts, ainsi que d’un taux de motorisation plus faible que sur les autres continents. Les résultats observés pour l’Europe dans cette étude sont donc probablement attribuables à ces différences contextuelles.
Investir dans des infrastructures adaptées : un préalable nécessaire
Ces résultats montrent que des infrastructures adaptées aux transports publics et actifs sont essentielles pour accompagner les variations prévues ou soudaines des prix des carburants. Il apparaît ainsi crucial d’investir dans des infrastructures favorisant les transports actifs et publics, particulièrement dans les zones dépendantes de la voiture, pour renforcer la résilience face aux futures hausses des prix du carburant et accélérer la transition écologique.
“Dans un contexte de hausse globale des prix du pétrole brut, investir dans des infrastructures de transports publics et actifs, en particulier dans les zones fortement dépendantes de la voiture, constitue une forme “d’assurance-vie” pour nos sociétés” souligne Guillaume Chevance.