Seules face au handicap - Chronique KTO radio

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Marilyne Chaumont, KTO radio, La parole aux associations, 5 mars 2025

Dans son numéro qui vient de paraître, la revue Ombres & Lumière enquête sur la réalité invisible de femmes qui vivent une double peine : la séparation du couple et le handicap de leur enfant. Ces mères qui se retrouvent seules pour assumer la charge du quotidien représentent l’écrasante majorité des familles monoparentales concernées par le handicap. Qui sont-elles et qu’affrontent-elles au fil du temps ? De quel soutien ont-elles besoin ? C’est à ces questions que Marilyne Chaumont, rédactrice en chef d’Ombres & Lumière, répond aujourd’hui. 

Marilyne Chaumont, bonjour. Pouvez-vous dire pourquoi vous avez fait ce choix d’axer votre dossier sur les femmes seules à élever leur enfant handicapé ?

Marilyne Chaumont : 90% des familles monoparentales composées d’un ou plusieurs enfants handicapés sont portées par des mères seules. Cette double peine, qui est d’être séparée de son conjoint et malmenée par le handicap, provoque un double risque. Celui de l’isolement, et de l’épuisement. Ces mères doivent assurer sur tous les fronts. Et elles portent sur leurs épaules la charge affective, mentale et financière de leur famille. Les psychologues que nous avons interrogées disent que ces femmes vivent une forme de survie psychique. A la fois, elles sont obligées de tenir coûte que coûte. Elles ne « peuvent » pas lâcher, elles ne peuvent pas craquer. Mais leur épuisement est immense. Et puis, il y a un tel fossé entre le monde et elle, qu’elles ont tendance à s’isoler. Surtout si elles n’ont pas d’aide concrète de leur famille.

Fanja qui élève seule son fils de 16 ans, Mathis, porteur d’autisme, en a témoigné dans notre dossier. Elle était incapable de bien se concentrer pour une formation d’aide-soignante qu’elle avait reprise, à force d’enchaîner les rendez-vous médicaux. Elle ne pouvait pas non plus se reposer sur sa famille qui disait qu’elle faisait des histoires. Fanja nous l’a confié « Je m’étais enfermée dans une bulle avec Mathis, je ruminais, je pleurais, sans pouvoir me confier à qui que ce soit ».

Comment cette femme a-t-elle trouvé une issue ?

Marilyne Chaumont : Grâce à une association qui lui a permis de travailler au domicile des personnes âgées, Fanja a pu commencer à retravailler et retrouver un minimum de vie sociale et relationnelle.
D’autres femmes ont raconté comment elles ont agi pour ne pas étouffer. Elise, qui est mère de trois enfants dont Lucas autiste, et Guillaume, jeune garçon polyhandicapé qui est décédé l’an dernier. Après de nombreuses années en soins palliatifs à domicile, elle a réussi à ne pas détruire sa vie sociale et relationnelle malgré des années en réclusion chez elle. Elle n’était plus invitée à des dîners, elle ne pouvait pas partir en vacances. Sa famille non plus n’était pas présente, mais elle a réussi à s’entourer de ses plus proches voisins, dans son HLM, et des soignants qui venaient à domicile.

« Il faut toujours laisser la porte ouverte », dit-elle. Elle est rejointe en ce sens par Domitille, notre grand témoin. Elle rappelle que pendant dix ans, sa seule activité a été de s’occuper de ses enfants. Cette suractivité l’a conduite à une dépression. Domitille insiste : «Quand on a le nez dans le guidon, on se dit que les gens pourraient se manifester. Mais si on leur explique pas notre besoin, ils ne peuvent pas le deviner ». De son côté, elle a reçu un soutien vital de sa famille. Et sur leur fil WhatsApp, elle a appris à écrire ces quelques mots régulièrement : « J’ai besoin d’aide ».  Il est primordial d’oser demander de l’aide. L’amour inconditionnel de leur enfant amène ces mères à ne pas compter le temps passé pour lui, à sacrifier leur vie professionnelle souvent inexistante ou réduite. Mais ce manque de répit peut les abîmer sur le long terme.

Quels soutiens spécifiques existe-t-il pour ces femmes ?

Marilyne Chaumont : Les associations et les groupes de paroles sont précieux. Je pense notamment aux Journées des mamans organisées par la Fondation OCH dans 12 villes de France au printemps. Ces femmes peuvent aussi participer au forum Viva les 22 et 23 mars prochains au parc floral de Vincennes, où aura lieu l’atelier « Mamans solos & handicap » que j’animerai le dimanche 23 mars. L’association Cœur de Maman, les chantiers éducation atypique des Associations familiales catholiques. Beaucoup d’autres lieux existent et nous en rendons compte notre dossier. Et puis il y a des aides financières dédiées. Nous avons pris soin dans notre numéro d’offrir des témoignages mais aussi des pistes concrètes pour aider ces femmes.

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Nora ngoudiakaka