L’artiste stanoise Lia, qui peint à la galerie Tâches d’art, évoque les violences intrafamiliales à travers des toiles où les visages apparaissent en négatif, bleu.
Un style particulier qu’elle va continuer à travailler grâce à son séjour prochain à New-York.
Elle n’a pas l’habitude de se raconter, préférant s’exprimer à travers ses tableaux. Pourtant, une fois lancée sur sa conception de la peinture et l’histoire de ses toiles, la jeune peintre stanoise Lia Pan sait trouver les mots. Sur le canapé de la galerie Tâches d’art, où elle exposera son dernier tableau en mars, l’étudiante raconte le projet artistique qui l’occupe depuis les deux dernières années. « Je travaille sur les violences intrafamiliales. En ce moment, avec le mois de mars, je me suis concentrée sur la question de la femme, la mère, la jeune fille », décrit Lia.
Visages bleus, fonds rougeoyants, les tableaux de l’artiste interpellent. « Je montre les visages en négatifs pour montrer une réalité dans des images qui ne paraissent pas réelles, car c’est un sujet très complexe et souvent silencieux. »
Avant d’en arriver à cette thématique et à trouver son style, Lia a commencé par le dessin. « Plus jeune, j’aimais bien gribouiller. Ça a toujours été un exutoire pour moi. » D’un simple passe-temps, la jeune fille décide d’aller plus loin et se lance dans une licence d’art plastique. C’est là que naît sa passion pour la peinture, et que l’idée d’en faire son métier se précise.
À 23 ans, elle étudie désormais au sein d’un master d’Art et création internationale à La Sorbonne. « On a beaucoup de théorie, moins de technique pure. Ça m’a aussi permis de prendre mon temps pour évoluer dans ma peinture. » Parmi ses inspirations, elle cite l’approche de Gérard Garouste ou encore la figure de Niki de Saint-Phalle.
LES VIOLENCES FAMILIALES EN TOILE DE FOND
Des yeux perçants rappelant ceux d’un serpent, comme celui caché dans son encadrement en crochet, et un visage presque fantomatique, Lia sourit en montrant un de ses autoportraits. « Ça va, je ne fais pas trop peur ? ». Le serpent, elle le peint souvent dans ses toiles. « Il représente beaucoup de choses, et ne se limite pas à une représentation du mal, c’est plus nuancé que ça », précise l’artiste. « C’est aussi une incarnation de la source des maux des personnes que je peins. Souvent, la violence engendre la violence. Un père violent dans un foyer peut provoquer de la violence chez une mère, par exemple. »
Discrète sur ce qui l’a amenée à traiter de ce thème difficile, Lia explique être partie de sa propre expérience d’un contexte familial dysfonctionnel pour l’élargir avec d’autres témoignages de personnes victimes. « J’ai beaucoup lu et interviewé des gens concernées par le sujet, qui est aussi le thème de mon mémoire. C’est difficile de le montrer, j’essaye de le faire comprendre avec des décors bizarres, un peu étranges. Je ne montre pas l’action mais je reste dans la figuration, avec des évocations de la nature. »
Pour poursuivre ses recherches, la jeune Stanoise partira bientôt de l’autre côté de l’Atlantique. Dans le cadre de son master, Lia a choisi de vivre pendant deux mois à New-York, où elle collaborera avec des associations engagées dans l’aide aux victimes de violences. « J’étais très intéressée par l’histoire d’Harlem et du mouvement noir américain, d’autant plus que les sujets de mes peintures sont afro-descendants. Ce n’était pas volontaire au début mais je suis partie de là. Je veux voir quel rapport à la famille ressort, quelles différences culturelles on peut observer. L’idée c’est d’échanger. »
Forte de tous ces projets, heureuse d’avoir trouvé dans la galerie Tâches d’art un lieu de création et de partage avec des artistes aguerris, Lia souhaite bien poursuivre sur la voie de la peinture et prépare ses premières expositions.
• J.B.
Retrouvez un de ses tableaux dans l’exposition »À tâche égale » du 15 au 30 mars, à la galerie Tâches d’art au 6 rue Jean-Durand.