Projet noCNN : relier les images du bloc à l’IRM préopératoire

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Mis à jour le 17/11/2025

Aujourd'hui, l'IRM préopératoire est centrale pour préparer une résection tumorale dans le cerveau. Tout au long de l'opération, elle sert de repère au chirurgien pour guider son geste grâce à la neuronavigation, une technologie qui permet de représenter les outils du chirurgien utilisés au bloc opératoire dans cette IRM. Mais pendant l'opération, le cerveau perd sa forme initiale, faussant alors cette représentation. Une équipe Inria, en collaboration avec des neurochirurgiens, travaille à modéliser en temps réel ce phénomène, afin de corriger la neuronavigation pour mieux guider le geste chirurgical.

Quand deux chercheurs de l'équipe Camin, François Bonnetblanc et François Bailly, mettent en commun leurs compétences, l’un en stimulation corticale et électrophysiologie, l’autre en vision par ordinateur et analyse du mouvement humain, naît alors l’action exploratoire noCNN. L'objectif : concevoir un outil capable d’assister le neurochirurgien pendant une opération visant à retirer une tumeur cérébrale. 

« Tout est parti d’une discussion avec un neurochirurgien à Paris », se souvient François Bonnetblanc.

Projet ambitieux, risqué et inscrit dans un temps long, noCNN illustre parfaitement l’esprit des actions exploratoires d’Inria : donner l’espace nécessaire pour tester de nouvelles approches, à la croisée de plusieurs disciplines, et en mesurer le potentiel.

Comment ça fonctionne ?

« Dès qu’on opère un cerveau, il se déforme beaucoup », rappelle François Bonnetblanc. L’idée est d’utiliser les images réelles prises pendant l’intervention. « Le chirurgien a la possibilité de filmer ce qui se passe sur le cerveau, d’avoir des photos, des vidéos, et de les reporter dans l’imagerie préopératoire pour savoir exactement où il est », explique-t-il. 

L’équipe cherche ainsi à compenser les déformations du cerveau qui apparaissent au fil de l’opération, pour restituer avec précision la position des gestes, des outils et des zones opérées. 

« Nous aimerions être capables, grâce à des outils numériques, de reporter automatiquement tout ce que fait le chirurgien sur l’IRM préopératoire, sans modifier sa routine chirurgicale », ajoute François Bailly.

Ce que ça change

Derrière les outils numériques développés se construit une correspondance plus fidèle entre la réalité intra-opératoire et l’imagerie standard préopératoire servant à la planification du geste chirurgical ainsi qu’une diminution de la perte d’information de l’activité chirurgicale proprement dite.

Dans certaines interventions, un écart d’un centimètre suffit à provoquer des séquelles irréversibles. En recalant les images de son intervention sur l’IRM initiale, les chercheurs espèrent offrir au chirurgien une vision plus stable et plus sûre, pour accompagner les gestes opératoires avec la plus grande précision.

Ce travail, pensé pour accompagner le geste, pourrait aussi servir à mieux partager et enseigner la complexité de ces interventions. 

« Si vous n’êtes pas l’interne qui vient voir la chirurgie, vous ne comprenez pas forcément ce qui se passe, parce que vous n’avez pas ces photos intra-opératoires, vous n’avez pas cette mise en relation entre le cerveau avant l’opération et ce qui se passe pendant », explique François Bonnetblanc.

Pour mieux relier la donnée au réel, le doctorant et l'ingénieure impliqués dans le projet ont assisté à des interventions chirurgicales à Montpellier et à Paris. 
L'objectif : observer la complexité du geste au bloc, comprendre les contraintes du neurochirurgien et donner du sens aux images qu’ils manipulent ensuite dans leurs travaux de recherche.

En replaçant ces images dans leur contexte, les chercheurs espèrent préserver une trace de ce savoir pratique, pour qu’il puisse se transmettre et s’enrichir au fil des opérations.

Un an de recherche, et après ?

Après un an, l’équipe mesure l’ampleur des questions scientifiques à explorer. Le guidage préopératoire en temps réel par vision reste un horizon de recherche à long terme. L’action exploratoire a pour vocation de poser les premiers jalons, de valider des briques technologiques et d’ouvrir la voie à de nouveaux travaux et à de futures thèses.

L'étape 1, les surfaces 
Recalage de ce qui se passe « en surface » à partir d’images 2D (photos ou caméra unique). 
L’enjeu : faire correspondre une vue 2D prise pendant l’intervention à un volume 3D issu de l’IRM préopératoire.

L'étape 2, aller en profondeur 
Prise en compte de la cavité opérée et des profondeurs grâce à la vision stéréoscopique : deux caméras fixées sur des lunettes permettent de reconstruire la 3D, d’estimer la position des outils et la géométrie de la cavité, puis de recaler le tout sur l’IRM préopératoire.

Les travaux menés en 2D constituent le socle des futures briques 3D.

Certaines avancées trouvent déjà des applications concrètes.

En planification préopératoire, la visualisation des veines reste difficile à partir des IRM classiques (lecture en coupes 2D). À partir des outils développés dans le cadre du projet noCNN, les chercheurs ont engagé la création d’une vue « photo-réaliste » prédictive de la surface corticale (veines, sillons, gyrus) — telle qu’elle apparaîtra à l’ouverture. Cette brique, en cours de développement, pourrait être prochainement évaluée en milieu hospitalier.

À terme, des lunettes stéréoscopiques embarquées pourraient permettre de suivre en continu les gestes opératoires et de les projeter sur l’image de contrôle du chirurgien, pour un guidage toujours plus précis.

Le développement complet d’une caméra embarquée nécessitera un travail de recherche au-delà de la durée de l’action exploratoire, dont la poursuite est d’ores et déjà à l’étude.
Une nouvelle thèse est en préparation, possiblement dans le cadre d’un dispositif conjoint Inria–INSERM, avec la participation d’un expert en vision par ordinateur appliquée aux images cérébrales.

Des échanges scientifiques sont également en cours avec plusieurs partenaires, notamment l’INSERM et le CNRS/Inria Lyon, pour accompagner les prolongements du projet.

L’équipe et ses partenaires

L’action exploratoire noCNN réunit cinq membres : les chercheurs d’Inria François Bonnetblanc et François Bailly, le neurochirurgien de l’AP-HP Pr Emmanuel Mandonnet, le doctorant Paul André et l’ingénieure Émilie Ouraou.

Autour de ce noyau, le projet mobilise plusieurs collaborations médicales, notamment avec le Pr Hugues Duffau et le Dr Sam Ng au CHU de Montpellier. Multiplier les retours de terrain est essentiel : les pratiques diffèrent d’un service à l’autre, et l’approche doit pouvoir s’adapter à cette diversité.

Moyens associés 
L’action exploratoire finance une thèse, démarrée à l’automne 2024, et une Action de Développement Technologique (ADT) de 18 mois. La thèse aborde les aspects théoriques du recalage et de la modélisation, tandis que l’ADT soutient les développements pratiques et l’implémentation des outils.

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