Mexique : les disparitions de femmes et de filles doivent faire l'objet d'une réponse institutionnelle à la hauteur de la gravité du phénomène

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Du 3 au 7 novembre 2025, la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et ses organisations membres et partenaires mexicaines Idheas Litigio Estratégico en Derechos Humanos (IDHEAS) et l’Equipo Mexicano de Antropología Forense (EMAF) ont mené une mission de plaidoyer au Mexique, s’appuyant sur leur rapport documentant les liens entre disparitions de femmes et de filles et traite des personnes. Durant les rencontres, plusieurs membres des autorités ont reconnu les défaillances identifiées dans le rapport. Face à la gravité de la situation, la FIDH appelle à la concrétisation rapide des engagements exprimés par les autorités fédérales et entités fédérées et au respect effectif des protocoles et mécanismes existants au niveau national.

Paris, Mexico, le 28 novembre 2025. La FIDH, IDHEAS et EMAF ont mené du 3 au 7 novembre 2025 une mission de plaidoyer dans l’Etat du Mexique pour appeler les autorités mexicaines à respecter leurs obligations découlant du droit international relatif aux droits humains ainsi que de leurs normes nationales en matière de protection des droits des femmes et des victimes de disparitions. Parmi les textes en attente d’application effective : la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF) et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées (CED). Les trois organisations ont notamment rappelé aux autorités les recommandations formulées dans leur rapport « Qui nous recherche ? Qui se soucie de nous ? » publié un an auparavant.

Au cours de cette mission, la délégation a rencontré plusieurs acteurs institutionnels clés, dont l’Unité de défense des droits humains du Secrétariat à l’Intérieur, le Secrétariat à la condition féminine, la Commission des droits humains du Sénat de la République, les parquets spécialisés en traite des personnes et en féminicides de l’État du Mexique, ainsi que la Commission de mise en oeuvre du Parquet général de la République. Ces rencontres ont permis d’identifier des pistes concrètes pour renforcer la prévention des disparitions de femmes et de filles liées à la traite des personnes.

Des lacunes persistantes dans la protection des femmes et des filles

Le rapport « Qui nous recherche ? Qui se soucie de nous ? » documente diverses défaillances dans la réponse des autorités mexicaines face aux disparitions de femmes et de filles liées à la traite dans l’Etat du Mexique, parmi lesquelles figurent : la prise en compte insuffisante des liens entre disparition, traite et féminicides, le déficit de communication et de coordination entre les parquets spécialisés, ainsi que la revictimisation récurrente des familles par les instances chargées de l’enquête.

Dans l’ensemble, les autorités rencontrées ont reconnu avoir connaissance des carences documentées. Plusieurs ont souligné les actions entreprises ces dernières années pour y remédier, notamment l’adoption de protocoles spécialisés et l’élaboration du Programme intégral pour prévenir, accompagner et éradiquer la violence contre les femmes 2025-2030. Certaines ont également exprimé leur intérêt pour renforcer les mécanismes existants et explorer de nouvelles pistes d’action. A cet égard, la possibilité de renforcer la coordination entre les parquets spécialisés de l’Etat du Mexique par la mise en place d’échanges plus réguliers a été évoquée.

« Nous saluons la reconnaissance par les autorités mexicaines des lacunes identifiées. Toutefois, la gravité de la situation exige non seulement la transformation rapide de ces engagements en actions concrètes, mais également l’application effective des protocoles et mécanismes déjà en vigueur », a déclaré Anaya Finalé, Chargée de programme du Bureau droits des femmes et égalité de genre de la FIDH.

« Nos filles disparaissent deux fois »

Dans un système marqué par l’impunité, ce sont les familles elles-mêmes qui assument l’essentiel du travail de recherche et d’investigation que devraient effectuer les autorités. Le collectif de victimes rencontré a souligné auprès de la délégation que le système judiciaire actuel semblait privilégier la condamnation des auteurs au détriment de la recherche des victimes. Souvent, une fois qu’un responsable est condamné, les recherches cessent, privant les familles de la possibilité de retrouver leurs filles disparues. Dans ce contexte, le collectif a insisté sur la nécessité pour les autorités d’explorer des mécanismes de justice restaurative susceptibles de fournir des informations cruciales pour favoriser la localisation des victimes.

« Nos filles disparaissent une première fois lorsqu’elles sont enlevées. Elles disparaissent une seconde fois lorsque les autorités n’enquêtent pas, ou lorsque, après avoir condamné un auteur, elles cessent de les chercher. Cette double disparition doit cesser », ont témoigné les représentantes des collectifs de victimes.

Si la reconnaissance des défaillances par les autorités mexicaines constitue un signal positif, la FIDH, IDHEAS et EMAF continuent d’exiger la mise en œuvre de réponses effectives pour combattre la crise des féminicides dans l’Etat de Mexico et accompagner les collectifs de victimes dans leur quête de justice et de vérité. La FIDH, IDHEAS et EMAF enjoignent l’État mexicain à poursuivre le dialogue entamé et à assurer un suivi effectif des recommandations formulées lors des rencontres.

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Maxime Duriez