Chronique de Florence Gros, directrice de la Fondation OCH, sur Radio Notre Dame – 7 janvier 2025
André est schizophrène, sa foi est son roc. A cause de sa maladie psychique, il entend régulièrement des voix qui pourraient l’inciter à se faire du mal. Il le sait alors il écoute en boucle des vies de Saint et des conférences qui l’encouragent à tenir bon et à vivre de l’amour de Jésus-Christ. Sa vie est rythmée de prières régulières, mais en-dehors d’une communauté paroissiale parce que le monde l’angoisse. Une fois par an, il se rend hors saison à Lourdes pour faire « le plein de tendresse de Marie » comme il aime à le dire. J’ai rencontré André à l’OCH. Sa foi et son désir de Dieu m’ont bouleversée. Cette rencontre rejoint celles qu’ont pu faire les journalistes de la revue Ombres & Lumière que publie l’OCH. Le dossier du dernier numéro est consacré aux « Troubles psychiques, au risque de la foi ». Des personnes malades psychiques y expriment leur soif spirituelle et leurs difficultés. Pour beaucoup de personnes malades, un équilibre est à trouver car le risque de délire mystique existe mais leur foi joue un rôle non négligeable dans leur rétablissement.
Simon : Est-ce que dans le soin, il y a de la place pour prendre en compte cette soif spirituelle ?
Ombres & Lumière a interviewé Jacques Besson, professeur à la faculté de biologie et de médecine de l’université de Lausanne. Il est addictologue et ancien chef de service d’un centre hospitalier. L’article est passionnant. Il y rappelle que la spiritualité est un besoin naturel propre à chaque homme, que nier la spiritualité d’une personne est grave et que l’OMS définit la santé comme étant un état de bien-être physique, mental, social et spirituel. Pour lui, aborder sérieusement la vie spirituelle d’un patient est un levier pour son rétablissement. Il fait aussi la différence entre le spirituel et le religieux. Ces rappels sont essentiels pour les soignants et tous ceux qui hésitent encore à écouter la soif spirituelle des personnes malades à cause de la peur du délire possible. Il y a encore beaucoup de méfiance et de méconnaissance. A travers ses articles, Ombres & lumière nous éclaire et transmet l’Espérance. Le témoignage humble de Ludovig en est un exemple. Il peut rejoindre tous ceux qui souffrent de troubles psychiques et peinent à trouver un équilibre entre soins et pratiques religieuses. Les deux cohabitent chez lui. Ludovig le dit : « Dieu ne m’a pas guéri, mais sans lui, il n’y a pas de bonheur possible ». Il se soigne et vit avec Dieu.
Simon : Le parcours spirituel de toutes ces personnes malades est-il toujours sinueux ?
Les aumôniers en psychiatrie, les responsables de groupe de prière comme amitié espérance sont en effet souvent témoins de parcours difficiles parce qu’il faut du temps pour que les personnes malades reconnaissent leurs besoins, ce qui leur fait du bien ou au contraire du mal. Une jeune retraitée malade témoigne dans la revue qu’elle sait maintenant qu’il y a des excès en elle, que sa foi est à double tranchant car elle peut alimenter des délires ou l’apaiser. Que d’humilité et de temps il faut pour prononcer ces paroles qui nous rappellent que, s’il faut faire preuve de prudence et de discernement, l’accompagnement des personnes malades psychiques ne peut faire l’impasse sur leur vie spirituelle, élément essentiel d’équilibre et de joie pour chacun de nous.
Chroniques animées par par Simon Tatreaux, journaliste et présentateur de Radio Notre Dame.