Perspectives 2025 dans le Loiret

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Le président du Département du Loiret, Marc Gaudet, fait le point sur l’année écoulée, notamment sur l’actualité politique nationale, la situation financière de la collectivité et les ambitions départementales pour 2025.

Quel est l’impact de la situation politique de la France sur les collectivités locales ?

Marc Gaudet, président du Département du Loiret : Les collectivités sont aujourd’hui dans une incertitude totale : nous sommes dans le brouillard, résultat d’une dissolution totalement hasardeuse, une réaction sur un coup de tête du président de la République alors que l’on attend de lui qu’il agisse en responsabilité. J’y vois là une vexation des résultats des Européennes. Depuis les législatives, la France se trouve donc dans une instabilité totale avec un bloc central incapable de s’unir. Quand Michel Barnier a été nommé, j’avais tendance à dire : "Laissons-le agir et voyons ce quels Projet de loi de finances (PLF) et  Projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) il nous propose pour 2025". Et là, deuxième coup de théâtre : la censure du gouvernement. Ce monde a-t-il encore les pieds sur terre ? Les deux extrêmes ont fait preuve d’une grande irresponsabilité. Est-ce un calcul politique ? C’est juste incroyable que le Rassemblement national vote une motion de censure inspirée par La France insoumise. On a l’impression qu’ils s’amusent de cette situation : pour moi, c’est pathétique et dangereux.

Au milieu de tout cela, les collectivités se retrouvent donc dans une incertitude totale avec, d’un côté, les citoyens qui attendent des réponses et, de l’autre, un pouvoir politique. La nomination de François Bayrou peut être une bonne chose parce qu’il va rassembler du Parti socialiste jusqu’au bloc central.

Quelle considération pour le terrain, pour nous… Les Départements, en prise directe avec la société, sont en première ligne. Tous les sujets que nous traitons sont concrets. On a l’impression que le gouvernement vit sur une autre planète. Ils préparent 2027 alors qu’on est en 2025. Nous, c’est la vie des Français que l’on prépare. Heureusement que la France continue à tourner grâce au socle des collectivités locales.

Comment le Département va-t-il voter un budget sans orientation gouvernementale ?

Marc Gaudet : On nous laisse dans le flou. Nous allons donc voter notre budget sans tenir compte du PLF en prenant les chiffres les plus pessimistes possibles. Mais nos dépenses croissent plus vite que nos recettes. Comment faire face ? Nous avons donc été dans l’obligation de sortir le rabot. Les premières pistes d’économies ont été trouvées en décalant certains projets de six mois (comme le centre d’incendie et de secours de Châteauneuf-sur-Loire) ou d’un an (restructuration du collège de Jargeau). D’autres projets se décalent d’eux-mêmes comme la véloroute Sully <> Bourges (démarches administratives entraînant un décalage de 12 voire 18 mois). Nous avons aussi alerté les maires que cette nécessité passerait par une baisse des aides aux communes.

Nous allons inscrire 120 voire 110 millions d’euros d’investissement en 2025 contre 160 en 2022 (et 180 avant !) Le Département n’a plus aucune recette fiscale à part les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) [frais de notaire, NDLR] qui ont connu un frémissement au second semestre. Nous n’avons plus aucune marge de manœuvre. Michel Barnier, qui avait bien travaillé en peu de temps, allait autoriser le déplafonnement du taux des DMTO, ce qui aurait pu représenter 7 millions de recettes supplémentaires pour le Département ! Cela aurait été une bouffée d’air qui nous aurait permis de faire face à nos dépenses. Nous attendons 85 millions d’euros de DMTO, ce qui est raisonnable. Nous avions inscrit 80 lors du vote du budget 2024, en janvier, et en juin, nous avons corrigé à 70 quand nous avons vu que le marché immobilier plongeait. En décembre, nous avons décidé de remonter ce montant à 80. C’est du pilotage budgétaire, nous ajustons au plus près de la réalité.

Nous voterons notre budget quand le gouvernement aura validé un PLF et PLFSS et nous effectuerons les mises à jour nécessaires.

Quelles sont les politiques départementales qui vont être impactées par les difficultés financières rencontrées ?

Marc Gaudet : En fonctionnement, nous avons des dépenses incompressibles. Est-ce que l’on peut dire que l’on va arrêter de financer l’aide sociale à l’enfance, baisser les aides aux personnes âgées, handicapées ? C’est impossible. Pour certaines politiques, nous n’avons pas le choix.

Depuis plusieurs années, nous faisons progresser notre masse salariale pour faire face à des politiques qui subissent une croissance exponentielle. Nous avons mis en place des équipes de proximité sur l’ensemble du territoire. Plus de 70 emplois ont ainsi été créés en 2023-2024.

En 2024, le montant du RSA a été augmenté de 2 %, prenant ainsi en compte l’inflation. Cela a représenté plus de 4,8 millions pour le Département du Loiret. Le RSA représente ainsi une masse financière de plus de 100 millions d’euros.

Nous allons rogner sur l’entretien courant des chaussées. C’est une politique qui représente une grosse masse budgétaire, entre 13 et 14 millions d’euros. Nous pouvons passer sous la barre des 10 millions. Nous pouvons le faire deux années de suite mais pas plus : le réseau se dégraderait.

Le Loiret est le seul Département de la région Centre-Val de Loire à avoir une convention avec la Région pour aider les agriculteurs à moderniser leurs exploitations, à innover. Les agriculteurs sont plutôt satisfaits de ce qui se passe dans le Loiret. L’aide que nous apportons à la Chambre d’agriculture va être réduite.

Idem pour la Culture : les moyens déployés seront moindres même si le principe d’En Scène est conservé.

Nous allons freiner les recrutements, les étudier au cas par cas. De la même manière, les aides aux associations se décideront au cas par cas. Nous allons passer au peigne fin toutes nos dépenses attendues pour 2025.

Il ne va s’agir, pour le budget 2025, que de raisonner par priorités et il ne s’agit pas de dire que tout est prioritaire.

Nous allons également vendre un peu de patrimoine afin de ne pas conserver des bâtiments qui ne sont plus occupés et qui représenteraient une charge de gardiennage et chauffage. Je pense par exemple à l’IUFM faubourg Saint-Jean à Orléans, dans un secteur dynamique, avec une belle surface foncière. D’autres viendront. L’heure n’est plus à la valorisation.

Les vents sont contraires. Il faut qu’on rame mais il y aura une éclaircie. On va sortir de cette ornière.

Quand on sème du blé dans la boue, il pousse quand-même et, en juillet, on moissonne.

Président du Département du Loiret

Quels seront, malgré la situation budgétaire préoccupante, les temps forts de 2025 ?

Marc Gaudet : Il y aura l’inauguration de la déviation de Jargeau, l’aboutissement d’un long projet qui représente une charge financière importante. Il s’agit d’un axe structurant nord <> sud important très attendu par les riverains. Elle sera mise en service en mai.

La véloroute le long du canal d’Orléans sera inaugurée en avril. Le dernier tronçon de 34 km sur 78, entre Vitry-aux-Loges et Presnoy, est en cours de finalisation. C’est un projet reconnu, utile, qui comprend une partie urbaine et une plus rurale.

Les travaux de la véloroute Ormes <> Bricy devraient également s’achever en 2025. 

Première étape de la construction de notre schéma des mobilités durables, le pôle multimodal de Châteauneuf-sur-Loire sortira de terre en 2025. Il s’agit d’un des 59 nœuds multimodaux connectés qui, d’ici 15 ans, viendront mailler l’ensemble du territoire. À Châteauneuf-sur-Loire, la capacité de l’aire de covoiturage sera doublée. Des services pour les cyclistes, des bornes de recharge électrique, des arrêts de cars seront ajouté. Le tout occupera une surface d’environ 7 000 m², sept fois plus qu’aujourd’hui ! Entre le centre d’incendie et de secours, lycée et, donc, ce pôle multimodal, c’est tout un secteur qui va se métamorphoser.

Le Département va poursuivre ses investissements dans les collèges et mener la restructuration du collège La Montjoie à Saran.

Nous devons doit garder des actions phares comme le festival de musique de Sully et du Loiret qui est inscrit dans notre ADN et contribue à rendre notre territoire attractif.

Concernant la Solidarité, l’expérimentation menée dans l'agglomération de Montargis auprès des bénéficiaires du RSA sera étendue au Montargois, au Giennois et au Pithiverais. Il y a 2700 allocataires à Montargis. Sur ces 2700, 900 n’étaient pas inscrits à Pôle Emploi. Ils passaient sous les radars, ne pouvaient pas être accompagnés. Nous les avons tous recherchés pour les suivre de manière plus rapprochée. Le portefeuille d’accompagnement de chaque travailleur social a été réduit : aujourd’hui, un agent suit environ 50 BRSA. Nous notons une légère amélioration du retour à l’emploi et, ce qui est extrêmement encourageant, c’est que les nouveaux entrants ne restent pas longtemps dans le dispositif.

Recapiti
melanie.potau