Allocution de M. François-Xavier PRIOLLAUD
Allocution de M. François-Xavier PRIOLLAUD
Maire de Louviers
Vice-Président de la Région Normandie
Seul le prononcé fait foi
Monsieur le sous-préfet,
Monsieur le Maire de Weymouth,
Madame la vice-présidente du Conseil départemental,
Madame la conseillère régionale,
Monsieur le conseiller départemental,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs représentant les Autorités civiles et militaires,
Monsieur le représentant du comité de jumelage avec Holzwickede,
Madame et Messieurs les Présidents d’Associations patriotiques,
Mesdames et Messieurs les Porte-Drapeaux,
Mesdames et Messieurs,
Enfin.
Enfin, ce vendredi 25 août 1944, au petit matin, c’est une patrouille de reconnaissance qui arrive la première. Elle passe par la rue de l’Hôtel de ville et sera suivie par la 4e division blindée canadienne venue de la Haye Malherbe.
Ce peloton restera quelques heures à Louviers avant de poursuivre sa route vers Pont de l’Arche où ont lieu de sanglants combats en bordure de Seine.
Au cours de l’après-midi, d’autres unités de la 30ème Division américaine arrivent par l’avenue du Maréchal Leclerc, à l’époque route du Neubourg. Elles traversent rapidement la ville pour, à leur tour, rejoindre la Seine.
Le lendemain, 26 août, les patrouilles de l’Escadron C du 15ème Régiment Ecossais de reconnaissance appartenant à la 15ème Division d’Infanterie Ecossaise du 12ème Corps Britannique arrivent à Louviers.
Notre ville est alors définitivement libérée et accueillera quelques jours plus tard son ancien Maire, Pierre Mendes France, ainsi que le Général de Gaulle.
Le 26 juin 1949, Louviers se verra décerner la Croix de guerre avec la citation suivante : « Très durement éprouvée par un bombardement meurtrier en 1940, a participé largement à la lutte contre l’occupant et a eu un de ses quartiers incendié par représailles par les Allemands et dix parmi les plus notables de ses habitants ont été déportés pour leur activité résistante et sont morts en déportation ».
Mesdames et Messieurs,
C’était il y a 80 ans. Le jour se levait enfin après quatre années passées dans l’obscurité de la guerre, dans les ténèbres de l’occupation, dans l’angoisse des privations, dans le deuil des déportations, dans la souffrance de l’exode.
Il y a 80 ans, ce vendredi 25 août 1944, restera à gravé à jamais dans la mémoire de celles et ceux qui l’ont vécu. Bernard Louvet est de ceux-là. Il avait 10 ans l’époque. Il a vécu ce jour si particulier avec son regard et son âme d’enfant. Il est parmi nous ce matin. Cher Monsieur, je veux vous remercier de nous transmettre cette mémoire qui nous lie car nous l’avons désormais tous en partage.
Vous vous souvenez certainement des cloches de l’église qui ont sonné, des drapeaux tricolores qui ont flotté à nouveau dans le ciel et des rues qui se sont remplies de joie et de ferveur. Vous avez, comme tous les Lovériens restés dans la Ville, accueilli nos libérateurs avec des rires et des larmes de joie.
Ce vent de la liberté, ce souffle de la délivrance devaient permettre à Louviers de renaître de ses cendres.
Car ce 25 août 1944, ce fut notre année zéro après que les terribles bombardements de juin 1940 ne laissèrent qu’un champ de ruines, une ville dévastée et des vies souvent réduites à la clandestinité.
Ce matin, nous célébrons nos héros. Héros Lovériens comme Pierre Hébert, habitant au Hamelet, qui paya de sa vie son refus d’abandonner sa maison aux Allemands.
René Espinouse, directeur du centre d’hébergement de l’hôtel du Grand cerf qui prit en charge lui-même l’évacuation à pied, de 84 enfants
Odette Kuene, résistante, arrêtée par la Gestapo ce matin du 24 janvier 1944 dans sa maison du 9 rue de la citadelle, puis déportée au camp de Ravensbrück dont elle ne reviendra pas.
Albert Stamm, Procureur de la République, résistant de la première heure, fusillé par les Allemands.
Et bien sûr Auguste Fromentin qui, dans la clandestinité, imprima le « Patriote de l’Eure » et d’innombrables tracts pour les réseaux de la Résistance.
Nos héros lovériens, ce sont aussi les six victimes du dernier bombardement de notre Ville, le soir même de la Libération. Gabrielle Lavolé, Eugène Sriber, Nelly Chambriard, Gabrielle Victor, Désir Fermanel et Félicie Massari ne connaîtront jamais le jour d’après.
Mesdames et Messieurs,
La Normandie vit cette année 2024 au rythme des commémorations du 80e anniversaire du Débarquement allié. Le 6 juin dernier, le monde entier s’était donné rendez-vous à Omaha Beach pour célébrer la liberté autour notamment du Président Joe Biden, du Prince William et du Premier ministre Trudeau. Wolodymyr Zelensky était présent lui aussi. A nos alliés Américains, Anglais et Canadiens, nous sommes à jamais reconnaissants.
Nous avons l’honneur d’accueillir ce week-end à Louviers nos amis de Weymouth, ville jumelée depuis 66 ans, accompagnés de leur maire Jon Orrell que je veux saluer. C’est justement à Weymouth que les soldats américains ont embarqué le 5 juin pour débarquer sur les plages de Normandie. Cher Jon, quel beau symbole que de célébrer ce matin, ensemble, la libération de Louviers, comme ce fut le cas le 5 juin dernier à Weymouth avec la présence de plusieurs jeunes de Louviers. Bien plus qu’un jumelage, c’est notre destin commun que le Débarquement a scellé. Dear Jon, our twinning between Louviers and Weymouth is a testimony to our past and more than ever a promise for a future of peace.
80 ans, c’est le temps d’une vie. C’est à la fois long et en même temps si peu à l’échelle de l’humanité. Le temps qui s’écoule ne doit rien effacer du passé. Mais le temps qui passe est aussi celui de la réconciliation des peuples, et je pense bien sûr à la force de la relation franco-allemande pour construire une paix durable en Europe.
La présence parmi nous ce matin notre Jochen Hake, représentant le comité de jumelage avec Holzwickede est un magnifique symbole. Mais sachons aussi dépasser les symboles pour aller vers l’action.
La libération de la France et de l’Europe occidentale ne doivent rien au hasard. Il faut y voir le résultat d’une volonté, la récompense du courage et la preuve que la résignation n’est jamais un chemin de liberté.
Le monde est à un point de bascule. La liberté a aujourd’hui plus que jamais besoin d’une armée de résistants. Ne dilapidons pas l’héritage de nos libérateurs en demeurant indifférents au monde qui nous entoure. L’Ukraine a besoin de nous comme nous avons eu besoin de nos alliés en 1944. C’est le destin de l’Europe, donc le nôtre, qui se joue actuellement. Et le temps est compté.
Mesdames et Messieurs,
Prenons nos responsabilités. Soyons lucides sur les menaces existentielles qui pèsent sur nos démocraties, sur les valeurs de liberté et de tolérance qui fondent notre société. Ce 80e anniversaire est celui d’un changement d’époque. Soufflons avec bonheur ses bougies mais surtout, n’éteignons jamais la flamme de la Liberté !
Vive la République !
Vive l’Europe !
Vive la France !