APPRENDRE PAR L’EXPÉRIMENTATION – COMPRENDRE PAR LA MESURE – INNOVER PAR L’AUTOÉVALUATION
L’ENSAM souhaite introduire au cœur de sa pédagogie et auprès de ses étudiant(e)s des méthodes d’apprentissage expérientielles, d’auto amélioration permanente, basées sur la valorisation des retours d’expérience et la collaboration plurielle, dans la ligne du Design Thinking (« Conception créative ») élaborée à l’Université de Stanford dans les années 1980.
Cette réflexion fait suite au travail du réseau ENSAECO – réseau pour l’enseignement de la transition écologique dans les écoles d’architecture – et s’inscrit dans la continuité du projet HUT (porté par le laboratoire de recherche de l’école LIFAM), et des expérimentations récentes en matière de bâtiments tels que le projet LOWCAL soutenu par l’ADEME.
Porté par l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Montpellier avec le LIFAM et Christel Corradino, architecte, ingénieure pédagogie et maîtresse de conférences à l’ENSAM, en tant que responsable projet, en association avec l’École des Mines d’Alès, ce projet vient fédérer des acteurs engagés du monde professionnel et associatif, des collectivités territoriales.
Cette réflexion et tous les projets menés sur l’innovation pédagogique, sont soutenus par la Région Occitanie dans le cadre de l’appel à projets « Développer les innovations pédagogiques » dont l’ENSAM est lauréate depuis décembre 2023.
Construction d’un pavillon à échelle 1
Les étudiant(e)s ont pour mission de concevoir et construire un équipement pédagogique représentant un prototype de petit habitat à l’échelle 1. Cet objet qui relève de l’innovation pédagogique est monitoré, et conçu pour que différentes solutions architecturales et techniques y soient testées, sur les plans de la mesure mais surtout des usages.
Il vise à concevoir – construire – instrumenter – vivre un espace de vie auto construit par les étudiant(e)s, sans chauffage et sans climatisation, adapté au climat méditerranéen, reproductible, à coûts très maitrisés, avec le moins de systèmes techniques possible, et conçus à partir des matériaux régionaux seuls, issus de filières régionales. Les étudiant(e)s peuvent expérimenter par eux même le comportement physique et thermique de cet habitat, et sentir comment l’usage (des volets, de la cuisson, des ouvertures etc.) impacte le confort dans toutes ses dimensions. Ce confort est donc « instrumenté », mesuré, et également évalué par des approches plus sensibles sur l’usage qui feront l’objet de travaux de recherche. Cette construction est un véritable objet pédagogique évolutif, qui introduit la notion d’apprentissage expérientiel dans l’enseignement supérieur.
Une méthodologie innovante
Ce projet repose sur 4 axes de développement qui constituent des moteurs d’innovation pédagogique permanente dans un monde en transition qu’il convient d’ancrer comme base méthodologique, au même titre que les savoirs théoriques :
1 – Introduire la pratique de la RECHERCHE APPLIQUÉE dans l’enseignement supérieur, en introduisant la modélisation thermique dynamique comme outil de conception architecturale, la pratique de l’ACV (analyse de cycle de vie des matériaux) ainsi que l’utilisation de la mesure et des enquêtes de terrain.
2 – L’apprentissage par l’expérience située selon 3 axes :
– L’apprentissage par la collaboration, en valorisant la collaboration inter-promotions.
– L’apprentissage par le faire, en venant valider la compréhension de phénomènes physiques par des sensations vécues par le corps.
– L’apprentissage de et par la mesure in situ, qui est un levier extrêmement puissant de compréhension de certains phénomènes physique et de diagnostic.
3 – La CONCEPTION CRÉATIVE (ou Design Thinking) au service de la pédagogie et de la professionnalisation : les étudiant(e)s sont mis(es) en situation de collaboration avec des acteurs engagés à différentes échelles dans la recherche de cet objectif commun : réaliser nos habitats de demain comme des refuges toutes saisons, autonomes et low tech, passifs et vivants, et construits par des ressources locales, en résonance avec le territoire agricole et les filières industrielles.
4 – l’AUTOCONSTRUCTION d’un OBJET PÉDAGOGIQUE vécu par les étudiant(e)s et évolutif, servant de test à court, moyen et long terme.
Un projet en trois temps
La première année est consacrée à la conception et à la pensée du pavillon. Une enquête sur les pratiques à échelle 1 permet d’engager une réflexion collective sur les enjeux de l’apprentissage par la pratique et l’expérimentation, ainsi que leur place au sein de l’école. Des visites de partenaires ( JolieTerre – Eric Defrenne, l’Atelier Ostraka, l’association « Le Village », Environnement Bois), l’analyse des filières locales ainsi que des workshops de construction sont organisés pour les étudiant(e)s.
La deuxième année est consacrée au faire et à l’auto construction de l’objet pédagogique en collaboration avec des artisans spécifiques engagés dans la TE.
La troisième année est dédiée à l’utilisation et à l’évaluation du projet par le développement d’une méthodologie de capitalisation d’un « retour d’expérience », la capitalisation et la gestion des données, l’élaboration de questionnaires et de grilles d’évaluation pédagogiques.
Les actions ci-dessous ont été menées pour nourrir le projet tout au long de sa réalisation.
Des workshops
En mai 2024, un workshop coordonné par Pascale Alazetta, Daniel Bicho, Gilles Cusy, David Hamerman, David Jouquand, Yann Legouis, Pierre Lequer, Olivier Navelet, Jean Planès et Maxime Rouaud.
En groupe de 25, les étudiant(e)s ont éprouvé la réalisation d’un projet en équipe afin d’imaginer une aire de spectacle composée de 4 lieux pour former un système architectural démontable dédié aux arts de la scène et du spectacle vivant en dialogue avec un jardin.
Chaque groupe a pensé un élément constructif d’un espace composant l’aire de spectacle : un espace privatif, un bureau, un espace de restauration… À la manière des cellules des moines du couvent de la Tourette ou du cabanon de Le Corbusier, l’idée n’est pas de concevoir des surfaces, mais des espaces.
En utilisant 4 matériaux (pierre, bois, toile et métal), un soin particulier a été apporté dans la mise en œuvre des détails d’assemblage afin d’étoffer leur culture constructive et de réfléchir à l’intégration du mobilier au sein du dispositif architectural. Ce workshop permet de développer le sens du détail par un travail en profondeur et à grande échelle (1:2), d’un ensemble de détails constructifs.
Une conférence d’Yves Perret
Yves Perret est architecte DPLG conseil et a à cœur de placer l’architecture au centre de la notion de développement durable, d’articuler architecture et développement local, et conçoit l’architecture comme une des expressions publiques poétiques. Il a présenté le 16 octobre 2024 une conférence : C’est où demain ? 40 ans d’un chemin vers la frugalité en architecture. Un demi-siècle de travail pour aller vers une « architecture frugale » présenté et illustré par des projets réalisés durant cette période entre travail d’imagination technique (matériaux et systèmes) et élaboration poétique qui sont souvent deux facettes de l’architecture qui s’ignorent.
« Apprendre à l’échelle 1:1 »
Dans le cadre du domaine d’études Situation-s, sept étudiant(e)s en M2, forment un « groupe pilote » pour élaborer une démarche collective et pédagogique. Ce projet propose une mise en situation professionnelle : concevoir, construire, habiter et évaluer un pavillon à l’échelle 1, confortable en toutes saisons, sans chauffage ni climatisation, adapté au contexte méditerranéen.
Une discussion a été organisée le 17 octobre 2024 afin de partager des expériences sur l’apprentissage à l’échelle 1:1. Faire pour apprendre, élargir la vision de son geste, expérimenter l’erreur, développer l’intelligence collective, sortir de l’utopie, se révéler sur un chantier, autant de questionnements soulevés et compilés sur une carte mentale qui a été élaborée pendant les discussions.
Le 15 novembre 2024, un premier rendu in situ présente l’avancement du projet de Pavillon Test à l’école. Ce rendu a permis de présenter les résultats de la phase initiale de concertation (questionnaires, première rencontre), de détailler le cadre pédagogique dans lequel s’inscrit ce pavillon et de partager les premières esquisses du pavillon.
