Nos experts vous présentent leur analyse complète de toute l’actualité sur les marchés de l’énergie à la date de clôture du 31 janvier 2025.
Marché de l'électricité
Entre tensions et paradoxes énergétiques
En Europe, les marchés électriques font face à des défis sans précédent, exacerbés par une vague de froid imminente et des infrastructures fragilisées. En France, la demande de pointe devrait frôler 76 GW, un record pour la saison, tandis que les températures glaciales accentuent la pression sur un réseau déjà tendu. Cette situation est aggravée par la chute attendue de la production éolienne en Allemagne, traditionnellement un moteur clé du mix énergétique européen.
Les efforts pour équilibrer l’offre et la demande dépendent donc de sources fossiles, amplifiant les tensions sur les marchés du carbone, où les quotas EUA pour décembre 2025 ont atteint 84,50 €/t, un sommet en 15 mois. Ce renchérissement reflète la compétitivité accrue des centrales à gaz par rapport au charbon, mais il alourdit également les coûts énergétiques.
À la une
Norvège : bouclier tarifaire face à la crise énergétique
La Norvège a récemment dévoilé des mesures audacieuses pour atténuer l’impact de la volatilité des prix de l’électricité sur sa population, tout en affirmant sa souveraineté énergétique face aux pressions européennes. Le Premier ministre Jonas Gahr Støre a annoncé que son gouvernement rejettera toute nouvelle interconnexion énergétique avant 2029 et instaurera un tarif fixe de 400 NOK/MWh (34 EUR/MWh) pour les ménages dès octobre. Cette initiative, inédite dans un marché où les contrats indexés dominent, vise à protéger les consommateurs des fluctuations imprévisibles, malgré les prix déjà parmi les plus bas d’Europe.
Cette décision intervient dans un contexte politique tendu, marqué par la rupture de la coalition avec le Parti du centre. En toile de fond, un différend sur les directives énergétiques de l’Union européenne, dont Oslo adoptera certaines mesures dès 2019, tout en suspendant l’intégration de nouveaux règlements jusqu’après 2029. Cette position, justifiée par l’instabilité actuelle des marchés énergétiques européens, reflète une stratégie prudente pour préserver les intérêts norvégiens.
Cependant, l’annonce a fait chuter l’action du fournisseur national Elmera de 15 %, révélant les inquiétudes des investisseurs face à ce tournant réglementaire. La colère populaire, exacerbée par les disparités régionales de prix, notamment entre le nord et le sud du pays, explique en partie ces réformes. En parallèle, une baisse de la TVA sur les redevances de réseau de 25 % à 15 % dès juillet souligne la volonté d’alléger le fardeau des consommateurs. Ce cocktail de pragmatisme politique et de protection sociale illustre l’équilibre délicat que la Norvège cherche à maintenir entre autonomie énergétique et équité.
Les tendances électricité de la semaine par notre expert
Énergie : l’Europe entre tensions et transitions
L’année 2024 aura été marquée par des bouleversements notables sur la scène énergétique européenne, et la Grèce en est un exemple saisissant. Passée d’importatrice nette à exportatrice nette d’électricité, elle a importé près de 1 TWh après avoir exporté 5,5 TWh l’année précédente. Ce revirement s’explique par une combinaison de facteurs : une sécheresse prolongée affectant les capacités hydroélectriques des Balkans, des pannes nucléaires dans les pays voisins, et des flux accrus vers l’Ukraine. Portée par sa capacité renouvelable de 13 GW, la Grèce prévoit de doubler cette capacité d’ici 2030, tout en développant 4,3 GW de stockage par batteries.
Pendant ce temps, la France est confrontée à des défis majeurs avec la corrosion sous contrainte affectant ses réacteurs nucléaires. EDF doit élargir ses inspections, ce qui pourrait alourdir la maintenance et perturber son calendrier. Paradoxalement, le nouveau réacteur Flamanville 3, entré en service après des années de retard, représente un espoir pour relancer la production nucléaire, tombée à son plus bas niveau en 33 ans.
Enfin, sur le marché des quotas carbone, les investisseurs parient sur une hausse des prix, les positions longues atteignant un sommet de 53 millions de tonnes. Le contrat de référence EUA a grimpé à 81,67 €/t, reflétant une dynamique haussière. Entre ambition verte, contraintes techniques et pression financière, l’Europe se trouve à un tournant énergétique crucial.
– Helder FARIA RUBIO,
Responsable Vente Indirecte et Partenariats chez Capitole Energie