Résumé. Exilé à Paris depuis 1919, Aram Ando­nian est le concep­teur et la cheville ouvrière de la Biblio­thèque Nubar, biblio­thèque armé­nienne de Paris. Témoin et rescapé, il a aussi docu­menté les massacres de 1915. Une contri­bu­tion impor­tante à l’histoire des Armé­niens au XXe siècle, croi­sant l’histoire maté­rielle des savoirs, des pratiques patri­mo­niales et celle des génocides.

Durant les années d’entre-deux-guerres et jusqu’à sa mort en 1951, Aram Ando­nian se voue corps et âme à la Biblio­thèque Nubar à Paris. Nommé biblio­thé­caire par l’UGAB (Union géné­rale armé­nienne de bien­fai­sance, orga­ni­sa­tion philan­thro­pique basée au Caire), il en conçoit les plans, l’ameublement et l’organisation, il solli­cite les dons privés d’individus ou d’organisations, venant de Beyrouth, d’Alexandrie ou de Constantinople.

Dans le moment critique de la destruc­tion et de la disper­sion d’un peuple, il archive métho­di­que­ment et sans relâche manus­crits et docu­ments auto­graphes, cata­lo­guant un à un des milliers de volumes, brochures et opus­cules. Îlot de culture armé­nienne en diaspora, en tension avec la créa­tion de l’Arménie sovié­tique, la Biblio­thèque appa­raît comme une réponse à l’anéantissement. En 1941, cette collec­tion remar­quable est la cible du pillage des biblio­thèques par les nazis, et Ando­nian résiste encore, sous­trayant les volumes les plus précieux à la vigi­lance de l’occupant.

Mais Ando­nian est aussi un jour­na­liste, écri­vain et homme de lettres. C’est à ce titre qu’il a été arrêté au cours de la rafle du 24 avril 1915 à Constan­ti­nople. Il publie dès 1920 les fameux Docu­ments offi­ciels concer­nant les massacres armé­niens et son nom est aujourd’hui connu pour les centaines de témoi­gnages recueillis auprès de survi­vants du géno­cide, sur place au moment de sa dépor­ta­tion ou plus tard en exil.

Entre 1945 et 1951, Ando­nian pour­suit son œuvre d’archiviste et d’écrivain : le géno­cide des Juifs d’Europe, le procès de Nurem­berg et l’élaboration de la notion de géno­cide forgée par Lemkin suscitent une lecture nouvelle des crimes de masse subis par les Armé­niens trente ans plus tôt. Dans son corps vieillis­sant et fatigué et dans l’urgence des dernières années de sa vie, Aram Ando­nian continue jusqu’à la fin de se faire l’historien du géno­cide et de se démener pour récu­pérer les livres pillés.

Sous la forme d’un récit éminem­ment incarné et compre­nant un repor­tage dans la Biblio­thèque commandé au photo­graphe Martin Argy­roglo, La Biblio­thèque et le survi­vant se situe à l’intersection du drame, au sens litté­raire et tragique, et de la recherche scien­ti­fique historienne.

Plus d’in­for­ma­tions sur la page des éditions Anamosa.