Nichée au cœur de la Bourgogne, Santenay est une petite commune réputée pour ses vignobles prestigieux et ses paysages enchanteurs. Ses coteaux verdoyants, parsemés de vignes soigneusement entretenues, témoignent d’un savoir-faire viticole ancestral. Les rues du village, bordées de maisons traditionnelles, invitent les visiteurs à une promenade à la fois paisible et pittoresque.
Fleuron de la Côte de Beaune, Santenay fait naturellement partie des fameux « Climats des vignobles de Bourgogne », inscrits depuis 2015 au patrimoine mondial de l’UNESCO : une reconnaissance bien méritée pour le caractère unique de ce terroir, ces petites parcelles de vignes précisément délimitées qui souligne l’articulation harmonieuse entre le patrimoine naturel et bâti, le subtil équilibre entre l’homme et son environnement. Bref, tout ce qui confère une Valeur Universelle Exceptionnelle à ce paysage mondialement reconnu, encadré et naturellement protégé par une Aire de Valorisation du Patrimoine devenue Site Patrimonial Remarquable (SPR).
C’est dans ce cadre idyllique que se situe la parcelle AA70, dans le centre historique du village et à proximité immédiate d’un immeuble remarquable - dont la construction remonte pour partie au XVIe siècle -, et de son parc.
En 2022, l’ensemble formé par les parcelles AA65, AA70 et AA71 sont acquises par un jeune couple. La parcelle AA70, qui s’étend en pente douce jusqu’à la Grande Rue, soit au cœur même du village, est alors agrémentée d’un bassin et plantée en arbres, bosquets et pelouses pour la plus grande joie des promeneurs qui, s’attardant devant la grille, profitent alors de ce paysage bucolique. Son positionnement, dans le prolongement du parc voisin, contribue également au maintien de la biodiversité locale où milans, chouettes, chauves-souris et autres huppes fasciées s’épanouissent en toute liberté.
Naturellement, la parcelle AA70 est intégrée dans le périmètre de la zone SPR (Site Patrimonial Remarquable) et bénéficie donc de sa protection.
Et pourtant….
Ignorant les réglementations applicables et les obligations en découlant, les nouveaux acquéreurs prennent l’initiative de transformer radicalement la parcelle AA70 : arrachage des pelouses et des arbres, suppression de l’allée centrale menant jusqu’au portail de la Grande Rue, apport de terre conséquent, création d’une piscine surélevée... En peu de temps, le vaste jardin harmonieusement dessiné, cet espace de respiration au cœur même du village, prend une tout autre physionomie. Adieu pelouses et art de vivre, bonjour piquets et pieds de vignes. Les arbres à l’arrière de la maison sont, de même et sans autorisation, intégralement abattus afin de laisser place à d’autres ambitions, moins végétales…
Ces interventions ont bien évidemment profondément altéré l’équilibre paysager de la zone considérée, l’articulation pourtant chère aux « Climats de Bourgogne » entre patrimoine naturel et bâti. Mais elles ont également altéré l’équilibre écologique du site. L’élimination de la végétation originelle, au profit de vignes traitées, à proximité immédiate des habitants et visiteurs, n’est pas sans susciter de légitimes inquiétudes. La pulvérisation de produits phytosanitaires en plein cœur du village, présente inévitablement un risque sanitaire tant pour les riverains que pour la faune exposés aux émanations et résidus chimiques. Et l’atteinte à la biodiversité locale liée à la suppression des habitats pour de nombreuses espèces apparait comme une autre conséquence dramatique de cette destruction. Sans oublier les interrogations qui subsistent quant aux conséquences d’un apport massif de terre, afin de permettre la construction en surplomb d’une piscine, sur la structure du sol et l’augmentation des risques de ruissellement.
Consciente de la gravité de la situation, l’Architecte des Bâtiments de France (ABF) a émis, le 3 octobre 2024, un avis rappelant que ces travaux n’étaient pas conformes au règlement du site patrimonial remarquable, qu’ils n’étaient pas régularisables et qu’il convenait donc de restituer le jardin dans son état antérieur (pelouses, plantations, etc…). Le courage et la détermination de l’ABF dans cette affaire méritent d’ailleurs d’être salués.