Chaque année, la Journée mondiale de l’eau nous rappelle combien cette ressource est précieuse sur notre planète. Mais son histoire ne se limite pas à la Terre ! L’eau intrigue aussi les astronomes, qui scrutent l’Univers pour en percer ses secrets. Deux récentes découvertes menées par des chercheurs de l’Observatoire de Paris – PSL bouleversent notre compréhension de son origine : l’une sur l’arrivée de l’eau sur Terre, l’autre sur un océan insoupçonné caché sous la glace de Mimas, une lune de Saturne.
D’où vient l’eau sur Terre ? Une nouvelle théorie fascinante
L’eau est essentielle à la vie, mais comment est-elle arrivée sur notre planète ? Les théories classiques avancent que des comètes ou astéroïdes glacés ont apporté cette précieuse ressource lors d’impacts anciens. Pourtant, une étude menée par Quentin Kral, astronome au LIRA (Observatoire de Paris – PSL), et publiée dans Astronomy & Astrophysics, propose une alternative révolutionnaire.
Selon cette hypothèse, l’eau aurait été libérée par des astéroïdes formés dans un disque primordial froid. En se réchauffant sous l’effet du Soleil, ces corps célestes auraient relâché leur glace sous forme de vapeur d’eau, formant un immense disque de vapeur entourant la ceinture d’astéroïdes. Progressivement, cette vapeur se serait diffusée vers le Système solaire interne, permettant aux jeunes planètes, dont la Terre, de capturer une partie de cette eau pour façonner leurs océans.
Ce modèle, plus robuste et applicable à d’autres systèmes planétaires, pourrait bouleverser notre manière de rechercher des exoplanètes capables d’abriter la vie !
Pour aller plus loin : Une nouvelle théorie pour expliquer l’origine de l’eau sur Terre
Un océan caché sur Mimas : une surprise venue des lunes de Saturne
Si l’eau est abondante sur Terre, elle est aussi présente ailleurs dans le Système solaire… parfois là où on l’attend le moins ! Mimas, petite lune de Saturne au visage criblé de cratères, semblait être un monde sec et gelé. Pourtant, une étude dirigée par Valéry Lainey, astronome au Laboratoire Temps Espace (Observatoire de Paris – PSL) et publiée dans Nature, vient de révéler un incroyable secret : sous son épaisse couche de glace, Mimas abrite un océan global d’eau liquide.
Grâce aux données de la sonde Cassini, les chercheurs ont analysé les oscillations de la lune (appelées librations) et démontré que sous une croûte de glace de 20 à 30 km d’épaisseur, un océan existe bel et bien. Encore plus surprenant : cet océan serait très jeune, âgé d’à peine 5 à 15 millions d’années ! Sa formation récente, provoquée par l’interaction gravitationnelle avec Saturne et ses autres lunes, en fait un laboratoire idéal pour étudier l’émergence des conditions favorables à la vie.
Pour aller plus loin : Présence d’un "jeune" océan sous la couche de glace de Mimas
L’eau, une clé pour comprendre l’Univers
Ces découvertes confirment que l’eau est une ressource universelle, façonnant à la fois l’histoire de la Terre et celle d’autres mondes. De la vapeur d’eau dispersée dans l’espace primitif aux océans cachés sous la glace des lunes de Saturne, l’eau semble omniprésente et pourrait être un élément essentiel pour la recherche de la vie ailleurs.
Les conditions nécessaires pour qu’un monde soit « habitable » et qu’il permette l’émergence de la vie, sur la base de ce que l’on connaît de la vie sur Terre, comprennent la présence d’eau liquide, des éléments essentiels (les fameux CHNOPS) et des sources d’énergie. Ce sont précisément ces conditions que les missions spatiales cherchent à identifier depuis plus de 60 ans à travers l’exploration spatiale. Mars a d’abord été la cible privilégiée, avec plus de 50 vaisseaux envoyés à ce jour. Dans un avenir proche, l’objectif sera de ramener des échantillons, soit depuis la surface de la planète, soit de la surface de son satellite Phobos, via la mission japonaise Martian Moons eXplorer (MMX), à laquelle participent des chercheurs de l’Observatoire. L’idée est d’obtenir des informations sur la présence passée d’eau qui aurait coulé en abondance sur la planète rouge.
Plus loin dans le système solaire, toujours à la recherche d’eau liquide et de possibles habitats au-delà de la « ligne de glace », les missions Juice de l’ESA et Europa Clipper de la NASA, récemment lancées, se concentreront sur l’étude des lunes de Jupiter, notamment Ganymède, Europe et Callisto. Elles auront pour objectif de dévoiler les caractéristiques des océans cachés sous leurs surfaces et d’explorer les autres conditions nécessaires à la vie, telles que les éléments organiques et les sources d’énergie. Il faut noter que les satellites des planètes géantes gazeuses possèdent entre 2 et 10 fois plus d’eau dans leurs océans subsurfaciques que la Terre ! Juice a été une mission marquée par une importante contribution française, avec notamment Athéna Coustenis du LIRA, qui a été co-lead scientifique dès la phase de conception de la mission.
Pour aller plus loin : JUICE : Les contributions de l’Observatoire de Paris - PSL
Plus tard, en 2028, la mission Dragonfly, à laquelle participent également de nombreux chercheurs de l’Observatoire, succédera à la sonde Huygens pour approfondir l’exploration des mystères de Titan, une grande lune du système de Saturne. Titan pourrait dissimuler, à l’instar de Mimas, un océan d’eau liquide sous sa surface, tout en possédant une chimie organique prébiotique et, peut-être, des signes de cryovolcanisme.
Pour aller plus loin : La mission Dragonfly confirmée par la NASA
Avec l’avancée des observations astronomiques et des futures missions spatiales, les chercheurs de l’Observatoire de Paris – PSL continueront de sonder ces mystères pour mieux comprendre l’histoire de l’eau dans l’Univers… et peut-être celle de la vie.