Du 4 avril au 24 août 2025, le MAM de Paris consacre une rétrospective majeure à Gabriele Münter, figure incontournable de l’expressionnisme allemand. Trop souvent éclipsée par son compagnon Vassily Kandinsky, Münter est pourtant une artiste à part entière, audacieuse, indépendante, moderne, dont l’œuvre foisonnante s’étend sur plus de six décennies. L’exposition Peindre sans détours revient sur sa trajectoire singulière, de ses premières photographies aux États-Unis jusqu’à ses toiles aux couleurs vives de Murnau, en passant par ses engagements artistiques au sein du cercle Blaue Reiter (Cavalier Bleue). Riche de 170 œuvres, l’accrochage met en lumière une femme artiste libre, curieuse et profondément attachée aux formes populaires. Exposition Gabriele Münter : une pionnière à redécouvrir au musée d’Art Moderne de Paris !
Une vie d’avant-garde
Dans un monde où la modernité artistique se conjuguait presque exclusivement au masculin, Gabriele Münter (1877-1962) a tracé sa route sans jamais baisser les yeux. Née à Berlin, elle commence par explorer la photographie en Amérique à la fin du XIXe siècle. Avant de se former à Munich dans des écoles ouvertes aux femmes, dont la Phalanx, fondée par Kandinsky. Leur rencontre marquera un tournant. Ainsi, ensemble, ils voyagent, expérimentent et fondent le Blaue Reiter (Cavalier Bleue). L’occasion de bâtir les bases d’un expressionnisme à la fois mystique et viscéral.
Mais Münter n’est pas l’ombre de Kandinsky. Elle est une artiste puissante qui s’approprie la couleur pour traduire des états intérieurs, des élans sincères. Son art, fait de lignes cernées, de perspectives déformées et de couleurs pures, conjugue la liberté du trait enfantin. Sans oublier une conscience aiguë de la composition. Elle s’intéresse autant à l’art populaire bavarois qu’aux avant-gardes parisiennes, dont elle capte la fougue dès 1907. Toute sa vie, elle peindra ce qu’elle voit, ce qu’elle ressent, sans jamais s’enfermer dans un style. Une constante pourtant : l’authenticité. Peindre sans détour, c’était pour elle autant un credo esthétique qu’un acte de résistance intérieure.
Une première rétrospective à la hauteur de l’artiste
Organisée en collaboration avec les institutions allemandes les plus prestigieuses, l’exposition Peindre sans détours est la première grande rétrospective française dédiée à Gabriele Münter. Elle retrace, en six sections chronologiques, les multiples facettes de sa création : peintures, gravures, dessins, photographies, broderies. De ses clichés américains empreints de spontanéité à ses portraits vibrants réalisés à Munich ou Paris. Ainsi, c’est toute une vie de recherche et de liberté que le visiteur traverse.
On y découvre notamment ses gravures parisiennes, marquées par le fauvisme et les paysages lumineux de Murnau. Mais également les portraits intimes de son entourage, ses natures mortes pleines de symbolisme… Sans oublier son intérêt pour les arts populaires et les dessins d’enfants, véritables matrices de sa modernité. Les œuvres sont magnifiquement mises en espace par la scénographe Cécile Degos, qui valorise à la fois l’énergie colorée et la profondeur du trait. Une application gratuite complète la visite, et plusieurs ateliers permettent d’explorer l’œuvre autrement. Rarement une exposition aura si bien rendu compte d’une démarche artistique aussi cohérente et inspirante.
À découvrir en famille
Avec Gabriele Münter. Peindre sans détours, le Musée d’Art Moderne de Paris propose bien plus qu’une rétrospective : une immersion artistique accessible à tous les âges. L’artiste elle-même collectionnait les dessins d’enfants et les considérait comme une source d’inspiration pure. Cette sensibilité se traduit aujourd’hui par un programme pédagogique d’une rare richesse.
Pour les cycles 1 et 2 (maternelle et début primaire)
Pour les tout-petits (1-3 ans), des ateliers sensoriels explorent les couleurs de Münter à travers le toucher et le jeu textile. Les enfants de maternelle découvrent l’usage expressif de la couleur dans l’atelier Dessins d’enfants / tableaux de maîtres, en lien avec l’apprentissage des formes, des couleurs et de la narration visuelle, en parfaite résonance avec les attendus du cycle 1. Les élèves de primaire sont quant à eux invités à transposer des paysages à la manière de l’artiste, en explorant l’abstraction des couleurs (cycle 2 et 3).
Au collège et lycée
Au collège, les visites-atelier autour des portraits permettent de travailler sur l’expression des émotions, le cadrage et les couleurs symboliques – des compétences croisées entre arts plastiques et enseignement moral et civique. Les lycéens explorent le concept de modernité artistique, du regard photographique à la peinture d’après nature, croisant ainsi les objectifs des enseignements de spécialité.
Grâce à cette approche inclusive, l’exposition devient un terrain fertile pour l’imaginaire des plus jeunes et une véritable ressource pédagogique pour les enseignants et familles. Une belle façon de rendre vivante et partagée l’œuvre de cette pionnière libre et lumineuse.
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Hakim Aoudia.
