Symbole d’un quartier en plein essor, l’école Ferdinand Buisson incarne depuis 1932 l’ambition éducative de Montgeron.
Le 12 juillet 1929, dans un contexte de forte croissance urbaine à Montgeron, la municipalité dirigée par le maire André Triou prend une décision structurante pour l’avenir du quartier du Point du Jour : la création d’un groupe scolaire primaire. À cette époque, le quartier se peuple de nombreux couples avec des enfants, souhaitant pour eux une bonne qualité d’enseignement et des exigences nouvelles (sport, activités extrascolaires, souci d’hygiène et de confort). Les enseignants militent pour que les enfants qui le souhaitent puissent prolonger leurs études au-delà de l’école élémentaire. Les écoles du centre-ville sont saturées, et les besoins en infrastructures scolaires se font pressants.
Le site choisi est situé sur les terres agricoles de l’ancienne ferme Dumay Delille. Le projet prévoit la construction de six classes (deux pour les garçons, trois pour les filles, ainsi qu’une section enfantine) capables d’accueillir jusqu’à 300 élèves. L’objectif est double : offrir un enseignement de proximité à une population en expansion et soulager les établissements du cœur de ville.
Un projet freiné par la crise et la seconde Guerre Mondiale
Sous la direction de l’architecte local Rieger, les travaux de l’école du Haut de Montgeron, dite aussi école Dumay, puis du Point du Jour, s’achèvent en un temps record. Le groupe scolaire est inauguré le 23 septembre 1932 et ouvre le 3 octobre 1932. Mais à peine ouvert, l’établissement se révèle déjà trop petit pour faire face à la forte demande. L’agrandissement envisagé n’étant pas accordé, des bâtiments provisoires sont ajoutés dès 1933 pour pallier le manque de place. Les classes sont surchargées. Les préaux abritent une troisième classe de garçons et une deuxième section enfantine. Les ambitions d’extension sont durablement freinées par la crise économique de 1936 et, peu après, par le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale. En 1937, à l’occasion d’une fête scolaire, et sur décision du conseil municipal du 7 mai, l’école prend le nom de Ferdinand Buisson, figure majeure de l’école républicaine, compagnon de route de Jules Ferry et promoteur de l’instruction laïque et gratuite.
Une école en mutation permanente
Après-guerre, les besoins éducatifs explosent. En 1946, le maire Josèphe Jacquiot, accompagnée de son conseiller Raymond Paumier, met en place dans l’école un restaurant scolaire : La Bécquée, destiné à garantir aux enfants un repas quotidien équilibré, dans un contexte de rationnement encore très présent.
En 1953, l’école accueille 465 élèves, répartis en cinq classes de garçons, quatre de filles et deux sections enfantines. Faute de locaux suffisants, certains enseignants assurent leurs cours dans des baraquements installés en urgence. Face à cette situation, la municipalité dirigée par Armand Cachat décide en 1955 d’un vaste projet d’agrandissement : doublement des constructions existantes, déménagement du restaurant scolaire, et construction d’une école maternelle sur le lotissement du parc de Chalandray, à l’angle des rues de Brunoy et de Corot.
Ces évolutions marquent une étape importante dans l’histoire scolaire de Montgeron, révélant la volonté constante d’adapter l’offre éducative aux réalités démographiques et sociales de la commune.
Ferdinand Buisson, un nom porteur d’engagements
L’école porte aujourd’hui le nom de Ferdinand Buisson en hommage à un homme dont le parcours intellectuel et politique a profondément marqué la République. Né en 1841 à Paris dans une famille protestante, Ferdinand Buisson est d’abord philosophe et pédagogue. Son refus de prêter serment à l’Empire le pousse à s’exiler en Suisse, où il rencontre d’autres intellectuels républicains. Il participe très tôt aux mouvements pour la paix et la liberté, avant de revenir en France en 1870, à la chute du Second Empire. Inspecteur général, puis directeur de l’enseignement primaire, Ferdinand Buisson travaille étroitement avec Jules Ferry pour instaurer l’école gratuite, laïque et obligatoire. Il s’emploie à réformer l’enseignement, à en renforcer les fondements républicains et à le rendre accessible à tous les enfants, quel que soit leur milieu d’origine. Il rédige également le monumental Dictionnaire de pédagogie et d’instruction primaire, toujours reconnu comme une référence dans le domaine de l’éducation. Élu député radical-socialiste au début du XXe siècle, Ferdinand Buisson milite également pour le droit de vote des femmes et pour l’enseignement professionnel obligatoire. En 1927, il est couronné du prix Nobel de la paix, aux côtés de l’Allemand Ludwig Quidde, pour son action en faveur de la réconciliation entre les peuples. Il s’éteint en 1932, la même année que l’ouverture du groupe scolaire qui porte son nom à Montgeron. Ce lien symbolique entre un homme de paix et un lieu d’apprentissage illustre parfaitement les valeurs de l’école publique : la transmission, le savoir et l’émancipation. Ce lien symbolique entre un homme de paix et un lieu d’apprentissage illustre parfaitement les valeurs de l’école publique : la transmission, le savoir et l’émancipation.
Maurice Boitel, céramiste français de renommée mondiale, né en 1919, a réalisé les décorations des groupes scolaires Jean-Charles Gatinot et Ferdinand Buisson. Il a fabriqué et cuit lui-même les carreaux de céramique dans un four qu’il a fait construire à cet effet dans son atelier.
Article rédigé en collaboration avec la Société d’Histoire Locale de Montgeron