France : une décision historique de la Cour de cassation rejette l’application de l’immunité fonctionnelle en cas de crimes internationaux

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Paris, 25 juillet 2025. Dans une décision historique rendue aujourd’hui, la Cour de cassation a refusé d’accorder le bénéfique de l’immunité invoqué par Adib Mayaleh, ancien gouverneur de la Banque centrale syrienne, initialement mis en examen pour complicité de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre. La plus haute juridiction française confirme ainsi l’inapplicabilité des immunités fonctionnelles en matière de crimes internationaux.

« Cette décision est une grande victoire pour la poursuite des crimes internationaux, puisqu’elle consacre le fait qu’aucun·e agent·e d’un État étranger, quelle que soit la fonction qu’il·elle occupe, puisse faire valoir son immunité lorsque des crimes internationaux sont en jeu », déclare Mazen Darwish, avocat et directeur général de SCM. « Consacrer une immunité fonctionnelle à ces agent·es reviendrait à garantir l’impunité de ces crimes. »

Reprenant les arguments avancés par la FIDH et SCM en tant que parties civiles, la Cour a notamment estimé que la coutume internationale avait évolué s’agissant des immunités fonctionnelles en faveur d’une exception pour les crimes internationaux. La Cour a ainsi reconnu une exception générale au principe d’immunité fonctionnelle des agent·es d’un État étranger en cas de crimes internationaux. La Cour a énoncé dans son arrêt que « cette évolution de la coutume internationale, à laquelle la Cour de cassation entend contribuer, définit un nouvel équilibre entre les immunités et la lutte contre l’impunité ».

La Cour s’inscrit ainsi dans la lignée du pôle Crimes contre l’humanité du Tribunal judiciaire de Paris, de la Chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris, de la Cour d’assises de Paris et de plusieurs juridictions nationales étrangères qui avaient déjà reconnu que les immunités fonctionnelles n’étaient pas applicables en matière de crimes internationaux.

« La décision de la Cour de cassation sur les immunités fonctionnelles est le fruit d’un long combat judiciaire mené par nos organisations pour que les présumé·es responsables de crimes internationaux ne puissent plus se réfugier derrière leur statut d’agent·e de l’État pour échapper à des poursuites », déclare Clémence Bectarte, avocate et coordinatrice du Groupe d’action judiciaire de la FIDH. « Cette décision aura des répercussions positives sur de nombreuses affaires en France mais également dans le monde, puisqu’elle participe à l’évolution de la coutume internationale en matière d’immunités et de lutte contre l’impunité. »

Adib Mayaleh, franco-syrien et ancien gouverneur de la Banque centrale syrienne, avait été mis en examen le 20 décembre 2022 pour complicité de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, blanchiment du produit des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre et participation à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation de crimes contre l’humanité. Il avait soulevé la nullité de sa mise en examen au motif de l’immunité fonctionnelle dont il estimait devoir bénéficier. Il a été placé sous le statut de témoin assisté en mai 2024.

Une seconde décision décevante concernant l’immunité personnelle de Bachar al-Assad

Dans une autre décision décevante rendue le même jour concernant l’immunité personnelle de Bachar al-Assad, visé par un mandat d’arrêt délivré par les juges d’instruction du Pôle crimes contre l’humanité du Tribunal judiciaire de Paris alors que celui-ci était encore en exercice, la Cour de cassation a refusé d’écarter son immunité personnelle.

Dans cette affaire, la Cour a annulé le mandat d’arrêt émis à l’encontre de Bachar al-Assad. La Cour a refusé l’argumentaire relatif à la déreconnaissance de Bachar al-Assad en tant que chef d’Etat légitime par le gouvernement français, considérant que la reconnaissance était un « acte unilatéral et politique » qui ne pouvait emporter de conséquences juridiques s’agissant de son immunité personnelle. La Cour a en outre considéré qu’il n’y avait pas d’évolution de la coutume internationale en faveur d’exceptions au principe d’immunité personnelle du chef d’Etat en exercice en matière de crimes internationaux.

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Maxime Duriez