À l’occasion du centenaire de la naissance de Philippe Jaccottet (1925-2021), il est plus que jamais essentiel de redécouvrir ses livres les plus marquants. Poète de la lumière et de la discrétion, Jaccottet bâtit une œuvre où la simplicité du paysage se mêle aux tourments intérieurs, entre beauté naturelle, amitié, amour, souffrance et mort — un combat inégal, mais constamment émouvant. Ainsi, chaque ouvrage témoigne d’une méditation profonde sur ce qui reste : les choses simples — arbres, lumière, bruits — et cette « clairière » éthique où l’écriture résiste au tumulte du monde. Voici donc notre sélection, certes subjective et non exhaustive, des meilleurs livres de Philippe Jaccottet à lire absolument !
Cahier de verdure
Dans Cahier de verdure, Philippe Jaccottet, poète de la lumière effacée et de l’ombre habitée, explore un territoire intime où la nature tient lieu plus que de décor : elle se fait interlocutrice, confession, et apaisement. Publié chez Gallimard en 1990, cet ouvrage déroule une écriture mesurée, une voix qui s’efface pour mieux laisser parler l’arbre, le ciel, la fleur, la poussière.
Jaccottet ici rassemble des fragments de mémoire — paysages, saisons, gestes simples — qui deviennent autant de repères sensibles face à la finitude humaine. Le poète ne promet ni miracle ni refuge, mais invite le lecteur à une attention suspendue : recueillir les éclats de beauté fugace, les confidences d’un souffle d’air, les murmures de la végétation.
Cahier de verdure est une méditation douce, un livre à écouter comme on écoute le vent traverser les feuilles.
Poésie (1946-1967)
Poésie (1946-1967) rassemble, en un volume de la collection Poésie/Gallimard, l’essentiel des poèmes de jeunesse de Philippe Jaccottet, couvrant ses débuts à l’ombre de la guerre jusqu’à la maturité émergente des années soixante. Préfacé par Jean Starobinski, cet ouvrage offre une traversée de plusieurs recueils structurants : L’Effraie, L’Ignorant, Airs, Leçons… textes où déjà se dessinent les grandes obsessions jaccottétiennes — la fragilité de l’être face au temps, le décentrement du sujet, le lien inextricable entre paysage et silence.
Ce qui frappe dans ces poèmes-premiers, c’est la justesse du ton : une « parole loyale, qui habite le sens », selon Starobinski, débarrassée de tout artifice rhétorique, mais profondément habitée par l’interrogation et la gratitude. On y ressent l’effroi de la mort, l’éveil à la beauté, la tension entre ce que l’on voit et ce que l’on pourrait dire.
À la lumière d’hiver
Dans À la lumière d’hiver, Philippe Jaccottet livre une poésie de l’âge mûr, un chant aux silences, aux deuils retenus, à ce moment où toute lumière semble vaciller, mais se révèle dans sa vérité nue. Recueil publié chez Gallimard, il regroupe trois parties — Leçons, Chants d’en bas, puis À la lumière d’hiver — complétées parfois de Pensées sous les nuages.
L’écriture de Jaccottet, ici, est une lente ascèse : il écarte l’artifice, soigne le vers libre, joue de l’épure, pour mieux épouser le souffle, le paysage, et la finitude. Les poèmes deviennent des fenêtres de doute et d’émerveillement, dans lesquelles l’ombre, le froid, le souvenir s’éclairent d’une lueur restée vraie.
Ce livre n’est pas un simple recueil : c’est une méditation, une manière d’affronter le temps qui s’effrite, sans se laisser gagner par le pathos.
La Clarté Notre-Dame
Dans La Clarté Notre-Dame, Philippe Jaccottet offre un carnet posthume d’une inépuisable délicatesse, rassemblant ses notes écrites entre 2012 et 2020. Le livre, dense en silence, s’ouvre sur des paysages vaudois et la lumière tamisée filtrée par l’ombre, mais aussi par le souvenir : un tintement de cloche, une clarté douce autour du monastère des Sœurs dominicaines de Salernes, autant d’instants suspendus.
La Clarté Notre-Dame est précédé de Le Dernier Livre de Madrigaux, recueil bref mais puissant, en vers libres, qui dialogue avec l’ensemble comme une ultime révérence à la poésie, à ses compagnons littéraires, à ses lectures. À mesure que s’avance la lecture, se dessinent les thèmes récurrents de l’œuvre de Jaccottet : la fugacité de la vie, la finitude, mais aussi la présence obstinée d’une lumière résiduelle, consolation et vigilance.
Œuvre de maturité, La Clarté Notre-Dame ne cherche pas à impressionner mais à émouvoir, à faire entendre ce qui reste lorsque tout semble s’éteindre.
Œuvres
Œuvres de Philippe Jaccottet (Pléiade, 2014) est la mise en lumière d’un poète dont la quête aura traversé soixante-ans d’écriture, de nuances, de fulgurances discrètes. Rassemblant les « œuvres de création » sélectionnées par lui-même — poèmes, proses, carnets — ce volume de 1728 pages restitue la chronologie première de ses livres, sans les remaniements éditoriaux postérieurs.
On y suit les pas d’un Jaccottet dès L’Effraie jusqu’à Couleur de terre, en passant par ses semailles de carnets La Semaison, ses poèmes d’hiver, ses proses poétiques. Prose et vers alternent, dialoguent, se répondent dans une écriture qui ne cède jamais à l’ostentation.
Ce qui frappe ici, c’est la constance d’une poétique fondée sur l’attention — aux paysages, aux visages, aux objets — et le refus d’une poésie spectaculaire. Jaccottet ne cherche pas le pathos, mais une justesse — dans le mot comme dans le silence — qui creuse le vide plus qu’elle ne le comble.
Soutenez-nous
Nous vous encourageons à utiliser les liens d’affiliation présents dans cette publication. Ces liens vers les produits que nous conseillons, nous permettent de nous rémunérer, moyennant une petite commission, sur les produits achetés : livres, vinyles, CD, DVD, billetterie, etc. Cela constitue la principale source de rémunération de CulturAdvisor et nous permet de continuer à vous informer sur des événements culturels passionnants et de contribuer à la mise en valeur de notre culture commune.
Hakim Aoudia.
