La Tête Haute est, curieusement, un peu aux antipodes de ma précédente critique du film Les Jardins du Roi. Car, non seulement la critique unanime a salué ce film qui a, de plus, reçu une standing ovation à l’ouverture du Festival de Cannes, mais encore tout est vrai dans cette mise en scène portée par des acteurs qui brûlent de vérité. La Tête Haute d’Emmanuelle Bercot, avec Catherine Deneuve, Rod Paradot, Benoît Magimel et Sara Forestier, ou le film d’une vérité si bien restituée !
L’itinéraire d’un jeune en rupture sociale et psychologique
Catherine Deneuve trouve là un rôle à sa mesure ; de juge à l’humanité désabusée par une carrière qui prend fin. La mère immature (Sarah Forestier) est plus vraie que nature. Tandis que l’éducateur (Benoit Magimel), désemparé dans sa fragilité personnelle nous émeut. Et et bien sûr, le survolté Rod Paradot nous subjugue par son rôle d’ado imprévisible dans ses explosions de violence caractérielle.
Pourtant, cette vérité si bien restituée par Emmanuelle Bercot, de l’itinéraire quelque peu répétitif d’un jeune en rupture sociale et psychologique, reste finalement en deçà de la fiction. Ainsi, à force de respecter le réel, le film s’enferme dans un descriptif fataliste. Avec du corps, mais sans âme, sans point de vue sur le réel ici raconté. On a presque l’impression de suivre une monographie de formation pour éducateur…
Le réel n’a pas de sens…
Et cette recherche de la vérité me rappelle une anecdote à propos du célébrissime Cuirassé Potemkine. À la fin du film, au moment de fusiller les mutins sur le pont du cuirassé, le commandant fait jeter une bâche sur le groupe de matelots. Ce qui en fait une sorte d’être collectif symbolisant le peuple uni. Un témoin fit alors remarquer à Eisenstein que la bâche était mise, en réalité, sous les pieds des matelots pour éviter de tacher le pont du bateau, le réalisateur (celui qui fabrique le réel) soviétique répondit que l’émotion ressentie par le spectateur lui importait plus que le détail de la vérité historique…
Un beau mensonge est parfois plus fort que la vérité…
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Par Gérard Poitou. MagCentre.
