Pour cela, l’équipe réunit cinq partenaires : Inria, le CNRS, l’université de Bordeaux, l’Institut National Polytechnique de Bordeaux et l’ONERA (Office national d'études et de recherches aérospatiales). Elle est composée de neuf chercheurs permanents, dont cinq de l’ONERA, et d’une quinzaine de doctorants et postdoctorants.
Trois axes de recherche complémentaires
Premier axe de recherche de Monhade : une démarche de réduction des modèles. Plutôt que repartir de zéro pour chaque nouvelle simulation, par exemple lors d’une modification sur une aile d’avion, l’idée est d’exploiter les simulations précédentes, réunies dans une base de données, pour trouver des solutions proches à coût de calcul réduit. Michel Bergmann, directeur de recherche au sein de Monhade et délégué scientifique adjoint du centre Inria de l’université de Bordeaux, précise : « Pour mesurer tout l’intérêt de cette démarche, nous passons de "modèles numériques haute-fidélité" comptant des centaines de millions d’inconnues à des "modèles numériques réduits" comportant quelques dizaines d’inconnues seulement. »
Deuxième axe de recherche de l’équipe : une méthodologie d’assimilation et de correction des données, explorée sous la responsabilité de Michel Bergmann. L’idée est de recalibrer les modèles à partir de mesures expérimentales. L’innovation consiste à compléter les données manquantes en utilisant les modèles et, inversement, à obtenir en temps réel des prédictions fiables, en corrigeant les modèles grâce aux données.
Enfin, l’équipe développe un troisième axe de recherche qui vise à repenser la conception des modèles haute-fidélité. La finalité ? Optimiser ces modèles pour qu’ils puissent être systématiquement simplifiés, sans perdre en fiabilité et en précision. « L’originalité ici : créer des schémas numériques qui intègrent dès le départ la possibilité d’être réduits, grâce aux travaux réalisées dans le cadre des deux premiers axes, » souligne Angelo Iollo.
Des applications concrètes pour l’industrie
Les méthodes mises au point par l’équipe Monhade pourront être utilisées dans de nombreux domaines clés, comme l’aéronautique, la défense, l’énergie, le spatial, la transition écologique… « Nos recherches ne vont pas jusqu’à la solution de problèmes spécifiques, précise Michel Bergmann. Nous sommes en amont, mais la perspective de ces applications concrètes nous sert à nous poser les bonnes questions, à soulever les vrais problèmes et à donner la possibilité de passer à l’échelle. »
En clair, l’équipe-projet Monhade ne cherche pas à produire des logiciels destinés à une exploitation industrielle. « Le logiciel, c’est un outil qui nous permet de mettre en œuvre nos méthodologies, insiste Angelo Iollo. En revanche, les ingénieurs de l’ONERA peuvent les implanter dans des codes industriels pour les appliquer dans des configurations réalistes. »
Des partenariats dans de nombreux secteurs
Les recherches de Monhade se font dans le cadre de collaborations, par exemple avec Safran pour simuler les phénomènes de pompage des compresseurs de moteurs d’avion. Dans la défense et le spatial, un partenariat avec le CEA porte sur les "corps de rentrée", afin d’explorer diverses configurations en vue d’améliorer leur conception à des coûts de calcul abordables. Dans le secteur de l’énergie, en collaboration avec EDF et l’IFPEN (IFP Énergies nouvelles), les méthodes de l’équipe Monhade servent à évaluer d’éventuelles fuites radioactives à travers les enceintes protectrices de centrales nucléaires sur une durée de 100 ans ou à prévoir la production d’énérgie électrique en fonction du vent.
Aujourd’hui, face au développement de l’intelligence artificielle, l’équipe ne compte pas en rester là : "En travaillant sur la convergence entre les modèles numériques et les données, nous visons un enjeu plus large, soulignent les chercheurs. Nous souhaitons exploiter les données, utiliser le machine learning, le deep learning et les autres solutions d’intelligence artificielle, mais avec les contraintes de rigueur basées sur les acquis des 40 à 50 dernières années d’analyses numériques. C’est notre message clé !". Des perspectives prometteuses.