Dans un Japon que l’on croirait profondément matérialiste, obsédé par la réussite industrielle, ce film ne peut que nous surprendre et déranger notre vision du monde par trop cartésienne. Kiyoshi Kurosawa (sans parenté avec l’illustre Akira), l’auteur de ce déjà étonnant diptyque “Shokuzaï” (2013) sur le souvenir et la vengeance, nous livre dans ce film une réflexion sur le deuil et la mort dans un univers narratif qui n’est pas sans rappeler celui de l’écrivain Haruki Murakami. Vers l’autre rive de Kiyoshi Kurosawa, avec Tadanobu Asano, Yū Aoi et Akira Emoto, ou le film du fantôme du Japon !
Un film fantastique ?
Le film est souvent catalogué comme fantastique, mais comme chez Murakami, c’est un petit décalage avec la réalité qui va permettre à la narration de se développer et atteindre un degré d’émotion où le réel n’est plus l’essentiel. Alors bien sûr, quand Mizuki, professeure de piano fatiguée par des élèves aux parents prétentieux, retrouve son mari Yuzuke, dentiste de son état, mort mystérieusement noyé trois ans auparavant, debout dans un coin de son appartement, c’est un peu déconcertant pour elle, comme pour le spectateur, surtout quand le mari se délecte, comme tous mortels, des pâtisseries que préparait son épouse…
Un voyage originel
Mais très vite, le film nous embarque pour un voyage originel, dans un Japon provincial et rural propice à un retour sur le passé, à une seconde chance de se retrouver pour ce couple séparé par la mort. Une balade poétique et bucolique, hors du temps, dans laquelle le deuil et l’absence se transforment en révélation réciproque des fondamentaux de la vie.
Et après tout, cette histoire n’est pas plus extravagante que ces photons, constitutifs de la lumière dont le docte mari explique à des paysans attentifs, que la physique contemporaine nous dit que leur masse est égale à zéro… Et si les corps, objets du désir, sont bien, en définitive, la garantie de la réalité, le deuil nous apprend, comme Hugo avec Léopoldine, la puissance évocatrice des sentiments, de l’amour, de la jalousie parfois, dans l’intemporalité de chacun.
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Par Gérard Poitou. MagCentre.