Prix « Allées d’arbres » 2024

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La remise des prix du concours "Allées d’arbres" de Sites & Monumentsa eu lieu le samedi 26 octobre 2024 lors du Salon du patrimoine culturelau Carrousel du Louvre à Paris.
Jury de l’édition 2024 : Chantal Pradines, expert indépendante — Rapporteur du juryChristophe Bouget, docteur en écologie, InraeJérôme Ferchaud, Sites & MonumentsJean-Michel Gelly, Maisons paysannes de FranceYaël Haddad, journaliste de la presse professionnelle du paysage Christophe Père, association des paysagistes-conseils de l’État Odile Schwerer, Conseil général de l’environnement et du développement durableMichel Widehem, Groupement des experts-conseils en arboriculture ornementale Chantal Pradines Cabinet All(i)ée

Déléguée générale de l’association « Allées-Avenue » / allées d’avenir Rapporteur du jury

 
Neuf éditions déjà pour le prix « Allées d’arbres » ! Avec trois lauréats retenus par le jury cette année (sur seize dossiers présentés), ce sont trente-neuf lauréats dans presque autant de départements qui auront déjà été mis à l’honneur pour leurs actions en faveur des allées. Mais, que les dossiers soient lauréats ou non, le jury n’est jamais avare de conseils et de recommandations lorsque cela lui paraît utile, de sorte que ce sont près de cent cinquante actions qui ont déjà reçu un coup de pouce depuis la création du prix en 2016.
 

La Bastide du Plan (Vaucluse) :un éventail d’actions vertueuses pour les allées Chemins privés — 450 m, 111 platanes

Le domaine du Plan d’Apt, à un jet de pierre au nord de la ville d’Apt, dans le Vaucluse, est attesté depuis le XVe siècle. Site dont la vocation était à l’origine agricole, il connaît au XVIe siècle une période de prospérité qui suscita des jalousies et se conclut tragiquement. Les propriétaires avaient fait venir du Piémont des Vaudois, disciples du Lyonnais Pierre Valdo, réputés pour leurs qualités de travailleurs agricoles. On prit prétexte de reprocher à ces travailleurs de lire la Bible en français et à la maison — depuis le Concile de Chanforan en 1532, les Vaudois s’étaient ralliés à la Réforme — et l’exploitant du domaine fut jugé et brûlé sur la place publique en 1540. Cela marqua le début des violences qui culminèrent avec un massacre généralisé des Vaudois du Lubéron en 1545.

La Bastide du Plan. On devine le départ de la deuxième branche du V, à gauche © La Bastide du Plan d’Apt/Agnès Vidal

Au XVIIIe siècle, les propriétaires d’alors, officiers supérieurs de l’armée, entreprennent une rénovation des constructions et des abords. Un plan de jardin à la française est établi, mais ne sera pas réalisé. L’une des deux allées de platanes qui ornent aujourd’hui le domaine suit cependant le tracé de ce plan. Elle est complétée d’une deuxième allée qui la rejoint au-devant de la bastide, dans une configuration en V inhabituelle. Cette deuxième allée mène à un bassin autour duquel s’enroule, en un cercle parfait, un autre alignement de platanes.
Deux allées totalisant 96 platanes — auxquels s’ajoutent les 15 arbres plantés autour du bassin — cela ne pèse-t-il pas bien peu dans le paysage ? Pourtant, impossible de ne pas les remarquer ! C’est que, de toutes les formes, la ligne droite est la structure que l’œil perçoit avec la plus grande acuité. Or, avec leurs deux bons siècles et leurs 30 mètres de hauteur, ce sont des géants qui composent ces droits corridors ! Justement parce qu’il s’agit de corridors et parce que les arbres se sont maintenus sur un temps très long, ces allées, en lien avec leur environnement, jouent également un rôle important pour la biodiversité. Les inventaires réalisés par la Ligue pour la protection des oiseaux et le Groupe Chiroptères de Provence — on pense aussitôt au rôle des structures linéaires qui servent aux chauves-souris à se repérer — en attestent.

La Bastide du Plan, une structure imposante dans le paysage © La Bastide du Plan d’Apt/Agnès Vidal

Chose plutôt inhabituelle, la préservation du patrimoine de la Bastide du Plan était inscrite dans l’acte de vente de 1997. Une disposition que ne renierait pas certain notaire de l’est de la France, fervent défenseur des arbres, qui invite justement à inclure une clause d’engagement de conservation des arbres dans les actes de vente en stipulant en outre une pénalité dans le cas où leur élagage serait effectué dans des termes non prévus à l’acte. En l’occurrence, les propriétaires de la Bastide du Plan ne risqueraient guère de pénalité : depuis plus d’un siècle, les arbres sont laissés en port libre et l’intervention des élèves-arboristes du Centre forestier de la Bastide des Jourdans est limitée à l’enlèvement du bois mort. La majesté des arbres ainsi traités contraste avec le spectacle de tant d’autres arbres que l’on voit encore élagués pour rien dans nos villes et nos campagnes — pour rien si ce n’est, au final, pour les faire mourir à petit feu.
Entretenir avec respect l’existant est la base de la préservation des allées. À cela doit s’ajouter, selon les nécessités, la replantation, faute de quoi la structure même de l’allée disparaît elle aussi à petit feu. À la Bastide du Plan, ce seront donc cinq platanes qui viendront combler des manques dès cet automne. Il sera sage, comme le jury le recommande toujours, de planter des arbres de petit calibre, moins coûteux, moins gourmands en eau au cours des années cruciales de leur établissement, plus résilients dans cette première phase délicate, et qui rattrapent vite des arbres de calibre 20/25 ou plus. Entretenir avec respect. Replanter. Mais aussi sans cesse mettre les allées en valeur et faire reconnaître leurs qualités : c’est une nécessité pointée par le livre blanc sur les allées d’arbres qu’avait publié le Conseil de l’Europe. Et sur ce point également, les propriétaires ne sont pas en reste, avec leur participation au concours, mais aussi le label « Ensemble arboré remarquable » de l’association A.R.B.R.E.S, c’est l’acronyme de (Arbres Remarquables : Bilan, Recherche, Études et Sauvegarde) et celui de « Refuge LPO ».
Tout cela ne devrait-il pas amplement suffire ? Sans doute. Mais quel sens cela aurait-il de bien traiter le patrimoine de la Bastide du Plan si tout autour la pression foncière et les mauvaises pratiques dégradent ou font disparaître les allées ? C’est ainsi que les propriétaires de la Bastide du Plan souhaitent aller encore plus loin et demander la protection de leurs allées dans le plan local d’urbanisme avec l’espoir, bien sûr, que cette protection soit étendue à terme aux autres allées du secteur, en particulier la route départementale. Histoire à suivre, donc !

Château de la Houssoye (Oise) :comment protéger une allée publique, pourtant indissociable de son château ? Chemin public — 390 m, 127 tilleuls

Le château de La Houssoye, tel que nous le connaissons aujourd’hui, au sud de Beauvais, remplace dans les années 1775 à 1780 un ancien château, probablement médiéval. À l’occasion de la construction des nouveaux bâtiments — le château se voit également doté d’une ferme —, les abords sont réaménagés : une partie du parc boisé est transformée en jardin de structure classique, avec un axe central cadré par la végétation et situé dans l’axe du bâtiment ; une autre partie est transformée en terres de labour ; à l’avant, l’allée simple qui figurait avec la mention « avenue » sur un plan antérieur, désignant ainsi l’allée d’accès au château, est complétée par une troisième rangée d’arbres qui permet de recentrer cette « avenue » sur le bâtiment et d’en respecter l’axialité.
Aujourd’hui, le château est coupé de son ancienne « avenue » par la route dépar- tementale, l’allée a perdu un rang et elle est devenue communale. Comment, dans ces conditions, s’assurer que le caractère indissociable du bâti et de ses abords ne soient pas altérés ? Si cette allée venait à être détruite, en totalité ou partiellement, on effa- cerait un élément majeur pour comprendre la relation du château à son environnement. Mais la commune et ses habi- tants se verraient également privés d’un élément paysager de grand intérêt, qui forme un écrin et un écran aux constructions, un élément qui signe l’entrée de la commune depuis la route départementale, et qui, côté village, le
« contient » et empêche l’urbanisme d’empiéter sur les terres agricoles. En outre, on perdrait également un maillon de la trame verte et bleue entre deux zones Natura 2000.

L’allée des tilleuls devant le château de la Houssoye © château de La Houssoye

C’est ce qui a motivé les propriétaires du château de La Houssoye à faire évaluer l’intérêt patrimonial du château et de ses abords et le rôle environnemental des éléments végé- taux du site. En effet, il leur a semblé que seul un classement du château et de ses abords permettrait de protéger l’ancienne « avenue » devenue publique et d’éviter qu’elle ne soit définie comme « zone constructible » dans le plan local d’urbanisme en cours d’élaboration ou ne soit amputée par divers aménagements. En effet, ils ont relevé que le schéma de cohérence territoriale du Pays de Thelle ne fait aucune référence au patrimoine des parcs et jardins mais que, au moins, l’atlas des paysages de l’Oise s’intéresse aux éléments protégés au titre des monuments historiques ou des sites. Une première étape est franchie. Nous espérons que l’issue sera favorable.
 

Commune de Choisel (Yvelines) :assurer l’avenir d’une allée de vénérables poiriers Voie communale — 500 m, 38 poiriers
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Nicole HUET