Miséricorde

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miséricorde, n. f. du latin misericordia, de misericors « qui a le cœur (cor) sensible au malheur (miseria) ». 1. Sensibilité à la misère, au malheur d’autrui. 2. Pitié par laquelle on pardonne au coupable. Relig. La miséricorde divine.

Lorsque je travaillais comme médecin hospitalier, dans un service de personnes avec une lésion cérébrale, j’ai dû à de nombreuses reprises annoncer de très mauvaises nouvelles. Un jour ce fût trop, je devenais la souffrance de mes patients, de leurs familles et j’ai cru que j’allais devoir m’arrêter de travailler. J’ai lu beaucoup d’écrits sur la souffrance, mais aucun ne venait soulager le trop-plein que je ressentais face à la souffrance de celles et ceux dont j’essayais de prendre soin. Leur souffrance était devenue ma propre souffrance. Impossible de continuer.

Lors d’une rencontre, un ami se mit à parler de la « miséricorde de Dieu ». J’ai entendu autre chose que l’énoncé de la miséricorde, qui était pour moi une vérité dont je n’avais probablement pas encore fait l’expérience intime. Je venais d’entendre la réponse que je cherchais depuis des semaines, et je lui répétais : « T’es-tu entendu ? Tu as dit : “La Misère est Corps de Dieu.” As-tu entendu ce que tu as dit ? » Lui n’avait rien compris, mais moi, je venais de recevoir une lueur cachée au cœur de la souffrance. Oh ! elle n’expliquait rien, ne justifiait rien, parce que rien ne peut, à mon sens, justifier la souffrance. Elle me donnait simplement des forces de vie plus grandes que celles, destructrices et mortifères, de la seule souffrance à l’état brut. Dans ma foi, je découvrais la certitude que Dieu était bien là, avec nous, avec moi, au cœur de ce chaos de l’humanité en crise, en recherche de sens. Et qu’Il faisait « misère et corps » avec nous. N’est-ce pas le premier message du Vendredi saint ?

Ce fut une expérience spirituelle forte, et je continue de goûter la certitude de cette miséricorde de Dieu, qui m’a donné la force de reprendre mon travail, d’écouter la souffrance des patients, sans qu’elle me submerge ou m’écrase pour essayer de persévérer à marcher à leurs côtés.

Marie-Hélène Boucand, 14 mai 2024

Par Marie-Hélène Boucand. Médecin, docteur en philosophie, elle-même atteinte d’une maladie génétique rare. Dernier ouvrage paru, Traverser l’épreuve de la maladie, éd. Fidélité, 2022. Elle y déroule l’attention à ce que nous percevons, l’attention au corps qui se met à « parler », un travail qui consiste à « traduire » en mots les maux du corps. Pour Ombres & Lumière, elle livre chaque mois sa chronique « A l’ombre d’un mot ».

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