La chambre régionale des comptes Pays de la Loire a contrôlé l’office public de l’habitat (OPH) Mayenne Habitat pour les exercices 2019 et suivants. Il porte également sur certains aspects de la gouvernance et sur la situation financière rétrospective de l’office.
La gouvernance de Mayenne Habitat est à renforcer
En raison d’un absentéisme d’une année continue aux réunions de l’instance, quatre membres du CA se trouvent, de fait, en situation de démission, ce qui doit constituer un point de vigilance pour le fonctionnement de l’instance.
S’agissant du versement d’indemnités aux administrateurs, la chambre demande à l’office de se conformer aux termes de l’arrêté du 16 janvier 2025.
En matière de prévention des risques d’atteinte à la probité, le règlement intérieur pourrait être complété et une charte de déontologie des administrateurs, adoptée.
Afin de contribuer à la stratégie de l’OPH, la chambre recommande de mettre en place un observatoire du logement et de son peuplement.
Le parc de Mayenne Habitat, plus âgé en moyenne sur Laval et en partie énergivore, s’est contracté
Le département de la Mayenne compte environ 160 000 logements, dont 16 000 logements sociaux.
Premier bailleur social du département, Mayenne Habitat, présent sur 187 communes, est propriétaire de 8 800 logements, soit 55 % du parc locatif social. La taille du parc de l’OPH, dont l’âge moyen est élevé sur Laval, s’est contractée entre 2010 et 2024. La part d’étiquettes énergie « E » issue du diagnostic de performance énergétique demeure significative (28 %).
Méduane Habitat, second bailleur du département possède environ 6 000 logements (38 % du total départemental), dont 5 600 sur l’agglomération lavalloise (3 200 pour Mayenne Habitat.
La chambre observe que, dans le cadre des dispositions de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN), le regroupement des deux principaux bailleurs sociaux précités, aurait semblé constituer une solution cohérente à l’échelle départementale de la Mayenne.
Une demande de logement social en progression sensible, un nombre d’attributions en baisse, une décorrélation du parc
Le phénomène de pression locative, désormais plus marqué sur le parc social mayennais dont l’attractivité se renforce, se traduit par un nombre de demandes qui passe d’environ 5 000 à 7 000 sur la période 2021-2024, soit une hausse de 38 %.
Ce sont les logements de type T2 et T3 qui sont majoritairement sollicités. Or les bailleurs sociaux du département, dont Mayenne Habitat, sont confrontés en raison de la structuration originelle de leur parc, à une décorrélation entre l’offre et la demande. L’office a engagé des actions pour répondre à la demande croissante de logements de type T2 et T3, parmi lesquelles une programmation de 700 logements, constitués à plus de 80 % de logements de cette typologie, mais dont les effets n’interviendront cependant pas à court terme.
Les délais moyens d’attribution des logements augmentent fortement sur la période 2021-2024 de 7 à 11,5 mois (11,1 mois pour Mayenne Habitat) et s’allongent plus encore pour les demandes de mutation internes (de 10,4 mois à 16,8 mois).
Le parcours d’accès au logement social, bien structuré, aboutit toutefois à un nombre très conséquent de refus
L’attribution d’un logement social est très encadrée au plan législatif et règlementaire. En Mayenne, le dispositif s’articule autour des objectifs du plan départemental de l’habitat et de l’hébergement (PD2H).
La chambre observe que la communauté d’agglomération lavalloise est le seul des trois établissements publics de coopération inter-communale (EPCI) mayennais concernés, à avoir souscrit aux obligations de mettre en place une commission intercommunale du logement (CIL), une convention intercommunale d’attribution (CIA), un plan partenarial de gestion de la demande de logement et social assorti du dispositif de la cotation de la demande et d’information des demandeurs (PPGDID). La situation est toutefois susceptible d’évoluer fin 2025, pour les deux communautés de communes de Mayenne et de Pays de Chateau-Gontier, dont les travaux de confection du programme local de l’habitat (PLH) sont en cours.
Mayenne Habitat a déployé un dispositif d’accueil et d’accompagnement des demandeurs de logement et des locataires, soutenu par l’implantation d’antennes au cœur des quartiers prioritaires de la ville (QPV) et la création d’un centre d’appels téléphoniques. Les résultats de l’enquête sur la qualité de service de l’union sociale pour l’habitat (USH) des Pays de la Loire, réalisée en 2022 auprès de 1 300 locataires de l’office, sont de très bon niveau.
L’OPH a adopté fin 2024, une charte d’attribution de logements qui comporte de nombreux objectifs et critères visant à guider le choix des candidatures des demandeurs sélectionnés pour une présentation de leur dossier en commission d’attribution des logements (CALEOL). La chambre recommande de formaliser, pour en assurer la traçabilité, les contrôles réalisés sur les candidatures de logements sélectionnées pour présentation à la CALEOL.
La mise en œuvre en septembre 2024, du dispositif de cotation de la demande de logement appelle la réalisation d’un bilan avec Laval-Agglomération, pour en évaluer la pertinence. La chambre recommande à l’OPH de proposer à l’EPCI une révision de la cotation, afin de limiter davantage les refus de logements non motivés.
En effet, malgré des actions de prospection, menées en nombre croissant sur la période 2019-2024, en amont de l’attribution des logements, l’office reste confronté à un taux de refus de propositions de logements qui diminue mais demeure toutefois très conséquent (38 % en 2024). Une part significative de ces refus (20 %), ne fait l’objet d’aucune motivation de la part du demandeur. La chambre demande à l’office de mettre en place un plan d’actions, dont un volet concernera la responsabilisation des usagers afin de corriger les taux de refus élevés.
Le bilan contrasté des attributions de logements témoigne de freins au parcours résidentiel
Le bilan départemental des attributions aux publics prioritaires montre en 2024, une atteinte globale de l’objectif pour les contingents de l’Etat, objet de la gestion en flux délégué confiée aux bailleurs sociaux, dont Mayenne Habitat.
L’OPH n’atteint pas l’objectif national de mixité sociale afférent au taux de 25 % d’attributions de logements aux demandeurs du premier quartile, hors QPV. La préfecture de la Mayenne a indiqué un projet de prise d’arrêté pour la mise en place du dispositif de fixation de plafonds de ressources dérogatoires, tel que prévu à l’article R 441-1-1 du CCH, visant à favoriser la mixité sociale.
La situation financière de Mayenne Habitat globalement favorable, comporte quelques points d’attention
La situation financière de l’OPH traduit un niveau de profitabilité qui s’accroît en fin de période sous revue et rejoint les valeurs de référence au plan national. La progression des produits de l’activité locative est plus forte que l’augmentation des charges, qui est toutefois marquée en 2023, d’une baisse très importante des coûts de maintenance.
Les coûts de gestion de l’office augmentent, tout en restant inférieurs à la valeur de référence nationale. Toutefois, en leur sein, les charges de personnel progressent plus vite qu’au plan national. Cette tendance appelle à la vigilance de sa part, tout comme la progression du montant des créances irrecouvrables de l’office.
Compte tenu d’un excédent brut d’exploitation (EBE) et d’une capacité d’autofinancement (CAF) favorables, Mayenne Habitat a très largement autofinancé ses investissements, dont le rythme faible en début de période, est devenu plus dynamique à partir de 2021.
Malgré un encours élevé (155,5 M€), l’OPH se positionne favorablement pour les ratios d’endettement, qu’il s’agisse du taux moyen (2,6 %), du poids des intérêts rapporté aux loyers et de la capacité de remboursement (13,4 années de CAF fin 2023, pour une référence nationale de 23,4 années).