Quand le regard se trouble - chronique Radio Notre Dame

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Chronique de Florence Gros, directrice de la Fondation OCH, sur Radio Notre Dame –  12 novembre 2024

Caché derrière sa cagoule, je peine à faire la connaissance de Benoit. Voyant mon souhait d’entrer en relation avec lui, sa maman me lance : « Je ne supporte plus le regard des autres sur Benoit, alors je cache son visage ». Un époux dont la femme est devenue handicapée me confiait : « Certaines personnes n’osent pas s’adresser à ma femme, ni même la regarder. Soit ils s’adressent à moi, soit ils évitent toute conversation ». Marie-Caroline, en fauteuil roulant, constate qu’un regard sur elle peut donner vie ou enfermer. Ces témoignages attestent que la rencontre avec une personne en situation de handicap peut s’accompagner d’une forme de trouble.

Simon : Comment expliquer ce trouble ?

Les raisons sont nombreuses, mélangées et tellement humaines : la peur de l’inconnu, le rejet de la différence, la crainte de la ressemblance, des représentations erronées du handicap … ce trouble n’est pas toujours maîtrisable. C’est un indicateur de ce qui se joue dans la rencontre. Dans son dernier numéro, la revue Ombres & Lumière, publiée par l’OCH, consacre tout un dossier sur le regard en donnant la parole à des professionnels ou des témoins comme Cédric. Illustrateur, traumatisé crânien à la suite d’un accident de vélo, il nous donne à méditer : « la question des regards jetés sur moi par l’autre ne fut au fond jamais une épreuve pour moi. Aucun tour de force ou honneur à cela, il s’agit d’abord d’être au clair avec soi. J’ai la chance relative de n’avoir rien à cacher ».

Simon : L’accueil du regard des autres dépendrait du regard qu’on pose sur soi ?

Certainement Simon. Guilhem, 35 ans, atteint d’une neurofibromatose de type 1, maladie génétique qui se manifeste chez lui par une déformation du côté droit du visage témoigne dans « Ombres & Lumière » de l’évolution de son propre regard et de celui des autres posés sur lui. C’est en participant récemment au documentaire la disgrâce, qui donnait la parole à des personnes atteintes d’un handicap très visible, et en se laissant photographier, qu’il a gagné en confiance et en compréhension. C’est une mini thérapie qu’il a faite à ce moment-là. Pour compléter ce dossier passionnant et continuer à nourrir notre réflexion théologique, humaine et psychologique, l’OCH organise une table-ronde à l’occasion de la journée mondiale des personnes handicapées le 3 décembre prochain, en partenariat avec l’institut catholique de Paris sur le thème « Pourquoi notre regard se trouble face au handicap ? ».

Simon : En identifiant ce trouble, est-il possible de transformer son regard ?

En identifiant ce trouble, Simon, il est possible de parvenir à une reconnaissance sereine de cette secousse intérieure. Alors s’ouvre la voie possible d’un changement de regard empli de promesses et d’une relation apaisée à l’autre qui dirait : « je n’ai pas tout vu de toi » ou qui s’inspirerait du regard de Marie sur Bernadette de Lourdes. Un regard qui redonne sa dignité à Bernadette. Quand elle parle de sa rencontre avec Marie, elle dit : « elle me regardait comme une personne qui parle à une autre personne ». Pour commander la revue Ombres et Lumière ou participer à la table-ronde du 3 décembre, rendez-vous sur www.och.fr

Chroniques animées par par Simon Tatreaux, journaliste et présentateur de Radio Notre Dame.

Recapiti
Laetitia Ramandraivonona