Santé mentale des exilé•es LGBTI : violences intersectionnelles et soutien communautaire

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Grégory Beltran, anthropologue

Les violences inter­sec­tion­nelles subies par les exilé.es LGBTI en France, du fait des poli­tiques de non-accueil, ont des effets délé­tères sur la santé mentale. Le soutien commu­nau­taire LGBTI peut réduire ces effets à travers la recons­ti­tu­tion d’un capital social protecteur.

Des recherches scien­ti­fiques et des rapports asso­cia­tifs font état d’importantes fragi­lités psychiques parmi les personnes migrantes LGBTI, du fait de violences complexes, inter­sec­tion­nelles, qui trouvent leur origine à la fois dans l’orientation sexuelle et l’identité ou l’expression de genre (OSIEG) et dans les épreuves de la migra­tion. Ces sources de violences s’imbriquent tout au long du parcours migra­toire, aggra­vant la situa­tion des exilé.es LGBTI et leurs condi­tions d’existence à chaque étape, avec des effets plus ou moins directs sur la santé mentale. L’approche de non accueil, qui prévaut dans les poli­tiques migra­toires fran­çaises, accentue ces diffi­cultés. La prise en charge des troubles psychiques est ainsi défaillante, même pour les personnes en demande d’asile et donc en situa­tion légale. Aux restric­tions des droits à la santé, s’ajoute le manque de moyens investis dans le secteur sani­taire et plus préci­sé­ment dans la santé mentale.

Dans ce contexte, les asso­cia­tions de soutien aux exilé.es LGBTI deviennent des acteurs essen­tiels dans la prise en charge en santé mentale, en propo­sant de l’accompagnement aux droits, de l’orientation vers les soins et des espaces de convi­via­lité. Mais ce soutien diffère selon les villes, les ressources de ces orga­ni­sa­tions et des mili​tant​.es qui les composent. Malgré un maillage sur le terri­toire de plus en plus impor­tant, ces asso­cia­tions sont prin­ci­pa­le­ment présentes dans les grandes villes et fonc­tionnent parfois avec très peu de moyens humains, ce qui les oblige souvent à se concen­trer sur le soutien à la procé­dure d’asile.

« La dimension conviviale et en partie sécurisée de ces associations communautaires, permet cependant à certain​.es exilé.es de reconstruire un réseau de sociabilités qui se rapproche d’une « famille choisie ». »

La dimen­sion convi­viale et en partie sécu­risée de ces asso­cia­tions commu­nau­taires, permet cepen­dant à certain•es exilé•es de recons­truire un réseau de socia­bi­lités qui se rapproche d’une « famille choisie ». Ce capital social recons­titué est un facteur protec­teur pour la santé mentale, tout en offrant des ressources pour accéder aux soins. Mais cette famille choisie se base en premier lieu sur l’OSIEG, et se construit large­ment autour des normes issues de la commu­nauté LGBTI fran­çaise, ce qui entraîne une dimen­sion norma­tive dont les effets sont à interroger. 

Certain​.es exilé.es maîtrisent déjà en partie ces normes, du fait de leur socia­li­sa­tion, d’une vie LGBTI – même cachée – dans leur ville d’origine, voire d’un mili­tan­tisme asso­ciatif dans leur pays. Mais pour les personnes plus éloi­gnées de ces codes, notam­ment celles issues du milieu rural, faible­ment doté cultu­rel­le­ment et parfois non fran­co­phone, l’accès à cette famille peut appa­raître plus complexe, et les liens avec les mili​tant​.es plus fragiles.

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