Q - Sur le Vénézuéla, vous avez annoncé des mesures de réciprocité. Est-ce que vous avez plus de précisions sur le nombre de diplomates qui sont amenés à partir ou qui sont déjà partis, peut-être ?
R - Suite aux annonces du gouvernement vénézuélien, la France a pris des mesures de réciprocité concernant le personnel diplomatique vénézuélien en poste à Paris. Je ne peux pas vous donner de chiffres précis sur le nombre de diplomates que ces mesures concernent. Nous n’avons pas rompu les relations diplomatiques et consulaires, et nous souhaitons toujours œuvrer à une transition pacifique et négociée entre parties prenantes au Vénézuéla. Ces mesures font suite, à la décision unilatérale de Caracas, qui nous a demandé de procéder à la réduction de notre personnel diplomatique et a donné un délai de deux jours - c’est-à-dire quelque chose d’extrêmement court pour les agents concernés - pour quitter le territoire national.
Q - Il y avait une déclaration de la part de fonctionnaires français, après le relâchement des otages israéliens, disant qu’a priori, il y avait une partie des médicaments qui avaient été envoyés, il y a plusieurs mois, par la France à la bande de Gaza, qui sont arrivés aux otages. Pourquoi l’anonymat ? Qu’est-ce que vous avez à dire sur ça ?
R - Vous rappelez une opération qui avait été menée conjointement par la France et le Qatar. Je pense qu’à l’époque je vous avais tout dit de ce que je savais de cette opération, et notamment je me souviens de vos questions sur les conditions de livraison jusqu’aux otages. Je n’ai malheureusement aujourd’hui pas de commentaires supplémentaires à vous faire.
Q - Cette déclaration, il y a trois jours… Disons que le relâchement des otages amène des informations comme si les médicaments, au moins une partie, étaient livrés…
R - Je regrette de ne pas avoir d’indications à vous donner.
Q - Une question sur le Liban, si vous permettez. Le président français, M. Macron, avait déclaré lors de sa visite au Liban le 17 janvier dernier qu’une conférence internationale serait organisée à Paris dans les prochaines semaines. Il n’a pas indiqué de date. Justement, ma question est la suivante : est-ce que vous avez une date plus précise à nous communiquer, et des précisions aussi sur le format de cette conférence ? Est-ce qu’elle serait par exemple du même format que celle qui avait été organisée le 24 octobre dernier ? C’était à l’époque en soutien au Liban ; là, ce serait sur la reconstruction ?
R - Effectivement, il y a un engagement fort et constant de la part des autorités françaises en faveur du Liban. Ça s’était traduit, comme vous le rappelez, par l’organisation d’une conférence internationale, le 24 octobre dernier, de soutien à la population et à la souveraineté du Liban. Le Président de la République a annoncé effectivement, sans calendrier précis à ce stade, une nouvelle conférence dont la date sera communiquée ultérieurement. Cette nouvelle conférence aura effectivement pour objet la reconstruction. C’est une conférence qui va être organisée vraisemblablement à Paris, mais qui donne lieu à des discussions intenses avec les différents partenaires, notamment l’Arabie Saoudite, parce qu’il faut que nous arrivions à réunir un certain nombre de conditions avant que nous puissions la concrétiser. Et notamment, s’agissant du Liban, il y a un point je pense qui retient toute l’attention, c’est la constitution du gouvernement libanais. Je pense que, dans l’ordre des choses, nous allons attendre que le gouvernement libanais soit constitué avant de pouvoir avancer sur cette conférence. Mais elle a été annoncée, elle aura lieu. Et encore une fois, les discussions sont déjà engagées avec un certain nombre de partenaires sur le sujet.
Q - Lundi, le mécanisme de suivi au Liban expire. Est-ce qu’il y a des discussions pour prolonger ce mécanisme ? Jusque-là, pourquoi est-ce que vous pensez que les forces israéliennes ne se sont pas encore retirées ? Est-ce que c’est à cause de foyers de Hezbollah qu’ils pensent devoir encore détruire, des opérations de "nettoyage" ?
Deuxième question, le secrétaire général de l’OTAN a dit ce matin que l’Europe devrait éventuellement financer les armes américaines destinées à l’Ukraine si Trump continuait à les livrer. Qu’est-ce que vous pensez de ça ?
R - Sur la première question, sur le mécanisme de cessez-le-feu qui va arriver à expiration. L’essentiel, c’était, premièrement, d’obtenir l’accord de cessez-le-feu ; et deuxièmement, de faire en sorte que ce cessez-le-feu soit globalement respecté. Il y a encore quelques opérations militaires israéliennes sur le terrain. Mais au terme de l’accord de cessez-le-feu, le retrait de l’armée israélienne doit intervenir avant le 26 janvier prochain. Ce sont les termes de l’accord. La France, pour ce qui la concerne, appelle toutes les parties à respecter ce cessez-le-feu, aussi bien les autorités israéliennes que les autorités libanaises, et à appliquer strictement les engagements pris dans le cadre de l’accord dans les délais prévus. L’idée, c’est que l’instauration du cessez-le-feu est absolument une condition sine qua non pour restaurer la sécurité des Libanais et des Israéliens et permettre un retour des déplacés de ces deux pays dans leurs foyers.
Pour répondre plus spécifiquement à votre question, je pense que nous verrons, le moment venu, l’état de la situation. Encore une fois, l’accord qui avait été trouvé le 26 novembre dernier avait mis en place des mécanismes de dialogue entre Libanais et Israéliens par l’intermédiaire des Américains et des Français. Ces mécanismes de dialogue existent. Ils pourront être réactivés autant que de besoin. L’objectif étant d’obtenir un retrait total des forces israéliennes du territoire sud du Liban, pour qu’on puisse avoir, d’une part un déploiement des forces armées libanaises, et surtout que la FINUL puisse accomplir son office.
Sur votre deuxième question relative aux déclarations de Mark Rutte et sur la question d’un éventuel changement de posture des Américains sur l’Ukraine, les Européens, comme vous le savez, à titre bilatéral mais aussi dans le cadre de l’Union européenne, assurent une large part du soutien civil et militaire à l’Ukraine depuis le début de l’invasion russe. L’investissement européen a été clair, il a été constant et il a été massif. Et ces efforts collectifs de soutien se poursuivront aussi longtemps que la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine sera en cours, et dureront aussi longtemps que l’Ukraine en aura le besoin.
Q - J’ai, rapidement, trois questions, si vous le permettez. La première, en lien avec les relations franco-françaises, et par extension franco-européennes. Je reviens à la déclaration de M. Jean-Noël Barrot qui a fait une déclaration au journal Le Temps, le journal suisse, à la main de sa participation à Davos, une déclaration du moins étonnante, qui sort des usagers diplomatiques quand il s’agit de l’allié américain. Je le cite, je vais le paraphraser : "Nous sommes entrés dans un monde qui voit le retour de la loi du plus fort. Dans ce monde-là, l’Union européenne doit s’affirmer comme une puissance et défendre ses intérêts. C’est ce que font les États-Unis et c’est ce que nous ferons." La guerre économique désormais est déclarée entre l’Europe et les États-Unis ?
Ma deuxième question, j’aimerais revenir sur cette information qui vient de tomber sur le Liban. Le Liban et le sud du Liban vivent des moments extrêmement difficiles. Ce matin, l’armée israélienne bombarde l’ensemble du sud du Liban, des écoles, proximités des hôpitaux, ambulances, etc. Est-ce que vous pouvez confirmer ou infirmer cette information ?
Et la troisième question, en lien avec l’Algérie, des appels incessants pour l’apaisement. Est-ce que vous pouvez nous briefer, si c’est possible, s’il y a une feuille de route dans ce sens, dans le sens de l’apaisement entre Alger et Paris ?
R - Je vais commencer par la première, sur les déclarations du ministre Jean-Noël Barrot. Effectivement, c’est ce qu’il a dit. Mais je rappelle quand même que les États-Unis sont nos plus anciens alliés. Nous partageons avec eux beaucoup, et notamment des valeurs, des intérêts et une histoire commune. Le Président de la République, pour sa part, a déjà travaillé avec le président Trump lors de son premier mandat, et il y a une ouverture totale à Paris pour continuer à travailler en bonne intelligence avec nos alliés américains, ce qui ne veut pas dire que nous ne défendrons pas nos intérêts. Et je pense que c’était le sens de la déclaration de Jean-Noël Barrot. Il y a beaucoup de déclarations qui arrivent de Washington pour le moment, sans que sur beaucoup de sujets, il n’y ait de décision prise. Donc nous sommes effectivement vigilants. Et ce que veut dire, je pense, le Ministre dans ces circonstances, ce n’est pas tellement la question d’une guerre économique, mais c’est surtout une opportunité pour que l’Europe elle-même s’affirme en tant que puissance stratégique dans le domaine militaire ou encore dans les domaines économique et commercial. Nous serons toujours, de toute façon, fidèles à notre attachement au système multilatéral et aux engagements que nous tenons depuis sa création. Et nous resterons des fervents défenseurs de nos enjeux. Ce sera le cas notamment en matière environnementale, en matière de santé mondiale, et plus généralement en matière de droits humains et de respect du droit international. Donc encore une fois, je pense que la lecture qu’on doit avoir des déclarations du Ministre, c’est le rappel du lien historique et étroit que nous avons avec les États-Unis, mais que cela n’enlève pas le fait que nous défendrons nos intérêts, nous défendrons nos intérêts à titre national et nous défendrons les intérêts de l’Europe. Et dans l’affaire, puisque vous parliez de guerre économique ou commerciale, personne, ni les Américains, ni les Européens, n’a intérêt à ce qu’il y ait une guerre commerciale entre les deux continents. Nous mobiliserons tous les outils qui sont à notre disposition à titre national et à titre européen pour pouvoir éviter qu’il y ait, justement, un affrontement économique et commercial, pour qu’il y ait toujours un dialogue constructif de travail avec les États-Unis, mais nous pourrons nous défendre s’il devait y avoir des mesures qui porteraient préjudice aux intérêts européens.
Sur votre deuxième question, je vous renvoie à la réponse que je vous ai donnée précédemment. Effectivement, on constate qu’il y a toujours, çà et là, des frappes israéliennes dans le sud du Liban et nous appelons, encore une fois, au respect des termes de l’accord du 26 novembre 2024 pour un cessez-le-feu et un retrait des troupes israéliennes du sud du Liban. Il y a un mécanisme de surveillance qui a été mis en place. L’essentiel, c’est que nous obtenions un respect des termes de l’accord, et donc un retrait des forces israéliennes et un déploiement des forces armées libanaises.
Enfin, sur l’Algérie, je ne crois pas que notre position ait évolué. On a toujours dit qu’on était très attaché à notre relation avec l’Algérie. C’est une relation historique, c’est une relation dense avec des échanges nombreux, et une feuille de route avait été signée par les deux présidents de la République en août 2022. Cela reste pour nous le document de référence et cela reste pour nous la base sur laquelle nous devons travailler. Nous prenons toute notre part dans la mise en œuvre de cette feuille de route. Et encore une fois, nous considérons que ni la France ni l’Algérie n’ont intérêt à ce que s’installe une tension durable. C’est ce que le Ministre a indiqué, en disant qu’évidemment, il était toujours prêt au dialogue, il était complètement disposé à aller à Alger pour évoquer l’ensemble des sujets. Il y a eu, ces dernières semaines, des événements un peu difficiles qui ont créé de la tension entre Paris et Alger ; des décisions assez surprenantes de la part de la partie algérienne, assez incompréhensibles d’ailleurs. Mais encore une fois, nous sommes convaincus que le premier réflexe que nous devons avoir, c’est un réflexe de dialogue avec les autorités algériennes et puis nous verrons comment cette proposition est reçue, mais nous ne sommes pas du tout dans une logique escalatoire, bien au contraire.
Q - La France accueillera, le 13 février, une conférence internationale sur la Syrie. Quels sont les objectifs de cette conférence ? Quels sont les pays qui vont y participer ? Et qui représentera les autorités de facto en Syrie dans cette conférence ?
Deuxième question sur la Cisjordanie. Est-ce que vous avez évoqué avec les autorités israéliennes la situation en Cisjordanie, suite à ce que vous avez qualifié, dans une déclaration hier soir, de violences commises par des colons israéliens extrémistes et notamment à Jénine, où des localités palestiniennes ont été visées par des attaques faisant quelques blessés ?
R - Sur la première question, effectivement, la France organisera le 13 février prochain - ça a été évoqué par le Président de la République et par le Ministre à plusieurs reprises - une conférence sur la Syrie. C’est une conférence qui s’inscrit dans un cycle de rencontres qui ont déjà eu lieu. La première s’est tenue à Aqaba, dans un format qu’on appelle euro-arabe. Et il y a eu dernièrement la suite de cette conférence d’Aqaba qui s’est tenue à Riyad. C’est une conférence de suivi. Et cette conférence qui se tiendra à Paris s’inscrira dans cette logique. Il y a plusieurs aspects à ces discussions, comme c’était déjà le cas à Aqaba et à Riyad et comme ce sera le cas à Paris. Le premier, c’est effectivement le soutien à la transition syrienne, ce qui est le point important. Nous avons toujours dit que nous étions vigilants et que nous souhaitions une transition politique exigeante, qui permette d’inclure tout l’ensemble de la diversité syrienne, de sa diversité ethnique, de sa diversité religieuse et de sa diversité politique. Par ailleurs, il y a des questions qui se posent, qui devront être aussi abordées pendant cette conférence. Des questions de reprise de l’économie syrienne, éventuellement des questions de reconstruction. Ça se veut des discussions globales qui concernent l’ensemble des sujets d’intérêt pour la Syrie, et l’objectif de ce cycle de conférences, c’est d’accompagner les autorités de fait syriennes dans cette transition. Je pense que nous aurons l’occasion, enfin j’aurai l’occasion de revenir vers vous avec plus de détails en amont de la conférence, mais en tout cas l’idée est effectivement de prolonger les discussions qui ont été commencées à Aqaba et qui ont été poursuivies ensuite à Riyad.
Sur votre deuxième question, sur la Cisjordanie, je vous renvoie à notre déclaration d’hier, avec peut-être en complément, souligner qu’on entretient un dialogue constant avec Israël au niveau de nos autorités. On a toujours dit que les violences commises par les colons en Cisjordanie étaient condamnables parce que d’une part, ce sont des violences à l’encontre de la population palestinienne, mais aussi parce que ce sont des éléments de nature à fragiliser toute perspective de solution politique, et notamment toute perspective d’émergence d’une solution politique à deux États, et que ces violences de colons à l’encontre des Palestiniens sont des mauvais signaux qui sont dirigés en ce sens.
Q - Une petite question encore sur le même thème, en fait, sur la Syrie. Quelle est la situation de l’ambassade aujourd’hui, après la visite de M. Barrot ? Est-ce que l’ambassadeur ou l’envoyé spécial, je ne sais pas comment vous l’appelez, est-ce qu’il est toujours à Beyrouth ? Est-ce qu’il a le projet de déménager à Damas ? Peut-être qu’il y est déjà. Est-ce qu’il y a quelqu’un physiquement dans le bâtiment de l’ambassade en ce moment ?
Et une toute petite précision, si je peux, sur une phrase que vous avez commencée. Sur le Sahel, vous avez dit, "moins de bases, plus d’écoles". Pardonnez-moi, c’est peut-être une question hyper bête : école des enfants ou écoles de guerre ?
R - École des enfants, évidemment.
Sur votre première question, il y a eu une reprise de possession de l’emprise diplomatique française à Damas qui avait été fermée au mois de mars 2012. Donc nous sommes dans une logique de reprise de possession des bâtiments qui ont été fermés pendant très longtemps, et donc ça suppose différentes choses avant de pouvoir les réutiliser de manière normale. Plus largement, sur la question que vous posez, sur le redéploiement d’un dispositif diplomatique à Damas, c’est une question qui est à l’étude actuellement, bien évidemment. Il y a plusieurs options, plusieurs possibilités. Pour le moment, il n’y a pas de décision définitive qui a été prise. Mais il est certain qu’il y aura des avancées sur ce sujet, en tenant compte de différents critères. Le premier critère, c’est la manière dont la transition syrienne se déroule, de voir comment les autorités de fait évoluent et ce vers quoi elles évoluent. Le deuxième des critères, ce sera un critère sécuritaire, puisque quand on déploie une ambassade avec du personnel, on doit s’assurer de la sécurité de ses personnels. Il n’y a pas de décision définitive qui a été prise sur le format de la représentation diplomatique française à Damas, que ce soit à Damas ou que ce soit déportée à Beyrouth. Pour le moment, c’est un sujet qui est à l’étude.
Q - Les États-Unis parlent de l’avenir de la Palestine sans le Hamas. Est-ce que la France s’aligne sur cette position ? C’est l’avis même, je pense, de l’Autorité palestinienne. Qu’en est-il effectivement de ce chapitre-là ? Est-ce que la France est favorable à un État palestinien sans le Hamas ?
Par extension de cela, encore une fois, sur la reconstruction de Gaza, j’ai posé la question la semaine dernière, je pense, et j’aimerais la reposer. Est-ce que l’Europe, la France, avec ses alliés, pensent effectivement à une participation massive à sa reconstruction ? Et si c’est le cas, quels sont les leviers pour le faire ?
R - Sur votre première question, je serais tenté de vous répondre que si nous voulons éviter une résurgence du Hamas, pour éviter que le Hamas reprenne pied à Gaza, alors il faut se dépêcher de remettre en place une administration civile qui soit placée sous les auspices de l’Autorité palestinienne. Autorité palesti