Transmis au Sénat après son adoption en 1ère lecture par l’Assemblée nationale, le projet de loi d’urgence pour Mayotte vient d’être examiné par les différentes commissions du Sénat, puis le sera en séance publique à compter du lundi 3 février 2025.
Le 14 décembre 2024, Mayotte a connu un aléa naturel d’une ampleur inédite : le cyclone Chido a dévasté l’archipel.
Les conséquences de cette catastrophe sont de nature à gravement compromettre le fonctionnement des institutions et présentent un danger grave et imminent pour l’ordre public, la sécurité des populations, l’approvisionnement en biens de première nécessité ou la santé publique.
L’état de calamité naturelle exceptionnelle à Mayotte a été déclaré le 18 décembre 2024.
L’ampleur de la catastrophe et le risque d’inscription dans le temps de la gestion de ses conséquences conduisent le Gouvernement à présenter un projet de loi afin de faciliter l’action des acteurs publics et privés permettant de rétablir les conditions de vie des habitants, en répondant d’abord à l’urgence mais en préparant également la reconstruction de Mayotte.
Les premières dispositions votées en commissions du Sénat:
- Modifier la composition du conseil d’administration qui aura en charge la coordination des travaux de reconstruction à Mayotte, en précisant que sa présidence reviendra au président du conseil départemental de Mayotte, et en y assurant une représentation des maires ;
- Améliorer le caractère opérationnel de l’établissement public et son ancrage dans le territoire, en associant à ses décisions le conseil économique, social et environnemental de Mayotte, ainsi qu’un comité technique composé d’experts de la construction à Mayotte ;
- Étendre, à titre exceptionnel, le droit à la reconstruction et à la réfection à l’identique aux bâtiments irréguliers au regard de la réglementation de l’urbanisme, dès lors qu’ils sont antérieurs à 2013, afin de mieux adapter la reconstruction aux réalités du territoire mahorais ;
- Dispenser d’autorisation d’urbanisme certaines constructions temporaires, afin de pouvoir les déployer en urgence dans le cadre de la gestion de crise, mais uniquement dans les usages de bureaux pour les services publics, de classes temporaires et de logement temporaire pour des personnels venus en renfort pour la gestion de crise et la reconstruction de Mayotte, et en prévoyant que ces constructions ne pourront pas être déployées sans l’accord du maire ;
- Garantir le respect des libertés locales en prévoyant que l’État ne pourrait procéder à la reconstruction des écoles publiques qu’à la demande des communes ;
- Soutenir les dispositifs d’urgence de protection des entreprises et de prolongation des droits sociaux en veillant toutefois à ce que la durée de ces mesures soit compatible avec le caractère d’urgence du texte, tout en prévoyant que les échéances puissent être renouvelées par le Gouvernement, afin de bénéficier de la souplesse nécessaire pour s’adapter au mieux à l’évolution de la situation locale ;
- Assurer une passation rapide des marchés publics indispensables à la reconstruction de Mayotte tout en permettant aux petites et moyennes entreprises locales d’accéder plus facilement à la commande publique.
Parmi les amendements déposés par les sénateurs pour les débats de séance publique
- Renforcer la gouvernance de l’établissement public chargé de la reconstruction de Mayotte en intégrant le Comité de l’eau et de la biodiversité de Mayotte
- Garantir le relogement durable de toutes les personnes présentes à Mayotte
- Envisager que l’ordonnance créant le futur établissement public chargé de coordonner les travaux de reconstruction de Mayotte prévoie les conditions financières et matérielles dans lesquelles cet établissement puisse déléguer au CAUE de Mayotte une mission d’assistance auprès des maîtres d’ouvrage privés.
- Inscrire dans les objectifs du futur établissement foncier en charge avec la reconstruction de Mayotte la construction d’abris anti cycloniques adaptés au nombre d’habitants sur l’île
- Afin d’accélérer l’information à divulguer aux élus, ramener de 3 mois à 1 mois le délai pour prendre l’ordonnance relative à l’établissement chargé de la reconstruction de Mayotte.
- Prévoir au sein du comité technique rattaché au conseil d’administration de l’établissement devant reconstruire Mayotte la présence des opérateurs réseaux : téléphonie, électricité, syndicat des eaux, les chambres consulaires et de la Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire de Mayotte, les organisations représentatives du bâtiment, des travaux publics, de l’ingénierie et de la reconstruction, le conseil de l’ordre des architectes de La Réunion et de Mayotte.
- Envisager que l’ordonnance créant le futur établissement public en charge de la reconstruction à Mayotte prévoie les moyens nécessaires pour déléguer cette mission au CAUE.
- Instaurer une distinction entre la reconstruction des écoles qui ont été détruites lors du cyclone Chido, soumises à l’avis simple des communes, et la construction potentielle de nouvelle école ou l’extension d’écoles existantes, à la demande des communes concernées.
- Inscrire dans la loi les engagements de prise en charge des élèves des collèges et des lycées de Mayotte contraints de poursuivre leur scolarité hors de Mayotte
- Définir clairement, lors de la construction ou de la rénovation d’un établissement scolaire situé en zone exposée aux cyclones, une distinction entre les bâtiments à fonction scolaire et ceux à fonction d’abri d’urgence. Cette distinction permettra d’assurer la continuité pédagogique tout en garantissant des conditions d’accueil dignes et sécurisées pour les populations sinistrées.
- Inscrire dans les cahiers des charges de la reconstruction scolaire l’intégration systématique d’un service de restauration ainsi que la construction ou la rénovation de plateaux sportifs.
- Établir dès maintenant un plan pluriannuel de reforestation durable en lien avec les collectivités
- L’ordonnance prise par le Gouvernement pour la reconstruction devra intégrer des dispositions accélérant et facilitant l’installation de panneaux photovoltaïques, de récupérateurs d’eaux de pluie et de chauffe-eau solaires destinés aux habitations et bâtiments public.
- Prévoir les adaptations nécessaires afin de faciliter la production et la gestion des logements foyers
- Demande de suppression de l’article 4 bis car il poursuit la logique de l’arrêté du préfet de Mayotte restreignant depuis le 4 janvier la vente de tôles bac acier aux professionnels et aux particuliers sur présentation d’un justificatif d’identité et de domicile.
- Rétablir l’application de la réglementation relative aux risques paracycloniques car il importe de poursuivre l’objectif de sécurité des personnes et de résilience des constructions.
- Assurer la prise en compte de l’accès à l’eau potable, du raccordement en eau potable et au réseau d’assainissement par la reconstruction ainsi que la biodiversité et le patrimoine naturel
- Promouvoir des constructions, réalisées dans des matériaux écologiques, assurant la performance énergétique des bâtiments.
- Raccourcir les délais de reconstructions des antennes de téléphonie mobile à Mayotte.
- Prévoir le développement des transports en commun sur l’île, Mayotte étant le seul département français à n’être desservi par aucun réseau de transport en commun, hors transports scolaires.
- Ne pas autoriser des demandes d’urbanisme de manière tacite ; l’Etat devant prendre toutes les dispositions nécessaires pour assurer un examen des dossiers qui soit à la fois minutieux, et rapide.
- Exclure la possibilité de commencer les travaux dès le dépôt de la demande lorsque les opérations et les travaux de démolition ou de déblaiement concernent un immeuble inscrit au titre des monuments historiques sans attendre l’accord requis par le code du patrimoine
- Introduire un taux différentiel qui permet d’avoir un octroi de mer qui soutient la production locale et favorise l’utilisation de produit à plus faible émission de carbone
- Offrir un outil de simplification aux collectivités locales mahoraises qui souhaiteraient, dans le cadre de la reconstruction postérieure au passage du cyclone Chido, ouvrir à l’urbanisation certaines zones pour y construire des logements.
- Supprimer la dérogation proposée par le gouvernement permettant de déroger au principe d’allotissement des marchés publics.
- Obliger les acheteurs à recourir aux petites entreprises locales et artisans locaux, pour 30% du montant des marchés publics qu’ils passent.
- Limiter la sous-traitance à deux rangs
- Prévoir que les associations et fondations reconnues d’utilité publique ayant bénéficié de subventions de la part des collectivités territoriales ou de leurs groupements, présentent un rapport d’activité, au plus tard le 1er mars 2026.
- Prolonger jusqu’à la fin de l’année 2025 le dispositif fiscal exceptionnel mis en place pour encourager les dons en faveur de Mayotte suite au cyclone Chido et prévoir des réductions d’impôt exceptionnelles pour venir en aide aux habitants de Mayotte touchés par le cyclone Chido : aide alimentaire, aide à la reconstruction de logements.
- Recenser le nombre de décès, de personnes blessées et disparues.
- Prévoir une extension de la période relative à la suspension de l’obligation de paiement des cotisations et contributions sociales jusqu’au 31 décembre 2025, et la possibilité de proroger cette mesure par décret jusqu’au 31 décembre 2026 si la situation économique et financière des cotisants le justifie.
- Renforcer le dispositif des Parcours Emploi Compétences (PEC) à Mayotte dans le contexte de la reconstruction de l’île
- Suspendre l’application de la réforme du RSA à Mayotte ainsi que les deux réformes de l’assurance chômage.
- Demande d’un rapport au Parlement afin de dénoncer les inégalités persistantes du système de protection sociale à Mayotte
- Demande d’un rapport relatif à la gestion des interventions ministérielles lors des crises affectant Mayotte et aux mesures nécessaires pour assurer une meilleure coordination et efficacité des secours
- Création d’un comité d’éthique sur le dialogue interreligieux afin de définir les règles en matière d’autorisation de sépulture
Accédez au texte de la commission :
https://www.senat.fr/leg/pjl24-283.html
Accédez à la synthèse des rapports des différentes commissions saisies sur le projet de loi :
https://www.senat.fr/rap/l24-282/l24-282-syn.pdf