Vingt ans après la fermeture de la dernière mine de charbon en Moselle, l’exploitation minière est de retour en France. Une relocalisation encouragée par l’Union européenne dans le cadre de sa politique vers une transition écologique.
Une politique européenne de relocalisation des mines
Réduire la dépendance en minerais stratégiques de la transition écologique et garantir un approvisionnement plus durable. Le 23 mai 2024, le règlement sur les matières premières critiques (Critical Raw Materials Act) entrait en vigueur dans tous les États membres de l’Union européenne. Une législation spécifique de l’UE visant à atteindre une capacité d’extraction d’au moins 10 % de sa consommation annuelle d’ici à 2030, une capacité de raffinage d’au moins 40 % et une capacité de recyclage d’au moins 25 %.
La demande en métaux issus des terres rares devrait être multipliée par six d’ici à 2030.
« Pour réaliser la transition écologique, il faudra renforcer la production locale de batteries, de panneaux solaires, d’aimants permanents et d’autres technologies propres », indique la Commission européenne sur son site. Elle mise ainsi sur une politique de relocalisation des mines, notamment en France, pour assurer l’extraction de quantités importantes de métaux. En effet, la demande en métaux issus des terres rares devrait être multipliée par six d’ici à 2030.
« Parler d’une politique de relocalisation des mines en France est mensonger, car l’objectif de 10 % reste très faible explique la journaliste indépendante Célia Izoard, autrice de La Ruée minière au xxie siècle. Il s’agit d’un enjeu stratégique pour assurer une réserve minimale, mais pas d’arrêter d’extraire ailleurs. Relocaliser les mines serait évidemment une bonne idée du point de vue de la justice sociale, mais cela voudrait dire alors diminuer notre consommation de métaux par 20 voire par 50. »
Du lithium dans l’Allier
Vitrine de la relance minière en France, le projet de la mine de lithium d’Échassières, dans l’Allier, fait déjà parler de lui. Le groupe Imerys (13 700 salariés répartis dans 57 pays et 3,8 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2023) table sur une production de 34 000 tonnes de lithium par an, soit de quoi produire 7 000 batteries pour véhicules électriques.
« Emili », pour « exploitation du mica lithinifère », divise. Des associations de protection de l’environnement et des habitants viennent de déposer un recours auprès de l’État contre ce projet qualifié de « Projet d’intérêt national majeur » et dont l’ouverture est prévue en 2028.
Une partie de la population craint des effets sur la pollution des sols, la destruction de l’environnement et l’accès en eau potable dans une zone classée Natura 2 000. Sans compter les déchets générés par l’extraction.
« Les habitants veulent qu’on leur assure que ce lithium ne servira pas à construire des gadgets de l’électro portatif jetable, à faire des alliages pour les avions ou des batteries de SUV, qui ne participent en rien à la diminution des émissions carbone, au contraire », continue Célia Izoard très au fait du dossier.
25 demandes de permis miniers sur le territoire métropolitain
Dordogne, Haute-Vienne, Bretagne, Loire, Auvergne… « 25 demandes de permis pour un projet minier sont en cours sur le territoire métropolitain, dont 12 ont déjà été accordés » détaille Célia Izoard. « C’est révélateur de la situation : la transition écologique consiste à créer des politiques réglementaires qui favorisent l’industrie minière. »
L’ouverture des mines en France entraînera-t-elle des fermetures de mines dans des pays qui subissent les conséquences de l’extraction minière ?
En témoignent les mesures de simplification prises par l’État français pour « accélérer les procédures minières, notamment pour des projets importants pour la transition énergétique et la sécurité d’approvisionnement ».
Cette question reste alors en suspens : l’ouverture des mines en France entraînera-t-elle des fermetures de mines dans des pays qui subissent les conséquences de l’extraction minière ?
Texte : Clémentine Méténier / Photo de couverture : Laurent Hazgui/Divergence/CCFD-Terre Solidaire
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