Q&A sur la 69e session de la Commission de la condition de la femme (CSW)

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La 69e Commission de la condition de la femme (CSW) des Nations unies se tient du 10 au 21 mars 2025 à New York. La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) y participe, notamment avec une délégation de l’Alliance féministe francophone. Lire le communiqué sur cette conférence.

Qu’est ce que la Commission de la condition de la femme (CSW) et quel son rôle au sein des Nations unies ?

La Commission de la condition de la femme (CSW) est le principal mécanisme intergouvernemental des Nations unies dédiée à la promotion des droits des femmes et des filles et à l’égalité de genre. En collaboration avec Onu Femmes, la CSW élabore de nouvelles normes et politiques mondiales promouvant l’égalité de genre et l’autonomisation des femmes et garantit le suivi des engagements internationaux à ce propos. Chaque année, en mars, elle rassemble à New York pendant deux semaines, des représentant·es d’États membres, d’organisations de la société civile et d’entités onusiennes afin d’évaluer les progrès réalisés et d’identifier les obstacles persistants à l’égalité de genre.

Qu’est ce que la Déclaration de Beijing et quel est le lien entre la CSW ?

La Déclaration et le Programme d’action de Beijing, adoptés en 1995, représentent un cadre de référence pour la communauté internationale en matière d’égalité des femmes et des filles. La Déclaration a été adoptée à l’unanimité par 189 États lors de la 4e Conférence mondiale des Nations unies sur les femmes, à Pékin, et a ouvert la voie à des avancées considérables dans des domaines clés tels que l’éducation, la santé, la représentation politique et des réformes juridiques. 30 ans plus tard, ce texte et son programme d’action restent la référence mondiale en matière de droits des femmes. L’enjeu de cette 69e session sera donc d’évaluer les « défis actuels qui affectent la mise en œuvre du programme et la réalisation de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes ».

En quoi la CSW, et particulièrement cette 69e session, est révélatrice d’une érosion du consensus international en faveur des droits des femmes ?

Le consensus international en faveur des droits des femmes et des personnes LGBTQI+ s’érode de jour en jour. Cet effritement se manifeste de manière évidente lors des examens quinquennaux de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing. Si, en 1995, 189 États ont adopté la Déclaration à l’unanimité, plusieurs émettent aujourd’hui des réserves et des objections sur certains aspects relatifs à l’égalité de genre.

Certains États cherchent à réorienter l’agenda vers des positions plus conservatrices, en tentant de réduire la portée des documents finaux votés à l’issue des deux semaines (conclusions et résolutions concertées), en s’attaquant aux éléments de langage autour du genre et en freinant les discussions sur les enjeux de protection des droits LGBTQI+. Les divergences idéologiques étant de plus en plus marquées, il peut être difficile, voire dans des cas exceptionnels impossible, d’arriver à un consensus lors des négociations.

Afin d’éviter que les fractures idéologiques grandissantes n’amènent à des négociations substantielles régressives, la CSW se retrouve quelque peu contrainte de commémorer les engagements passés, sans pouvoir proposer une révision progressive des acquis obtenus en 1995. Cette réalité alarmante souligne l’urgence d’une mobilisation forte pour défendre les acquis obtenus mais également pour exiger des engagements ambitieux.

Pourquoi faut-il que les ONG féministes investissent massivement cet espace ?

La CSW est devenue un terrain de confrontation où les mouvements anti-droits se rassemblent et instrumentalisent les droits des femmes pour pousser leur agenda conservateur et amoindrir l’ambition des conclusions et des résolutions adoptées à l’issue des deux semaines de session. Ces groupes, bénéficiant du soutien de gouvernements conservateurs, investissent cet espace et utilisent des stratégies diverses pour influencer les discussions : distribution de tracts, affichages massifs de discours réactionnaires, lobbying auprès des délégations officielles, perturbation d’événements pour donner l’illusion d’une opposition massive et organisation en marge des négociations d’une contre conférence sur « la femme et la famille ».

Si les tactiques de ces mouvements sont connues depuis un certain temps, la normalisation croissante de leur présence dans des espaces destinés à faire progresser la justice de genre est une tendance préoccupante qui amène à s’interroger sur l’avenir d’un tel mécanisme.

Face à cette dynamique,la participation active des organisations féministes est un élément essentiel du travail de la CSW. Les ONG ont joué un rôle crucial dans l’élaboration du cadre politique mondial actuel pour l’autonomisation des femmes et l’égalité de genre et elles continuent de jouer un rôle majeur en rappelant aux dirigeant·es internationaux·ales et nationaux·ales leur responsabilité quant à la mise en œuvre des engagements pris dans le cadre du Programme d’action. Il est donc vital qu’un maximum d’organisations féministes participent à la CSW afin d’empêcher la monopolisation de cet espace par des discours régressifs. Pour cela, il est nécessaire de renforcer les alliances, mobiliser les acteurs progressistes et assurer une présence massive au sein des discussions officielles et parallèles.

À cet égard, l’Alliance féministe francophone, qui sera lancée lors de cette 69e session de la CSW par le Fonds pour les femmes en Méditerranée, la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et Equipop, visera à renforcer la structuration, la participation, l’influence, la mise en réseau et le financement des organisations féministes francophones dans les enceintes multilatérales telles que la CSW pour lutter contre les mouvements anti-droits à l’international.

Que demande la FIDH ?

La FIDH appelle à une mobilisation massive pour garantir que la CSW demeure un espace de progrès, en demandant aux États membres de :
 coordonner leurs efforts avec la société civile féministe pour contrer le recul des droits des femmes et prendre des engagements fermes pour lutter contre la présence des mouvements anti-droits au sein des enceintes multilatérales ;
 assurer une protection renforcée des militantes et organisations de la société civile face aux pressions, techniques d’obstructions et intimidations utilisées par ces mouvements dans les enceintes multi-latérales ;
 relancer des discussions ambitieuses au cours des négociations pour aboutir à des conclusions agréées qui protègent au maximum les droits des femmes.

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Maxime Duriez