Sa disparition laisse un vide immense, non seulement au sein de notre association, mais aussi dans le cœur de tous ceux qui l’ont croisé, qui ont été touchés par son altruisme et son engagement inébranlable pour la cause des enfants.
Gilbert était un homme d’exception, un visionnaire qui, il y a plusieurs décennies, a su transformer son rêve en une réalité concrète. Grâce à lui, des milliers d’enfants ont retrouvé la chaleur d’un foyer aimant, la stabilité et la chance de grandir dans un environnement protecteur. Il ne s’agissait pas simplement d’une idée ; il a su bâtir une organisation qui, aujourd’hui, œuvre dans le monde entier.
Gilbert faisait partie de ces hommes et de ces femmes qui ont su reconstruire la France après la guerre, en partant de rien, mais avec une détermination sans faille. Son humanité, son sens du partage et son courage ont marqué chacun d’entre nous. Inspiré de Hermann Gmeiner, fondateur du premier village d’enfants SOS en Autriche, Gilbert a développé l’approche unique qui guide notre action aujourd’hui. Une approche fondée sur l’amour, la sécurité, l’éducation et l’accompagnement, qui permet à des enfants de se reconstruire, d’oser rêver à un avenir meilleur. Dès le début, son action a été rendue possoble grâce au soutien de donateurs, partenaires et institutionnels qui lui ont rapidement fait confiance. Il avait cette capacité rare à fédérer autour d’un projet et de ses idées. Si SOS Villages d’Enfants s’est développée à travers le monde, c’est bien grâce à sa vision et à son travail acharné.
Je garde en mémoire deux images fortes de Gilbert. La première date de 2016, à Nancy, lors d’une conférence qu’il a donnée en soutien de son livre À portée de cœur. Ce moment reste gravé dans ma mémoire : l’admiration et le respect qu’il suscitait étaient palpables, tout comme sa grande modestie face aux incroyables résultats qu’il avait obtenus. Il parlait de son œuvre non pas avec fierté, mais avec la simplicité d’un homme qui ne se considère que comme le porteur d’une mission bien plus grande que lui.
La seconde image est plus personnelle : l’anniversaire du village de Marseille, un moment où, entouré des enfants et des adultes, l’impact de son engagement était manifeste. Ce n’était pas simplement un projet qu’il avait initié ; c’était une véritable famille qu’il avait créée, une famille qui, au fil des années, a permis à des enfants de se reconstruire, de sourire à nouveau et de trouver leur place dans le monde.
Aujourd’hui, nous perdons une grande source d’inspiration. Mais comme il nous l’a toujours montré, son œuvre continue de vivre à travers nous. Ce qu’il nous laisse, c’est une référence, un témoignage indélébile de ce que l’engagement, l’humanité et la détermination peuvent accomplir. Notre association va continuer de porter son héritage pour faire en sorte que chaque enfant puisse grandir dans un environnement sûr et aimant.
Né à Busigny, dans le Nord de la France, en 1931, Gilbert Cotteau a toujours gardé un lien profond avec ses racines. En 1953, jeune professeur de français au Centre d’apprentissage des métiers de l’ameublement, à Saint-Quentin, il remet un devoir noté zéro à l’un de ses élèves. « Je me suis dit qu’il n’avait pas dû y prêter attention », se souvenait-il. Il découvre alors que ce jeune garçon est orphelin, séparé de ses cinq frères et sœurs après un tragique accident. Ce drame le bouleverse.
Concours de circonstances, quelques jours plus tard, il lit dans La Voix du Nord un article sur le premier village d’enfants SOS fondé en Autriche par Hermann Gmeiner. Touché par cette initiative qui a pour vocation de réunir les fratries orphelines de guerre, il sent qu’il tient là une piste à explorer. À seulement 22 ans, Gilbert Cotteau se rend en Autriche pour découvrir ce village et rencontrer les mères SOS qui y travaillent. Il en revient convaincu : il faut créer la même chose en France.
Trois mois plus tard, il fonde SOS Villages d’Enfants France, avec l’ambition d’offrir aux enfants séparés de leurs parents un cadre familial stable et aimant, où les fratries peuvent grandir ensemble. En septembre de la même année, la première pierre du village de Busigny – sa ville natale – est posée. Les premiers enfants y sont accueillis dès l’année suivante et l’aventure d’une vie débute pour le jeune visionnaire.
Gilbert Cotteau a consacré toute sa vie à la protection des enfants les plus vulnérables. En créant SOS Villages d’Enfants, il a voulu offrir bien plus qu’un toit : un véritable foyer, un cadre stable et protecteur où chaque enfant peut grandir en sécurité, accompagné par des mères SOS dévouées. Près de 70 ans plus tard, son engagement continue de porter ses fruits : 20 villages d’enfants SOS accueillent aujourd’hui plus de 1 600 enfants et jeunes en France. Il a également fondé plusieurs autres organisations de soutien et de développement touchant des milliers de personnes à travers le monde.
Son départ marque la fin d’une époque, mais son œuvre lui survit. À travers chaque village, chaque sourire d’enfant, chaque destin transformé, l’élan qu’il a initié continue de grandir. Son départ laisse un vide immense, mais son héritage et son engagement continuront de vivre à travers les villages d’enfants SOS et les programmes de l’association.