Enfance : la commission d’enquête sur les violences dans les établissements scolaires propose une cellule dédiée - Départements de France - AF

Compatibilità
Salva(0)
Condividi

En février dernier, la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale s’était dotée des pouvoirs d’enquête pour travailler, dans le prolongement de « l’affaire Bétharram » sur les modalités du contrôle par l’État et de la prévention des violences dans les établissements scolaires.

Le rapport d’enquête de Violette Spillebout (EPR, Nord) et Paul Vannier (LFI, Val-d’Oise) a été adopté le 25 juin et rendu public le 2 juillet. Il pointe principalement un « Etat défaillant ».

Si le rapport revient largement sur « l’affaire Bétharram » (Pyrénées-Atlantiques) et sur d’autres affaires similaires comme le Village de Riaumont (Pas-de-Calais), il évoque également la question de l’articulation entre l’Education nationale et les CRIP départementales, sujet principal lors de l’audition de Départements de France (voir DI n°1401).

Tout d’abord, les rapporteurs estiment que le 119 est un « numéro d’urgence efficace mais dont le lien avec l’Education nationale est perfectible ». (cf. recommandations n°37 et 38).

S’agissant des informations préoccupantes, une « incompréhension mutuelle entre éducation nationale et départements » est évoquée. Extraits :

« À la grande surprise des rapporteurs, le périmètre des Crip font l’objet de grandes divergences d’interprétation : alors que l’éducation nationale – et l’enseignement catholique, par la voix du Sgec – considèrent que les IP sont un outil permettant de signaler les violences faites aux enfants, qu’elles soient commises dans le cadre familial ou le cadre scolaire, les départements semblent défendre une position inverse, considérant que les violences commises en milieu scolaire ne relèvent que des établissements eux-mêmes et de la hiérarchie académique, et non de la protection de l’enfance. Le président de Départements de France, François Sauvadet, a ainsi très clairement affirmé que « concernant les actes délictueux ou criminels commis par un enseignant ou un personnel de l’éducation nationale, la responsabilité incombe au chef d’établissement », précisant qu’« il est primordial de rappeler que, sauf en cas de défaillance où l’autorité parentale est alors assumée par les départements, le premier protecteur de l’enfant est le parent. Ainsi, si un enfant subit des violences au sein d’un établissement scolaire, c’est en premier lieu au détenteur de l’autorité parentale qu’incombe la responsabilité de le protéger. Je tiens à préciser que les violences faisant l’objet de cette commission d’enquête ne relèvent pas de la compétence des départements ». Selon lui, « le département n’est concerné que si l’enfant est en danger au sein de sa famille. Les violences commises dans un établissement scolaire par une personne ayant autorité relèvent de la compétence de l’éducation nationale ».

« (…) La Dgesco et la DAF indiquent explicitement, dans leurs réponses écrites aux rapporteurs, que « parce que les violences commises en milieu scolaire demeurent du ressort de la protection de l’enfance, le conseil départemental, dont la Crip, reste compétent ». La ministre de l’éducation nationale elle-même, Élisabeth Borne, interrogée sur cette contradiction, a affirmé que « l’information préoccupante adressée à la cellule de recueil départementale reste un vecteur possible pour alerter sur une situation de danger ou de risque pour un mineur », tout en soulignant que la règle est d’adresser parallèlement un signalement à la justice. »

« (…) De cette incompréhension mutuelle découle une gestion défectueuse des IP transmises en lien avec des violences scolaires. Si François Sauvadet a assuré qu’en cas de transmission par un membre du personnel d’un établissement scolaire « nous établissons un dialogue avec le Dasen pour vérifier l’authenticité des faits, nous assurer qu’il en a connaissance et prendre les mesures judiciaires nécessaires », force est de constater que les échanges ne sont pas nécessairement fluides. »

Au final, les rapporteurs estiment qu’une « solution de facilité pour traiter les violences commises en milieu scolaire consisterait à élargir explicitement le champ de compétences des Crip pour y diriger l’ensemble des signalements. Pour autant les rapporteurs considèrent, comme la Ciivise, que ce serait un contresens (…) Il conviendrait plutôt de mettre fin, notamment par l’information des enseignants, à ce mésusage des signalements Crip, ce à quoi concourrait la cellule Signal Éduc préconisée. » (cf. recommandation n°36).

Enfin, on notera que, sur la base de témoignages reçus, la présidente et les rapporteurs ont effectué 80 signalements au titre de l’article 40 du code de procédure pénale (listés p. 397 du rapport).

Quelques recommandations parmi les 50 :

« Reconnaître les victimes de violences commises en milieu scolaire »

  • Recommandation n° 32 : Prolonger le délai de prescription du délit de non-dénonciation pour les faits de violences volontaires, tels que définis par le code pénal, dès lors qu’ils sont commis sur un mineur.

« Protéger les élèves »

  • Recommandation n° 28 : Augmenter les subventions versées aux associations œuvrant dans le domaine de la protection de l’enfance et intervenant dans le cadre des séances annuelles d’information et de sensibilisation des élèves et sécuriser les associations disposant d’agréments nationaux par la signature systématique de conventions pluriannuelles d’objectifs.
  • Recommandation n° 23 : Procéder à un contrôle de l’honorabilité de l’ensemble des membres du personnel et des bénévoles des établissements scolaires publics et privés, au moment de leur recrutement puis tous les trois ans.
  • Recommandation n° 24 : Permettre aux dirigeants des organismes de gestion de tous les établissements privés de faire procéder par le rectorat, à tout moment et sur simple demande, au contrôle du casier judiciaire et à la vérification du FIJAISV pour les personnels et bénévoles exerçant dans leur établissement.

« Soutenir les personnels pour lutter contre les violences en milieu scolaire et structurer une culture du signalement »

  • Recommandation n° 29 : Garantir, pour l’ensemble des personnels de tous les établissements scolaires une formation initiale et continue dans le domaine de la lutte contre toutes les formes de violences faites aux enfants, dans le cadre intrafamilial et en milieu institutionnel. Établir à cette fin un plan pluriannuel de formation.
  • Recommandation n° 30 : Établir un plan pluriannuel de recrutement de personnels médico-sociaux permettant la mise en place de lieux d’écoute dans les établissements publics du second degré et de couvrir les besoins constatés dans les écoles publiques, maternelles et primaires.
  • Recommandation n° 31 : Engager une réflexion au sein des réseaux d’établissements privés sur le renforcement des services sociaux et de santé scolaire.
  • Recommandation n° 41 : Procéder à un affichage systématique dans toutes les écoles et tous les établissements scolaires publics comme privés de la procédure, commune à l’ensemble des personnels quel que soit leur statut, permettant la protection des lanceurs d’alerte.
  • Recommandation n° 36 : Mettre en place une cellule nationale, Signal Éduc, de recueil des signalements des violences commises par des adultes au sein de tout établissement scolaire, spécifiquement dédiée aux personnels et représentants de parents d’élèves ne souhaitant ou ne pouvant emprunter la voie hiérarchique. Cette cellule aurait également un rôle de suivi des situations, de conseil de l’administration et d’établissement de données statistiques. Elle serait placée au sein du ministère de l’éducation nationale et composée de membres des corps d’inspection, de magistrats et de personnalités qualifiées issues d’associations de protection de l’enfance partenaires du GIP-France enfance protégée et d’associations regroupant des collectifs de victimes.
  • Recommandation n° 39 : Désigner la cellule Signal Éduc comme autorité pouvant recueillir les signalements des lanceurs d’alerte en matière de violences commises par des adultes sur des élèves en milieu scolaire et recentrer le rôle du collège de déontologie et du médiateur de l’éducation nationale sur le recueil des autres signalements et leurs autres missions.
  • Recommandation n° 38 : Formaliser un partenariat entre la cellule Signal Éduc et le GIP-France enfance protégée afin que tous les signalements au 119 de violences commises par un membre du personnel d’un établissement scolaire soient transmis à la cellule Signal Éduc.
  • Recommandation n° 37 : Conforter les moyens du 119 afin de garantir la prise en charge de tous les appels.

« Lever le tabou des contrôles de l’État sur les établissements privés sous contrat »

  • Recommandation n° 10 : Prévoir dans le code de l’éducation au moins un contrôle périodique complet des établissements privés tous les cinq ans au plus. Rendre publique la date du dernier contrôle effectué.

« Refonder les inspections pour garantir la protection des élèves »

  • Recommandation n° 16 : Adresser les rapports de contrôle à l’ensemble des membres du conseil d’administration de l’établissement et aux membres des commissions compétentes des conseils élus des collectivités territoriales contributrices.

Le rapport : http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/rapports/cion-cedu/l17b1642-ti_rapport-enquete#

Le compte-rendu de l’audition de DF : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/comptes-rendus/cion-cedu/l17cion-cedu2425073_compte-rendu#

Recapiti
Téa Bazdarevic