Hebdo de l’énergie : l’actualité des marchés du 14 novembre 2025

Compatibilità
Salva(0)
Condividi

Nos experts vous présentent leur analyse complète de toute l’actualité sur les marchés de l’énergie à la date de clôture du 14 novembre 2025.

Marché de l'électricité

Électricité : Le calme avant la tension

Le marché de l’électricité française vit un moment presque irréel. Le contrat Cal 26, tombé à 52,30 €/MWh, retrouve des niveaux d’avant-crise, quand personne n’imaginait encore l’explosion des prix de 2022. Cette glissade vertigineuse, de plus de 30 % en neuf mois, s’explique aisément : un parc nucléaire au rendement record, une demande industrielle léthargique, et une surcapacité estimée à près de 10 GW. Sur le papier, tout semble justifier ces prix bradés.

Les 50 €/MWh deviennent désormais une frontière psychologique, un seuil où les acheteurs de long terme guettent le point d’entrée idéal. Car à ces niveaux, le risque est asymétrique : la baisse paraît limitée, mais le potentiel de rebond, lui, reste entier. Dans le même temps, EDF rebat les cartes avec la refonte de ses enchères CAPN, élargissant l’accès aux contrats et consolidant sa position de leader. Enfin, le réacteur EPR de Flamanville, qui monte en puissance, symbolise ce marché en transition : stable, mais pas immobile.

À la une

Nucléaire français : la facture qui explose

La Cour des comptes tire la sonnette d’alarme : entre exigences accrues de sûreté et usure naturelle, la maintenance du parc nucléaire français voit ses coûts s’envoler.

Le « Grand carénage », ce vaste programme censé prolonger la vie des réacteurs au-delà de 40 ans, atteindrait désormais 100,8 milliards d’euros d’ici 2035, soit le double des estimations initiales d’EDF en 2020.

Une dérive financière difficile à suivre

Pour la Cour, le suivi budgétaire n’est plus à la hauteur : incertitudes, coûts qui dérapent, délais qui s’allongent.

Rien qu’en 2023, les dépenses de maintenance ont dépassé les 6 milliards d’euros, en hausse de 28 % depuis 2014. Les standards français de sûreté, parmi les plus stricts au monde, accentuent encore la pression financière.

Prolonger : rentable… jusqu’à un certain point

Prolonger les réacteurs jusqu’à 60 ans reste très compétitif avec un coût de 51 €/MWh.

Mais au-delà ? Les premières études montrent que certains réacteurs ne passeraient pas les tests, posant un défi stratégique majeur pour le futur mix énergétique.

La corrosion, la douloureuse cachée

La crise de la corrosion sous contrainte a coûté 38,4 milliards d’euros à EDF, notamment en raison de l’allongement des arrêts. Une ombre lourde qui plane encore sur la maîtrise des coûts et des délais.

L’essentiel à retenir ailleurs en Europe, par notre expert​

Arrêts prolongés : un calendrier qui se grippe

Les arrêts programmés des centrales françaises s’allongent de 37 % entre 2020 et 2024. Même les arrêts simples, censés durer 35 jours, dépassent désormais les 70 jours. Les visites partielles et décennales dérivent aussi, pénalisant la performance industrielle du parc. La Cour recommande d’allonger les cycles pour réduire la fréquence des arrêts.

Corrosion : une crise financière majeure

Entre inspections, réparations et baisse de production, la corrosion sous contrainte a fait perdre 38,4 milliards d’euros à EDF entre 2021 et 2024. L’électricien aurait sous-estimé l’ampleur du manque à gagner, amplifié par un marché électrique en tension. Le phénomène reste sous enquête, mais la modulation accrue des réacteurs figure parmi les suspects.

Allemagne : feu vert pour l’électricité industrielle

Berlin s’apprête à instaurer un « prix industriel » de l’électricité, plafonné autour de 50 €/MWh. Coût du programme : 3 à 5 milliards d’euros jusqu’en 2028. Objectif : soulager les industries énergivores frappées par la flambée post-Ukraine. Reste à voir si cette mesure suffira à restaurer leur compétitivité.

– Helder FARIA RUBIO, 

Responsable Vente Indirecte et Partenariats chez Capitole Energie

Marché du gaz

Gaz : une sérénité trompeuse

Sous ses airs apaisés, le marché européen du gaz prépare peut-être sa prochaine secousse. Le TTF oscille autour de 31 €/MWh, dans une atmosphère de confort trompeur : les flux norvégiens abondent, le GNL afflue à plein régime, et les températures restent anormalement douces. Les stockages européens, encore remplis à 83 %, donnent une illusion de sécurité. Mais derrière ces chiffres, une réalité s’impose : 10 points de moins qu’à la même période l’an dernier, et un hiver qui n’a pas encore commencé à mordre.

Le moindre coup de froid, une baisse de production éolienne, ou une tension logistique, et la volatilité pourrait ressurgir avec une violence oubliée. Le GNL reste la soupape de sécurité, mais il ne suffira pas si la demande s’enflamme. Comme souvent dans l’énergie, les périodes d’apathie précèdent les réveils brutaux.

À la une

Le gaz russe refait surface par la Belgique

L’Agence Internationale de l’Énergie lance un message clair : l’UE s’apprête à importer beaucoup plus de GNL d’ici 2035, alors même que sa consommation de gaz recule.

Un paradoxe apparent, mais révélateur d’une réalité : l’Europe doit compenser la chute de sa production domestique et la baisse des flux par gazoduc. Résultat, entre +35 et +80 Gm³ de GNL pourraient s’ajouter aux 110 Gm³ actuels.

Un pilier de sécurité énergétique

Même en déclin, le gaz reste stratégique. Il stabilise un système électrique bousculé par l’intermittence des renouvelables et offre une capacité de stockage saisonnière impossible à remplacer dans l’immédiat.

Et avec 300 Gm³ de nouvelles capacités mondiales attendues d’ici 2030, l’Europe pourra piocher dans une offre plus large et plus concurrentielle.

Des prix sous tension

La dynamique des prix dépendra du rythme de la demande mondiale.

Si celle-ci augmente “seulement” de 200 Gm³, le marché pourrait même se détendre. Mais une hausse de 260 Gm³ absorberait tout l’excédent, resserrant le marché et poussant les prix vers le haut.

La Chine, la grande inconnue

Pékin reste la variable incontrôlable. Entre rapprochement avec Moscou, production domestique croissante et appétit énergétique fluctuant, son rôle pourrait totalement rebattre les cartes du marché mondial du GNL.

Tour d’horizon des autres faits marquants, par notre expert

Allemagne : cap énergétique contesté

Berlin veut lancer 10 GW de nouvelles capacités pilotables, majoritairement au gaz et « prêtes hydrogène ». Industrie et ONG dénoncent un mauvais calcul : trop coûteux, trop dépendant du gaz et trop dirigiste. Les énergéticiens, eux, y voient un signal rassurant… à condition que Bruxelles valide vite.

Amérique latine : ambitions GNL fragiles

L’Argentine rêve de devenir un géant du GNL grâce à Vaca Muerta, mais doit affronter concurrence mondiale, incertitudes réglementaires et coûts élevés. Le Mexique, lui, multiplie projets et retards, tout en dépendant massivement du gaz américain – un paradoxe qui limite son rôle vis-à-vis de l’Europe.

Ukraine : un hiver sous tension

Kyiv sécurise un accord crucial avec la Grèce pour importer du GNL américain regazéifié en Méditerranée puis acheminé vers le nord. Une bouée vitale alors que 60 % de sa capacité de production gazière nationale a été détruite par les frappes russes et que l’hiver approche.

– Helder FARIA RUBIO

Responsable Vente Indirecte et Partenariats chez Capitole Energie

Zoom sur l'énergie verte

Marché et climat : la grande recomposition

GOs : L’abondance qui étouffe les prix

Sur le marché européen des garanties d’origine, la torpeur persiste. Les prix stagnent à court terme et reculent sur les maturités plus lointaines, sous le poids d’une offre abondante et d’un intérêt d’achat encore timide. Les dernières enchères portugaises — 2,2 TWh mis sur le marché — n’ont pas bousculé les lignes, preuve que les acteurs naviguent dans un environnement prévisible, presque routinier.

Seule ombre au tableau : la sécheresse alpine, qui réduit la production hydroélectrique et donc le volume de GOs. À cela s’ajoute une nouveauté : l’Espagne ouvre l’exportation des GOs de centrales subventionnées, promettant un supplément d’offre à l’échelle européenne.


Le vrai nœud du problème, selon les experts, reste l’absence d’  « annual matching », qui nourrit une surabondance chronique depuis 2022. Et l’idée d’un futur passage au suivi horaire pourrait encore affaiblir la demande, en poussant les entreprises à ne sélectionner que les certificats les moins chers.

COP30 : Une coalition mondiale autour du marché carbone

À l’initiative du Brésil, une coalition élargie — incluant l’UE, la Chine, le Canada, la Norvège et d’autres — veut harmoniser les standards de comptabilité carbone et connecter les marchés nationaux.
Objectif : créer un marché du carbone plus liquide, plus transparent et mieux aligné avec l’Accord de Paris. Aucun calendrier n’est fixé, mais les ambitions affichées marquent une étape vers une architecture mondiale du prix du carbone.

Carbone : L’UE, futur grand acheteur de crédits

Malgré sa volonté d’une réduction de 90 % des émissions d’ici 2040, l’UE pourrait devenir l’un des plus gros acheteurs mondiaux de crédits carbone. Le passage de 3 % à 5 % de flexibilité via les offsets ouvre la porte à quelque 100 millions de tonnes supplémentaires compensées à l’international. Une manière d’accompagner les secteurs les plus difficiles à décarboner, comme l’agriculture et le LULUCF.
Mais ce choix n’est pas sans risque : ces crédits pourraient augmenter les émissions nettes européennes de 20 à 30 % par rapport à un objectif strictement domestique.

Électricité : EEX veut un contrat “solaire”

Face à la montée en puissance du photovoltaïque, EEX réfléchit à un nouveau contrat à terme couvrant la tranche 12h-16h, où l’électricité abonde et les prix plongent. L’objectif ? Offrir un instrument fidèle à la nouvelle courbe de production solaire.
Pour les entreprises, ce produit pourrait faciliter les stratégies de couverture, notamment pour les offres à prix fixe. Les batteries aussi y trouveraient leur compte : acheter à midi, revendre à la pointe.

– Helder FARIA RUBIO

Responsable Vente Indirecte et Partenariats chez Capitole Energie

Comme nos clients, choisissez Capitole Énergie !

Recapiti
Eloïse DOLO-PERIQUET