Hebdo de l’énergie : l’actualité des marchés du 06 décembre 2024

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Nos experts vous présentent leur analyse complète de toute l’actualité sur les marchés de l’énergie à la date de clôture du 06 décembre 2024.

Marché de l'électricité

Froid polaire et volatilité, l’hiver s’installe

Cette semaine s’annonce tendue pour les réseaux électriques en Europe, où une chute brutale des températures accentue la pression sur l’offre. En France, la demande devrait culminer à 64,7 GW, soit 4,2 GW de plus que la moyenne saisonnière, sous l’effet de températures atteignant 3,8 °C, bien en dessous des normales. Pourtant, les récents signaux sur le marché électrique français intriguent : les garanties de capacité pour 2025 ont été attribuées à 0 €/MW, un contraste frappant avec les 6 192 €/MW d’octobre dernier. Si cette baisse semble bénéfique pour les consommateurs, elle remet en cause la viabilité financière des installations mobilisées lors des pics hivernaux, notamment les centrales thermiques stratégiques.

Sur le marché du carbone, les fluctuations des prix illustrent la complexité des arbitrages énergétiques. À 67,8 €/t, les quotas européens reculent légèrement, portés par une rentabilité amoindrie du charbon et une production éolienne robuste en Allemagne.

À la une

La crise politique plonge la France dans l’incertitude

La crise politique qui secoue la France plonge son secteur de l’énergie dans une incertitude préoccupante. Le renversement du gouvernement Barnier, trois mois seulement après sa nomination, aggrave une situation déjà tendue, marquée par des retards législatifs et un blocage parlementaire persistant depuis la réélection d’Emmanuel Macron en 2022.

Sans majorité absolue, l’exécutif peine à fixer des objectifs clairs pour la transition énergétique, un préalable essentiel pour attirer les investissements et maintenir la dynamique vers la neutralité carbone d’ici 2050.

Le retard d’un an sur la feuille de route énergétique 2028-2035 illustre cet immobilisme. Alors que le gouvernement Barnier s’apprêtait à publier un décret après consultation, sa chute laisse planer le spectre d’un nouveau cycle de consultations qui pourrait repousser encore l’adoption des objectifs.

Par ailleurs, les grands projets, tels que la construction de six nouveaux réacteurs nucléaires, semblent épargnés par cette crise.

Mais des interrogations subsistent sur l’avenir de la réglementation Arenh, cruciale pour l’accès des fournisseurs alternatifs à l’énergie nucléaire, alors qu’un nouvel accord doit encore recevoir l’aval de Bruxelles.

Emmanuel Macron s’apprête à nommer un nouveau Premier ministre, mais l’incertitude politique et institutionnelle freine l’élan nécessaire pour affronter les défis climatiques et énergétiques. Les investisseurs, comme les citoyens, attendent désormais des réponses claires et une vision stable.

Les tendances électricité de la semaine par notre expert

Énergie en Europe : records, tensions et mutations

En Espagne, la production électrique a chuté de 5,2 % en glissement annuel, atteignant 19,5 TWh. Cette baisse s’explique par une diminution de la demande intérieure (-1,6 %) et une chute spectaculaire des exportations (-52 %). Les énergies renouvelables, traditionnellement dominantes, ont accusé une baisse globale de 19 %, en raison d’une production éolienne en repli (-31 %) et hydroélectrique (-20 %). Néanmoins, la production solaire photovoltaïque a progressé de 17 %, témoignant d’une résilience dans un secteur en croissance. En contraste, la production à base de gaz a bondi de 44 %, soulignant une flexibilité accrue du mix énergétique espagnol.

De l’autre côté des Pyrénées, la France a brillé sur le marché européen, atteignant un record historique de 83 TWh d’exportations nettes sur 11 mois, grâce à une hausse de 20 % de sa production nucléaire en novembre. Cette performance s’inscrit dans un contexte de faible consommation intérieure et de disponibilité accrue des réacteurs, avec une production cumulative de 325 TWh sur l’année.

Au Royaume-Uni, un avertissement de NESO sur une possible insuffisance de capacité illustre les défis d’approvisionnement persistants, malgré des ajustements rapides. Enfin, les marchés français de la capacité enregistrent des prix en chute libre, reflétant une demande hivernale modérée et une capacité renforcée.

– Helder FARIA RUBIO, 

Responsable Vente Indirecte et Partenariats chez Capitole Energie

Marché du gaz

L’Europe coincée entre froid et concurrence asiatique

Le marché du gaz demeure sous pression alors que l’Europe affronte un début d’hiver plus froid que prévu. Les températures en chute augmentent la demande de gaz naturel, forçant les stocks européens – remplis à 84,2 %, contre 93 % l’an dernier – à s’éroder rapidement. Les inquiétudes s’amplifient à l’approche de l’expiration de l’accord de transit gazier via l’Ukraine. La perspective d’un arrêt complet des livraisons accroît les tensions sur les marchés.

L’Europe, fortement dépendante du GNL pour combler le déficit russe, fait face à une rude concurrence avec l’Asie, où les prix grimpent à 15,08 $/MMBtu. Si les importations européennes de GNL restent solides, elles pourraient ralentir dans les semaines à venir, remettant en question la capacité du continent à faire face à des besoins hivernaux croissants. Le charbon, de son côté, reflète une demande hésitante, avec des prix temporairement bas.

À la une

L'Europe muscle sa stratégie pour 2025

L’Union européenne renforce sa stratégie énergétique pour 2025 en exigeant que ses stockages de gaz atteignent 50 % de leur capacité dès le 1er février, soit une hausse de cinq points par rapport à l’an dernier.

Cette montée en cadence des objectifs intermédiaires, étalés sur février, mai, juillet et septembre, vise à assurer un remplissage progressif et optimal pendant les mois d’été.

L’objectif final est d’atteindre 90 % de capacité d’ici le 1er novembre 2025, garantissant ainsi une sécurité d’approvisionnement face aux incertitudes géopolitiques.

La Commission européenne anticipe des tensions, notamment avec la fin prévue de l’accord de transit du gaz russe via l’Ukraine fin 2024. Elle fixe un seuil minimal de 30 % pour mai 2025, mais encourage les États membres à viser un remplissage de 45 % afin de prévenir tout déséquilibre dû à une demande accrue ou à une diminution de l’offre estivale.

Ces efforts semblent déjà porter leurs fruits : au 1er novembre de cette année, l’Union a dépassé son objectif en atteignant 95 % de remplissage, bien au-delà des 90 % attendus. Avec des réserves actuelles à 86,7 %, l’Europe montre qu’elle apprend à naviguer dans un contexte énergétique incertain, en pariant sur la résilience et l’anticipation pour éviter toute dépendance excessive à des fournisseurs instables.

Les tendances gaz de la semaine par notre expert

L’Espagne face à une dépendance croissante

L’Europe et, plus spécifiquement, l’Espagne sont au cœur d’un défi énergétique complexe alors que l’hiver s’installe. En Espagne, les retraits précoces de gaz ont commencé dès le 5 novembre, bien avant ceux de l’année dernière, accentuant une dépendance déjà notable au GNL. Avec des stocks de GNL remplis à seulement 58 %, contre 78 % en 2023, cette situation suscite des tensions sur le marché énergétique mondial, amplifiées par une concurrence accrue entre l’Europe et d’autres régions comme l’Asie. Les prix de référence du gaz en Europe, mesurés par le TTF, ont atteint des sommets inédits cette année.

Cette crise énergétique met également en lumière des enjeux climatiques cruciaux. Tandis que l’Europe projette de construire 30 nouveaux terminaux GNL d’ici 2030, une telle expansion pourrait compromettre les objectifs de neutralité carbone de l’Union, en raison des émissions massives de méthane associées. Si le GNL a joué un rôle clé dans la transition énergétique en remplaçant le charbon, son utilisation soulève des questions sur les fuites de méthane et l’efficacité des politiques climatiques européennes.

Sur fond de régulations renforcées et de prix favorables, l’Europe reste néanmoins attractive pour le GNL américain, suggérant une stabilisation potentielle des stocks estivaux. Pourtant, l’équilibre reste fragile, dicté par des facteurs géopolitiques, climatiques et économiques complexes. À court terme, l’approvisionnement énergétique semble sécurisé, mais les défis structurels persistent pour aligner compétitivité économique et ambitions écologiques.

– Helder FARIA RUBIO

Responsable Vente Indirecte et Partenariats chez Capitole Energie

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