20 juin 2024 • ACTUALITÉS
En 2024, les relations homosexuelles sont toujours illégales dans plus de 60 pays. Depuis mai 2023, date à laquelle l’Ouganda a promulgué l’une des lois contre l’homosexualité les plus répressives au monde, faisant de l’ « homosexualité aggravée » un crime capital, être homosexuel est passible de la peine de mort dans douze pays. Partout, les droits des personnes LGBTI+ perdent du terrain, laissant la place à des lois répressives, à des violences encouragées par les pouvoirs en place, et un véritable retour sur les droits acquis.
Pourquoi ces publics ont besoin d’un accompagnement spécifique ?
Les personnes LGBTI+ réfugiées ou en demande d’asile se trouvent à l’intersection de multiples vulnérabilités et discriminations en santé, notamment en termes de violences, de santé mentale et de risques face aux IST. Il faut donc aller à la rencontre du public mais surtout créer des espaces de paroles nécessaires pour permettre aux personnes de s’exprimer librement sur leur orientation sexuelle et identité de genre. Le projet repose donc sur une offre de dépistage en aller-vers (ou hors-les- murs) avec une infirmière et un médecin du Checkpoint Paris formé sur les enjeux de santé globale des personnes LGBTI+, de la médiation en santé pour accompagner les personnes dans leur parcours de santé en dehors des CADA/HUDA mais également une offre culturelle permettant aux personnes accueillies de se retrouver et d’aller à la rencontre d’œuvres et d’artistes engagés dans les mouvements LGBTI+.
Y’a-t-il un volet formation des travailleurs et travailleuses sociales ?
Le travail en lien avec les équipes des structures d’hébergement (CADA/ HUDA) est fondamental dans l’accompagnement global des personnes, c’est pourquoi le projet intègre également un axe formation destiné aux travailleurs sociaux de ces établissements afin de garantir le respect des orientations sexuelles et identités de genre. Une mise en lien avec l’association ARDHIS, spécialisée dans l’accompagnement juridique des personnes LGBTI+ est également proposée pour accompagner les récits d’Asile des personnes LGBTI+ menacés dans leur pays d’origine du fait de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre.
Comment ça se passe pour ce public, une fois arrivé sur le territoire français ?
Il est primordial de rappeler que l’accueil en France et les procédures administratives de demande d’asile peuvent générer de nouvelles violences pour les personnes LGBTI+ ayant fui leur pays. Pour l’instruction de ces dossiers, les instances de l’asile (OFPRA et Cour nationale du droit d’asile en cas de recours) doivent établir la véracité de la situation invoquée par la personne. En d’autres termes, pour ces instances comme pour les demandeurs d’asile, il faut prouver leur orientation sexuelle, ce qui relève de l’intime.
En quoi est-ce compliqué de prouver l’intime ?
Il s’agit avant tout de déterminer « la véracité de l’homosexualité ou de la transidentité des requérants », qui « devient ainsi une question centrale ». Or les personnes peuvent rencontrer des difficultés à exprimer leur homosexualité ou leur identité de genre et voir ainsi leur récit être jugé incohérent. Les preuves écrites émanant d’institutions officielles, par exemple des condamnations pénales, sont rares et peu exploitées quand elles existent car le débat sur leur authenticité occupe alors une place trop importante dans l’instruction au détriment d’une étude plus large des persécutions subies. Une déclaration tardive de l’homosexualité dans la demande d’asile est également susceptible d’entacher sa crédibilité, bien que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) ait indiqué dans une decision du 2 décembre 2014 que le seul fait que le demandeur d’asile n’ait pas d’emblée déclaré son homosexualité ne peut pas entraîner la conclusion que sa requête n’est pas crédible.
Or quand on a vécu des années d’oppressions, de violences ou de menace, que l’on a été rejeté par sa famille ou sa communauté, le fait de migrer dans un pays où l’homosexualité ou les transidentités ne sont pas réprimées n’est pas suffisant pour avoir la capacité de parler librement et sans crainte de son orientation sexuelle ou identité de genre. Et toutes les étapes du traitement de la demande d’asile peuvent générer de nouvelles formes de violences.
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