"Q - Sur la visite en RDC et au Rwanda du Ministre, quel est le message de la part du Ministre pour le président Kagame ? Est-ce qu’il va là-bas pour l’appeler à retirer ses troupes ? Quel est le but de cette démarche ?
R - Comme je vous le disais, la visite du Ministre s’inscrit dans un effort français sur le plan diplomatique, en appui avec les processus de négociations qui ont été menés sous l’égide des Angolais et des Kenyans pour appuyer ces efforts en faveur d’une stabilisation de la situation dans l’est de la République démocratique du Congo, ce qui veut dire le retrait des troupes du M23 et des troupes rwandaises. Le Président de la République s’est entretenu le week-end dernier avec les deux présidents - Félix Tshisekedi d’une part, et Paul Kagame d’autre part - pour leur faire part de notre position, à savoir que nous condamnions très fortement et vigoureusement l’offensive des troupes du M23 sur le sol congolais, et pour demander au président Kagame le retrait de ces troupes. Nous avons déploré la prise de Goma par les troupes, ainsi que la prise de la ville de Sake.
Le Président de la République a clairement dit au président rwandais notre position et le Ministre, qui est en tournée dans la région, qui est au Congo actuellement et qui ira ensuite au Rwanda, redira cette position et demandera au président Kagame le retrait intégral des troupes du M23 et des troupes rwandaises qui sont actuellement présentes sur le sol de la République démocratique du Congo.
Q - Question pour suivre celle de mon collègue. Vous avez des mots forts pour le Rwanda et le président Kagame. S’ils ne vous écoutent pas, est-ce que la France appuierait des éventuelles mesures contre le Rwanda - des sanctions ou des réductions d’aides ? Est-ce que c’est quelque chose qui est déjà envisagé si ça n’avance pas ?
Et sur un autre sujet, sur le Liban, la France est en pointe sur le dossier libanais. Considérez-vous que, pour des questions d’unité, le Hezbollah doit impérativement faire partie du nouveau gouvernement ?
R - Sur la première question, je vous indiquais que la France était très active diplomatiquement. Je ne l’ai pas dit, mais elle l’est aussi au sein du Conseil de sécurité. C’est la France qui a demandé une réunion d’urgence au Conseil de sécurité, qui s’est tenue dimanche dernier, le 26 janvier. Et il y a eu une autre réunion du Conseil de sécurité qui a eu lieu mardi soir. La France est très active dans ces discussions, qui ont lieu dans le cadre du Conseil de sécurité des Nations unies. Pour le moment, elles sont encore en cours. Il y a beaucoup d’options sur la table. Mais l’objectif est bien d’arriver à obtenir une solution diplomatique à ce conflit qui doit, encore une fois, cesser immédiatement. Dans ce cadre, la France reste pleinement mobilisée pour que le Conseil reste en éveil sur cette question parce que, encore une fois, la situation est extrêmement grave et que les premières victimes de ces affrontements, bien évidemment, ce sont les populations civiles, avec une situation humanitaire qui se dégrade d’heure en heure. Il y a déjà eu plusieurs morts et surtout il y a beaucoup de personnes qui sont déplacées et qui se retrouvent sur les routes. Donc c’est une situation qui est inacceptable et qui doit cesser. Le Conseil de sécurité est la bonne enceinte pour trouver des solutions. Pour le moment, les discussions sont en cours.
Mais ce qui est certain, c’est que la France appuiera toute initiative qui permettra d’obtenir cette paix.
Et dans ce cadre, je précise que nous apportons notre plein soutien à la MONUSCO, qui est la force des Nations unies qui est déployée dans cette région, et que nous rappelons que nous restons très attachés à la sécurité des casques bleus. Les personnels et les emprises des Nations unies doivent être respectés, et la MONUSCO doit pouvoir continuer à mener son action pour protéger les populations civiles.
Sur la deuxième question, de savoir si le Hezbollah doit rentrer dans le gouvernement, il y a des discussions qui sont en cours au Liban pour la formation d’un nouveau gouvernement, qui fait suite à la nomination d’un Premier ministre. Nous faisons pleinement confiance aux autorités libanaises pour aboutir à un résultat qui permette au Liban, d’une manière générale, d’avoir un gouvernement fort et capable de rassembler l’ensemble du Liban, dans toute sa diversité. Nous espérons que ce gouvernement soit nommé dans les meilleurs délais, puisqu’il est en effet crucial que les réformes qui sont attendues au Liban depuis un certain temps puissent être définies et mises en œuvre afin d’œuvrer au redressement du pays, au retour à la prospérité des Libanais, ainsi que la restauration de la sécurité et de la souveraineté du Liban partout sur son territoire. Et c’est en lien avec l’accord sur le cessez-le-feu, qui prévoit notamment un retour des forces armées libanaises dans le su d du Liban. La constitution du gouvernement est un élément clé pour pouvoir mettre l’ensemble de ces réformes en œuvre. Mais à nouveau, nous sommes pleinement confiants dans le nouveau Premier ministre libanais et dans le nouveau Président libanais pour composer un gouvernement qui permette au Liban de retrouver de l’efficacité.
Q - Juste pour faire suite à la question de mon confrère sur le Liban, comment peut-on attendre de ce nouveau gouvernement qu’il fasse les réformes qu’il faut si les ministères vont revenir dans les mains des mêmes partis, que ce soit le Hezbollah ou les autres partis ? Donc quand vous parlez d’un gouvernement fort, comment est-ce que ce gouvernement peut être fort si ce sont les mêmes partis politiques qui sont au pouvoir dans le gouvernement ?
Aussi pour le Liban, le président Macron a appelé les troupes israéliennes à se retirer complètement. En même temps, les Américains ont donné un nouveau délai jusqu’au 18 février. Donc quelle garantie la France peut donner aujourd’hui aux Libanais que les Israéliens vont vraiment se retirer et que les résidents vont pouvoir rentrer chez eux sans mourir ?
Ma deuxième question, c’est sur les familles qui viennent de Gaza. Récemment, vous avez sorti un communiqué dessus, pour les enfants malades. Mes informations disent que ce sont juste des mamans avec des enfants malades. Donc ce sont des familles qui ont été séparées. Pourquoi cette séparation familiale pour ces évacuations d’urgence ? Et qui décide de qui vient sur le territoire français ?
R - Sur votre première question, je suis assez mal placé pour faire des commentaires sur des questions qui reviennent effectivement aux autorités libanaises. Encore une fois, nous jugerons lorsque que le gouvernement sera nommé.
Sur votre question sur le cessez-le-feu, encore une fois, l’accord sur le cessez-le-feu a été obtenu grâce à deux nations qui ont fait office d’intermédiaires, les États-Unis et la France. Et c’est un accord qui a été obtenu de haute lutte entre les Israéliens et les Libanais. Pour le moment, cet accord tient. Il y a effectivement une prolongation de la première période, qui devait s’achever le 26 janvier dernier, et qui a été prolongée jusqu’au 18 février. On a, à plusieurs reprises, déploré les pertes humaines libanaises provoquées par des tirs israéliens. Mais encore une fois, le respect de l’accord doit se faire malgré le retard qui a été pris, il doit s’achever et il doit conduire à un retrait total des forces israéliennes du Sud Liban, conformément à ce qui a été signé, et au désarmement du Hezbollah. Nous restons pleinement mobilisés dans le cadre du mécanisme de surveillance, qui est toujours à l’œuvre, et qui doit permettre d’accompagner le retrait des troupes israéliennes et le déploiement des forces armées libanaises dans le sud du Liban avec l’appui de la FINUL.
Sur votre dernière question, sur les familles gazaouies, la dernière opération a été menée par la France, en lien avec l’OMS et l’Union européenne. Évidemment, lorsque l’on amène des enfants palestiniens pour être soignés dans des hôpitaux français, il y a une prise en charge aussi des proches. C’est la raison pour laquelle il y a des accompagnants qui vont avec les enfants. Ceci étant dit, des contraintes matérielles font que dans les avions médicalisés, il y a des contraintes de place, et les places sont limitées. C’est la raison pour laquelle on autorise un accompagnant par enfant qui est envoyé en France. Il ne s’agit pas de séparation familiale, puisqu’encore une fois, les enfants viennent en France pour être soignés et ont vocation ensuite à retrouver l’ensemble de leur famille. Mais, pour des questions logistiques, on ne peut pas avoir plus d’un accompagnant par famille.
Q - J’ai lu que Paris va organiser une réunion, un sommet des ministres des affaires étrangères sur l’Ukraine, le 12 février. Est-ce que vous pouvez nous donner plus de détails sur cette information ?
Et deuxième question, concernant toujours le Liban. Y aura-t-il toujours une réunion à Paris sur le Liban ?
R - Sur votre première question, effectivement, est organisée le 12 février prochain une réunion sur l’Ukraine, dans un format qui s’appelle un format « Weimar + ». « Weimar » parce qu’effectivement, elle réunira la France, l’Allemagne et la Pologne, qui sont les trois membres du Triangle de Weimar, plus d’autres États qui ont souhaité se joindre à cette réunion. C’est la poursuite de discussions qui ont d’ores et déjà commencé sur l’Ukraine. Elle se réunira à paris le 12 février prochain. Des confirmations de certains États nous sont déjà arrivées au-delà de l’Allemagne et de la Pologne : l’Italie, notamment, ou encore l’Union européenne ainsi que l’Espagne seront représentées. J’aurai plus de détails à vous apporter la semaine prochaine, puisque c’est une réunion qui est en cours de préparation. Mais effectivement, il y aura bien une réunion en format Weimar+ à Paris, le 12 février prochain.
Sur le Liban, effectivement, il y a aussi une réunion qui est un peu plus loin dans le temps, mais elle est effectivement prévue, et c’est un point sur lequel nous discutons d’ores et déjà avec nos partenaires. Là aussi, je reviendrai vers vous ultérieurement avec plus de précisions.
Q - Après la remise à la Croix-Rouge de deux otages israéliens et de cinq otages thaïlandais ce matin, Israël vient d’annoncer la suspension jusqu’à nouvel ordre de la libération des prisonniers palestiniens, évoquant des scènes choquantes lors de la libération de deux otages israéliens. Quelle est votre réaction là-dessus ?
R - Le processus de cessez-le-feu qui a été obtenu est un processus que nous avons accueilli avec beaucoup de soulagement, puisque cela faisait longtemps que nous appelions à la libération des otages et à un cessez-le-feu dans la bande de Gaza. C’est un accord qui est entré en vigueur il y a déjà quelques jours, qui a déjà permis la libération d’otages qui étaient retenus dans la bande de Gaza, et l’augmentation majeure de la délivrance de l’aide humanitaire. Nous appelons l’ensemble des parties prenantes à respecter les termes de l’accord. Nous sommes toujours, nous, dans l’attente de la libération de deux concitoyens français qui sont toujours retenus dans la bande de Gaza, Ofer Kalderon et Ohad Yahalomi. Et encore une fois, cet accord est un excellent signal qui doit permettre de mettre fin à cette guerre qui n’a que trop duré, qui a fait trop de victimes, et qui a laissé la bande de Gaza dans une situation terrible en termes humanitaires. Et nous espérons que cet accor d de cessez-le-feu sera respecté dans ses termes jusqu’au bout du calendrier qui a été décidé, et qu’en sus, il ouvrira la voie à une solution politique qui sera la seule susceptible d’apporter la paix et la stabilité dans la région. Plus spécifiquement, sur l’information que vous me donnez, je n’ai pas plus de commentaires pour le moment, mais je reviendrai vers vous.
Q - Le président américain Donald Trump n’a pas reculé concernant ses déclarations sur le Groenland. Je voulais savoir si la France compte envoyer des troupes dans la région pour soutenir le Danemark ?
R - Effectivement, il y a une question qui se pose avec les déclarations de Donald Trump. Je vous renverrai aux propos du Ministre cette semaine, lorsqu’il a été interrogé sur une radio. Il y a un principe qui vaut en Europe et qui est un principe cardinal, c’est l’intangibilité des frontières et l’intangibilité de la souveraineté des États sur leur territoire. C’est ce que le Président de la République a dit à la Première ministre danoise qui est venue cette semaine en visite à Paris, et c’est ce que le Ministre a redit à son homologue. Il n’est pas question d’envoyer des troupes. Simplement, il est question de rappeler qu’il y a une obligation de respecter les frontières et de respecter la souveraineté des États, que cela soit dans l’Union européenne, à toutes ses frontières, comme plus largement dans le monde. C’est un principe qui est cardinal dans les relations internationales.
Q - À nouveau sur la conférence du 12 février sur l’Ukraine : est-ce qu’il y a eu des invitations pour les États-Unis ? Ont-ils répondu ? Est-ce qu’il y a eu des invitations, pour l’Ukraine, pour la Russie éventuellement ? Pour l’Ukraine, je dirais que je trouverais cela plutôt normal, puisque la France a toujours dit que toute décision concernant le conflit devait tenir compte de la position des Ukrainiens. Alors j’imagine que les Ukrainiens y seront. Vous pouvez nous le confirmer ?
R - Oui, sur votre dernier point, absolument. Nous le disons encore : toute solution de la guerre menée par la Russie en Ukraine doit se faire avec les Ukrainiens, principalement. Et ça, c’est une condition sine qua non pour la France, mais aussi pour l’ensemble des États européens. La solution ne peut pas être définie en dehors de l’Ukraine. C’est absolument impossible et impensable.
Sur la réunion, je reviendrai vers vous la semaine prochaine avec plus d’éléments. C’est une réunion qui réunit les ministres français, polonais et allemand, auxquels nous avons rajouté d’autres Européens. Mais je reviendrai vers vous avec des informations plus précises sur le tour de table complet de l’ensemble des pays qui seront représentés dans cette conférence.
Q - Et l’objectif, c’est ?
R - Il est assez évident. C’est de continuer à marquer le soutien des membres qui seront autour de la table à l’Ukraine, et de lui assurer un soutien non seulement diplomatique, mais aussi un soutien concret, un soutien matériel, un soutien financier, un soutien en armement, et surtout appuyer tous les efforts qui seront faits pour pouvoir dégager une sortie de ce conflit. Mais comme je vous le disais, cette sortie se fera avec les Ukrainiens et au moment où les Ukrainiens jugeront que le moment est venu de négocier.
Q - Concernant l’Algérie, l’ambassadeur de France à Alger aurait été convoqué par un secrétaire d’État, si je ne m’abuse, l’Algérie accusant la France de maltraitance contre des ressortissants algériens à Roissy. Est-ce que vous confirmez cette convocation et comment est-ce que vous réagissez à ces accusations ?
R - Oui, je vous confirme que l’ambassadeur de France à Alger a été convoqué cette semaine par les autorités algériennes. L’objet de la convocation était de faire part à la France d’une protestation des Algériens sur la manière dont les Algériens seraient traités lors de leur arrivée dans les aéroports parisiens, impliquant l’idée qu’il y aurait un traitement discriminatoire à l’encontre des Algériens qui arriverait dans les aéroports parisiens. L’ambassadeur a pris note de cette demande et il les a transmises à Paris. Des vérifications d’usage vont être menées auprès de la Police de l’air et des frontières. C’est tout ce que je peux vous en dire.
Q - J’ai une question sur la Syrie. Je reviens à la réunion ministérielle de l’Union européenne lundi et l’allègement des sanctions. Mme Kallas a parlé d’une levée qui peut être annulée s’il y a une mauvaise prise de décision. Pouvez-vous un peu expliquer ? Parce que cette feuille de route n’est pas très claire, comment et quand… Je ne sais pas si on peut avoir un exemple. Est-ce qu’il y a des conditions précises ?
Et puis encore une question, est-ce que là, avec le cessez-le-feu à Gaza, parce que j’ai posé la question sur les familles, est-ce qu’on peut s’attendre à d’autres enfants malades et blessés qui vont venir en France ? Surtout que peut-être, ce sera plus facile maintenant de faire le trajet Gaza-Paris qu’avant.
R - Sur votre première question, effectivement le conseil des affaires étrangères qui s’est réuni à Bruxelles lundi a évoqué la situation en Syrie. Comme vous le savez, il y a beaucoup de sanctions au niveau européen qui pèsent sur la Syrie actuellement. L’idée, dans tout ça, c’est effectivement que l’Union européenne rappelle son soutien à la transition politique qui a lieu en Syrie actuellement, en soulignant que cette transition devait être exigeante, inclusive, c’est-à-dire ouverte, avec l’ensemble de la diversité ethnique, confessionnelle et religieuse présente en Syrie, et avec l’ensemble des forces d’opposition. Donc ça, c’est le premier point.
Le deuxième point, c’est qu’effectivement, ces sanctions qui pèsent sur la Syrie sont des freins au redémarrage économique de la Syrie. Et dans ce cadre, les ministres européens ont décidé d’une feuille de route pour lever les sanctions économiques qui pèsent, justement, sur ce redémarrage économique. Je peux vous donner des exemples concrets : ce sont des sanctions qui pèsent en matière d’aviation civile, ce sont des sanctions qui pèsent en matière de transfert d’argent… toutes ces sanctions, en fait, qui coupaient la Syrie de l’Europe. Le fait de les lever va permettre un redémarrage de l’économie syrienne. Ceci étant dit, la haute représentante pour l’UE a évoqué une clause de réversibilité, ce qui veut dire que, l’Union européenne va lever ses sanctions, mais aussi que l’Union européenne restera attentive à la manière dont cette transition politique se déroule. Et encore une fois, l’idée, c’est que le point d’attention majeur, c’est encore une fois cette question d’inc lusivité de la transition, faire en sorte que l’ensemble de la diversité syrienne soit incluse dans cette transition. Et si les autorités de transition à Damas en décidaient autrement, à ce moment-là, l’Union européenne se réserverait le droit de revenir sur certaines sanctions, c’est-à-dire d