Publié le 28.05.2025
Après bientôt 600 jours du début de la guerre menée par l’Etat d’Israël contre la population civile à Gaza, notre humanité et notre conscience collective sont à un tournant. La France, qui présidera dans trois semaines aux Nations unies une conférence internationale sur « la solution à deux Etats », ne peut plus se permettre une diplomatie de double standard. Elle doit remettre le droit international et la protection des droits humains au cœur de ses efforts d’influence sur la question israélo-palestinienne.
Le CCFD-Terre Solidaire est un acteur de la société civile engagé depuis des décennies auprès d’organisations partenaires israéliennes et palestiniennes travaillant à la paix, à la justice et à la coexistence pacifique. Il appelle la France et la communauté internationale à sortir de leur rôle de spectateurs impuissants, et à exercer toutes les formes de pression nécessaires afin de mettre fin aux massacres et au génocide contre les populations palestiniennes, d’obtenir la libération des otages aux mains du Hamas, et de créer les conditions nécessaires pour établir une véritable feuille de route politique vers la paix.
La torpeur et la faiblesse des Etats occidentaux, devant ce qui est devenu le plus récent des génocides du XXIème siècle, sont intolérables. Dès octobre 2023 nous étions nombreux de la société civile à alerter sur la réponse totalement disproportionnée du gouvernement israélien suite aux attaques d’une violence inédite du Hamas. Nous rappelions que les massacres du 7 octobre n’étaient pas le point de départ de ce conflit, mais au contraire une nouvelle étape dramatique après des années de colonisation illégale du territoire palestinien, seize ans d’un blocus inhumain de Gaza, et la mise en place d’un système d’apartheid à l’encontre des populations palestiniennes vivant en Israël et en Palestine occupée.
A Gaza aujourd’hui nous récoltons les fruits de décennies d’impunité pour ces violations systématiques du droit international. C’est la conséquence d’une faiblesse coupable des Etats occidentaux qui ont fermé les yeux et se sont tus, rendant illusoire l’horizon d’une coexistence pacifique basée sur le droit à l’autodétermination du peuple palestinien et des garanties de sécurité pour les Israélien.nes. Ainsi, malgré la volonté génocidaire et de nettoyage ethnique d’une partie des responsables politiques israéliens actuels, la France refusait encore à l’automne dernier de respecter et mettre en œuvre le mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale visant le premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, lui garantissant une immunité de fait.
La récente décision de l’Union européenne d’examiner une potentielle suspension de son accord d’association avec Israël est indéniablement un pas dans la bonne direction. Mais combien de morts gazaouis aura-t-il fallu pour que nos responsables politiques se décident enfin à une condamnation des actions israéliennes ? Gaza est désormais l’un des conflits les plus meurtriers pour les journalistes, les soignants et le personnel humanitaire. Au moins 15 000 enfants y sont morts depuis octobre 2023 et plus de 500 000 personnes sont sous le risque accru de la famine. Il faut désormais que ce réveil se traduise par des actes concrets et un véritable courage politique.
Faire cesser les violences et construire la paix
A trois semaines de la conférence internationale sur « la solution à deux Etats », nous rappelons à la France et à la communauté internationale le besoin d’agir à trois niveaux :
- L’urgence est de faire cesser les violences à Gaza – mais aussi en Cisjordanie – en imposant un cessez-le-feu permanent, en garantissant l’accès de l’aide humanitaire aux populations civiles, et en œuvrant à la libération de tous les otages.
- Mettre fin à l’impunité et assurer le plein exercice de la justice internationale, notamment dans l’exécution des mandats d’arrêt de la Cour pénale internationale et le respect des décisions de la Cour internationale de Justice. S’assurer également que les accusations de crimes de guerre, crimes de génocide et autres crimes contre l’humanité fassent l’objet d’enquêtes indépendantes et impartiales, et que leurs responsables soient traduits en justice.
- Soutenir les efforts visant à construire une feuille de route politique pour une coexistence pacifique entre les peuples palestiniens et israéliens. Cette feuille de route ne sera viable qu’en s’attaquant aux causes profondes de ce conflit, notamment en garantissant la sécurité d’Israël, le droit à l’autodétermination des Palestinien.nes, la fin de la colonisation du territoire palestinien et du système d’apartheid. Cette feuille de route politique ne peut se faire qu’en incluant pleinement les populations israéliennes et palestiniennes, et leurs sociétés civiles, dans un rapport de force équilibré.
Le CCFD-Terre Solidaire, organisation catholique, artisan de paix et acteur de solidarité, se fait l’écho de la solidarité vis-à-vis des Gazaouis, exprimée jusqu’à ses dernières heures par le défunt pape François et de l’appel récent du pape Léon XIV à la fin des hostilités. Cela doit renforcer en tant que croyants et croyantes et tous ceux qui reconnaissent la valeur primordiale et inviolable de la vie et la dignité humaine, à se mobiliser chacune et chacun à son niveau. Le drame total qui se déroule sous nos yeux ne doit plus souffrir d’une quelconque justification. A Gaza, c’est notre humanité qui est bafouée.
Photo de couverture : Nour Arafa / CCFD-Terre Solidaire