Hebdo de l’énergie : l’actualité des marchés du 31 octobre 2025

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Nos experts vous présentent leur analyse complète de toute l’actualité sur les marchés de l’énergie à la date de clôture du 31 octobre 2025.

Marché de l'électricité

Un marché figé entre fragilité et stratégie

Cette semaine, le marché français de l’électricité s’installe dans une fausse accalmie. Le prix spot autour de 55 €/MWh reflète davantage une absence de signal qu’un réel équilibre. EDF, toujours sous pression financière, vend parfois à perte par rapport à ses coûts estimés autour de 60 €/MWh, tandis que la visibilité réglementaire reste floue.

Les discussions sur un contrat de différence (CFD) avec l’État refont surface : un tel mécanisme permettrait de fixer un prix plancher, garantissant à la filière nucléaire une stabilité vitale. Dans le même temps, la production renouvelable peine à compenser la faiblesse du vent et la moindre flexibilité du parc thermique. Résultat : la France entre dans l’hiver avec une offre globalement stable mais une marge de sécurité étroite, où chaque aléa météo peut rallumer la volatilité. En somme, un marché qui respire, mais à petits poumons.

À la une

EDF sous tension : le dilemme du nucléaire post-Arenh

Sous la pression d’un marché électrique déprimé, EDF pourrait devoir renoncer à sa stratégie d’indépendance tarifaire et accepter un nouveau contrat pour différence (CFD) avec l’État.

Ce mécanisme, qui garantirait un prix plancher à l’énergéticien public, apparaît de plus en plus inévitable si les prix de gros restent sous les 60 €/MWh, le seuil jugé nécessaire pour couvrir les coûts de production nucléaire.

Un modèle économique en perte de souffle

Avec une dette colossale de 54 milliards d’euros et un prix de marché proche de 55 €/MWh, EDF se retrouve dans une équation financière délicate : prolonger ses réacteurs, construire les nouveaux EPR, tout en assurant la rentabilité de son parc.

Les experts alertent sur une insoutenabilité financière d’ici 2030, voire avant, si rien ne change.

Vers un nouveau pacte État-EDF ?

La fin de l’Arenh impose une refonte du cadre de régulation.

Les industriels réclament visibilité et compétitivité, faute de quoi la production nucléaire française pourrait devenir un actif « inutile ».

Le gouvernement doit trancher entre stabilité des prix, souveraineté énergétique et attractivité du marché. Une équation aussi technique que politique.

L’essentiel à retenir ailleurs en Europe, par notre expert​

Câble UK-Allemagne : la sécurité avant tout

Le projet NeuConnect, premier câble de 1,4 GW entre le Royaume-Uni et l’Allemagne, entrera en service en 2028. Conçu avant le Brexit, il devient essentiel pour la sécurité énergétique européenne. Entièrement enterré sous la mer pour prévenir tout sabotage, il doit favoriser la convergence des prix de l’électricité et l’intégration des renouvelables entre les deux rives de la mer du Nord.

Espagne : le nucléaire sous conditions

Madrid donne un feu vert prudent à la prolongation de la centrale Almaraz jusqu’en 2030. Les exploitants, menés par Iberdrola, ont accepté les « lignes rouges » du gouvernement : aucun coût pour le contribuable et respect strict des normes de sûreté. Un pragmatisme rare dans un pays engagé dans une sortie du nucléaire entre 2027 et 2035.

Électromobilité : l’Europe accélère

D’ici 2030, la consommation électrique des véhicules électriques européens devrait doubler, passant de 45 à 100 TWh. Une croissance spectaculaire, mais qui met sous tension les réseaux électriques, souvent inadaptés à la recharge rapide. Les goulets d’étranglement du réseau deviennent le nouveau défi de la transition énergétique.

– Helder FARIA RUBIO, 

Responsable Vente Indirecte et Partenariats chez Capitole Energie

Marché du gaz

Un équilibre fragile derrière l’illusion de confort

Le TTF évolue paisiblement autour de 31 €/MWh, soutenu par une météo clémente et des arrivées soutenues de GNL. Les stocks européens à 82,8 % donnent l’image d’un marché serein, mais la réalité est moins rassurante : c’est 12 points de moins que l’an passé à la même période.

Les flux norvégiens reviennent, mais la maintenance de Troll et la dépendance croissante au GNL américain entretiennent une vulnérabilité structurelle. En parallèle, la demande asiatique faible agit comme un bouclier temporaire — un simple sursaut chinois suffirait à renverser l’équilibre.

Le message du marché est clair : la stabilité actuelle n’est pas une normalité retrouvée, mais une fenêtre d’opportunité pour sécuriser des volumes avant la véritable saison froide. Derrière l’apparente sérénité, le gaz reste le baromètre le plus nerveux de l’hiver européen.

À la une

Quand la sécurité énergétique prime sur l’idéologie

La France redécouvre les vertus du gaz. Marc-Antoine Eyl-Mazzega, directeur du Centre Énergie & Climat de l’IFRI, plaide pour la construction de nouvelles centrales à gaz afin d’assurer la stabilité du réseau électrique.

Face à un parc nucléaire vieillissant et une intermittence renouvelable accrue, l’Hexagone reste sous-équipé : 12,6 GW de capacités au gaz contre 37 GW en Allemagne.

Pour lui, la sécurité d’approvisionnement « n’a pas de prix » et les risques de black-out coûtent « 10 000 fois plus cher » qu’un investissement dans quelques centrales stratégiques.

Un pragmatisme assumé

Le Directeur du Centre Energie & Climat invite à dépasser « le biais idéologique » autour des émissions : une centrale à gaz moderne, peu sollicitée, aurait un impact carbone marginal. L’enjeu est moins de relancer le thermique que de disposer d’un filet de sécurité capable d’amortir les aléas – hiver rigoureux, maintenance nucléaire ou faible production éolienne.

Une transition en attente de cap

Cette réflexion intervient alors que la France tarde à publier sa nouvelle feuille de route énergétique, paralysant l’investissement dans l’éolien offshore et les batteries. Le constat est limpide : sans vision claire et sans capacités de secours, la souveraineté énergétique française reste fragile.

Entre sécurité et décarbonation, Paris doit désormais trancher, non pas sur le plan symbolique, mais stratégique.

Tour d’horizon des autres faits marquants, par notre expert

L’Europe du GNL face à la réalité

Après l’euphorie post-2022, la fièvre des terminaux GNL retombe. L’Institut IEEFA alerte : l’Europe a probablement surestimé sa demande. Projets suspendus, unités flottantes arrêtées, et une consommation gazière attendue en baisse de 15 % d’ici 2030. L’Allemagne, la France et la Grèce freinent leurs ambitions, tandis que les États-Unis confortent leur domination sur le marché européen du GNL (57 % des importations).

Irlande du Nord : tensions sur le marché de l’électricité

Le régulateur britannique enquête sur les pratiques tarifaires de la centrale de Ballylumford, accusée d’avoir gonflé ses prix de production. Un dossier sensible dans un système déjà sous tension, marqué par des arrêts prolongés et une volatilité accrue des revenus.

Londres sous pression américaine

Washington exhorte le Royaume-Uni à lever son interdiction sur les nouveaux projets pétroliers et gaziers en mer du Nord. L’ambassadeur Warren Stephens évoque des coûts énergétiques « quatre fois supérieurs » à ceux des États-Unis et appelle à « forer plus pour produire plus ».Le pragmatisme énergétique semble, décidément, redevenir une vertu politique en Europe.

– Helder FARIA RUBIO

Responsable Vente Indirecte et Partenariats chez Capitole Energie

Zoom sur l'énergie verte

Europe de l’énergie entre excès, prudence et désillusion

Espagne : quand trop de soleil fait de l’ombre à la transition verte

Le miracle solaire espagnol atteint son paradoxe : les prix de l’électricité devraient basculer plus souvent en territoire négatif dès février prochain, minant la rentabilité des projets renouvelables. L’explosion du solaire et de l’éolien, combinée à une demande parfois léthargique, provoque des excédents structurels.

À force de “plus de vent, plus de soleil”, la rentabilité se dérobe, et les analystes prédisent un ralentissement dès 2026. L’Espagne risque ainsi de rater ses ambitions climatiques pour 2030, prisonnière de son propre succès.

Paris : la bataille des crédits carbone européens

La France hausse le ton à Bruxelles. Refusant pour l’instant d’appuyer la réduction de 90 % des émissions européennes d’ici 2040, Paris réclame plus de flexibilité sur les crédits carbone internationaux – jusqu’à 5 % des émissions compensées, contre 3 % proposés par la Commission.

Derrière la querelle technique se joue une tension politique : faut-il concentrer les efforts sur le territoire européen, ou financer davantage la décarbonation du Sud global ? La France plaide pour un réalisme économique, quand les ONG dénoncent un risque de dilution des ambitions climatiques.

Marché des garanties d’origine : la spirale baissière continue

Sur le marché nordique des garanties d’origine, les prix poursuivent leur glissade : la surabondance d’offre et le désintérêt des acheteurs font chuter les contrats Cal 25 à 0,30 €/MWh. Les traders décrivent un marché “long et fragile”, où chaque vente déclenche un effet domino. Une stabilisation n’est pas attendue avant le printemps, lorsque les obligations de conformité raviveront une demande atone.

Pays-Bas : l’éolien offshore sans preneur

Coup de froid sur le modèle néerlandais : l’appel d’offres pour un parc éolien de 1 GW s’est soldé par… zéro candidature. Sans soutien public, la filière juge le modèle économique intenable.

La Haye prépare déjà un retour partiel aux subventions en 2026 via un mécanisme de “contracts for difference” (CFD). En attendant, les ambitions offshore prennent du retard – symptôme d’un essoufflement européen dans la course au renouvelable.

– Helder FARIA RUBIO

Responsable Vente Indirecte et Partenariats chez Capitole Energie

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Manon JAMMES