Claudia Cardinale est décédée le 23 septembre 2025 à Nemours, près de Paris, à l’âge de 87 ans, laissant derrière elle l’héritage d’une véritable icône du cinéma mondial. Née à Tunis de parents siciliens, l’actrice franco-italienne a marqué les années 1960 par une beauté solaire alliée à une forte présence dramatique, travaillant avec les plus grands : Federico Fellini, Luchino Visconti, Sergio Leone, Henri Verneuil… Parmi ses rôles les plus célèbres, Le Guépard (1963), ou Il était une fois dans l’Ouest (1968), qui font toujours figure de références majeures du cinéma d’auteur. Ce parcours foisonnant, qui compte plus de 150 films, mêle films historiques, westerns spaghetti, comédies et drames sociaux, témoignant d’une actrice capable de se réinventer tout en imposant une voix singulière. Voici donc notre sélection, certes subjective et non exhaustive, des meilleurs films de Claudia Cardinale à voir absolument !
Le Pigeon (1958)
Le Pigeon de Mario Monicelli est un manifeste subtil de l’anti-héros, une fresque douce-amère où l’ordinaire bascule dans le pathétique charmant. Dès ses premières scènes, le film plante un décor social d’après-guerre, fait de misère diffuse, d’illusions brisées, d’entraide misérable – Pépe, Cosimo et leur bande de bras cassés incarnent ce petit peuple romain aux rêves trop grands pour leurs moyens. Claudia Cardinale, encore à ses débuts, se joint à ce chœur de gueules marquées, de regard suppliant ou résigné, de personnalités burlesques. Elle ajoute à la partition de Monicelli une grâce discrète, une lumière fragile parmi les ombres de l’Italie pauvre, où la comédie rime avec désespoir et humanité.
Le film déroule son intrigue autour d’un casse inévitablement voué à l’échec – non que le projet soit mal conçu, mais parce que ces personnages sont déjà pris dans les mailles de l’inéluctable : la pauvreté, le manque de chances, l’incompétence presque poétique.
Rocco et ses frères (1960)
Rocco et ses frères de Luchino Visconti est une fresque familiale qui interroge l’âme même de l’Italie d’après-guerre. Le film suit la veuve Rosaria et ses cinq fils quittant la Lucanie pour Milan, avec l’espoir de trouver une vie moins dure. Mais le passage du Sud rural au Nord industriel provoque choc culturel, désillusions, rivalités.
Visconti bâtit son récit en chapitres correspondant chacun à un des frères, ce qui donne au drame une amplitude presque mythique. Rocco (Alain Delon) incarne l’innocence blessée, tandis que Simone (Renato Salvatori) souffre de plus en plus du mal de vivre, rongé par la jalousie et la passion destructrice. La présence de Nadia (Annie Girardot), mais aussi le petit rôle de Claudia Cardinale en Ginetta, renforcent les tensions amoureuses et symboliques qui minent cette fratrie.
Austerlitz (1960)
Austerlitz d’Abel Gance est une fresque historique ambitieuse qui retrace l’ascension de Napoléon Bonaparte, de son sacre à la victoire de la bataille d’Austerlitz, en 1805. Cladudia Cardinale y incarne Pauline Bonaparte, sœur de l’Empereur, dans un rôle secondaire mais symbolique, mêlé aux fastes de la cour et aux rumeurs de pouvoir.
Le film se distingue par sa reconstitution grandiose, ses décors et costumes soignés, et son casting international prestigieux (Jean Marais, Pierre Mondy, Martine Carol, Orson Welles, Vittorio De Sica, Leslie Caron…) qui donnent au spectacle historique une dimension presque théâtrale. Si la mise en scène de Gance paraît parfois académique, le soin apporté aux scènes politiques comme à la stratégie militaire traduit une volonté de vérité historique et d’ambition esthétique.
La Fille à la valise (1961)
La Fille à la valise de Valerio Zurlini est un mélodrame élégant où l’amour impossible se pare de douloureuse vérité sociale. Claudia Cardinale y incarne Aïda, chanteuse de cabaret, femme-mère ballotée entre promesses creuses et trahisons de ceux qu’elle aime. Elle traverse le film avec cette beauté vulnérable, qui ne se donne pas en spectacle mais révèle une force sous la fragilité. Aux côtés de Jacques Perrin, dans le rôle de Lorenzo, jeune homme sensible et naïf de bonne famille, Zurlini construit un duel silencieux entre deux mondes : celui d’Aïda, durement touchée par la vie, et celui de Lorenzo, élevé dans le confort mais en proie à ses propres contradictions. Ainsi, le film explore les classes, les conventions, l’hypocrisie sociale — le refus implicite de l’amour quand il dérange les codes.
Cartouche (1962)
Cartouche de Philippe de Broca est un film d’aventures français devenu un classique, porté par l’alchimie flamboyante entre Jean-Paul Belmondo en bandit au grand cœur et Claudia Cardinale dans le rôle de Vénus, bohémienne libre et vibrante. L’action se déroule sous la Régence, dans le Paris du XVIIIᵉ siècle, mêlant brigandage, romantisme et drame. Dominique, alias Cartouche, révolté par la tyrannie de Malichot, déserte l’armée, se fait chef de bande, et lutte pour la cause des plus faibles, mais son idéal est fortement mis à l’épreuve par l’amour que lui porte Vénus – une relation intense, tragique, qui culmine dans un sacrifice bouleversant.
Techniquement, le film impressionne : décors somptueux, costumes raffinés, musique signée Georges Delerue, photographie soignée, tous les ingrédients d’un spectacle historique riche et vivant.
Le Guépard (1963)
Le Guépard de Luchino Visconti est sans conteste l’un des monuments du cinéma européen. Cette fresque historique et sentimentale, adaptée du roman éponyme de Giuseppe Tomasi di Lampedusa, mêle la splendeur aristocratique et le fracas des révolutions intérieures. Dans la Sicile de 1860, le prince Don Fabrizio Salina (Burt Lancaster) voit s’effriter autour de lui un monde adossé à la tradition et au prestige, tandis que se lève une bourgeoisie montante, incarnée par le jeune Tancrède (Alain Delon). Claud ia Cardinale, dans le rôle d’Angelica Sedara, joue une figure charnière : beauté lumineuse et socialement prometteuse, elle devient l’objet d’un désir double, romantique et politique.
Ce film est une débauche de fastes visuels — costumes somptueux, décors de palais siciliens étincelants, lumière dorée — mais ce luxe ne sert pas seulement au spectacle : il sublime le drame du déclin, la mélancolie qui monte, et le regard lucide d’un homme qui pressent que l’Histoire ne l’attend pas.
Huit et demi (1963)
Huit et demi de Federico Fellini est une véritable déclaration d’amour à la vie et au cinéma, mais également une méditation intemporelle sur le doute, la création et la fragilité de l’âme d’artiste. Marcello Mastroianni incarne Guido Anselmi, réalisateur en panne d’inspiration, tiraillé entre ses fantasmes, ses souvenirs d’enfance et les exigences oppressantes de son entourage professionnel et personnel. Claudia Cardinale y marque sa présence par une apparition lumineuse : résurgence fantasmée, elle incarne l’une des femmes que Guido convoite dans l’imaginaire troublé qui rythme le film.
Fellini mêle le réel au rêve, avec une mise en scène baroque faite de plans lyriques, de ruptures de ton, de décors flottants. L’écriture cinématographique alterne scènes factuelles, séquences fantastiques, monologues intérieurs – jusqu’à la virtuosité d’une scène finale où Anselmi se balance entre délire et confession.
La Panthère rose (1963)
La Panthère rose de Blake Edwards est une comédie policière élégante, vive et irrésistiblement charmeuse. Dès les premières notes du thème complice d’Henry Mancini, le décor est planté : luxe feutré, jet-set en station de ski, et un diamant mythique, la Panthère rose, convoité par tous. Claudia Cardinale incarne la princesse Dala, touchante de dignité et de frivolité mondaine ; figure centrale autour de laquelle gravite un “Fantôme” voleur élégant (David Niven), un neveu turbulant (Robert Wagner), et surtout l’inspecteur Clouseau (Peter Sellers), catastrophique et irrésistible dans ses maladresses.
Le film ne se contente pas de gags ou de péripéties : il joue sur les contrastes — entre la grâce aristocratique et l’absurde, entre la complaisance du décor et l’énormité des situations comiques. Les rapports de classe, les faux-semblants, l’amour discret : tout cela est effleuré avec humour et précision.
Fitzcarraldo (1982)
Fitzcarraldo est le chef-d’œuvre démesuré de Werner Herzog. Tourné en 1982 dans la jungle amazonienne, ce film culte raconte l’odyssée d’un rêveur obstiné, Brian Sweeney Fitzgerald – alias Fitzcarraldo –, prêt à tout pour ériger un opéra en plein cœur de la forêt péruvienne. À ses côtés, Claudia Cardinale incarne Molly, femme d’affaires avisée et muse inspirante, dont la présence lumineuse équilibre la folie du héros.
Le projet est insensé : transporter un bateau à vapeur de 300 tonnes par-dessus une montagne pour conquérir une terre promise. Mais c’est précisément cette démesure qui fascine. Herzog, maître de l’image et de l’excès, filtre la lumière de l’Amazonie comme un peintre baroque, tandis que Kinski, tour à tour furieux et lyrique, compose un personnage inoubliable. Cardinale, elle, apporte une élégance discrète et une humanité touchante, rappelant que même les rêves les plus fous ont besoin d’ancrage.
Mayrig (1991)
Mayrig d’Henri Verneuil raconte l’arrivée en France d’une famille arménienne après le génocide de 1915. Claudia Cardinale y incarne la mère, figure centrale autour de laquelle s’organise la survie et l’adaptation à Marseille. Le film, inspiré de la jeunesse du réalisateur, évite le pathos facile pour montrer, avec justesse, les difficultés de l’intégration et la persistance des traditions.
Porté par un casting solide – Omar Sharif, Isabelle Sadoyan – et une mise en scène sobre, Mayrig aborde des thèmes universels : la transmission, la mémoire, et le lien entre les générations. Sans excès ni sentimentalisme, il offre un regard humain sur l’histoire et la résilience, tout en restant accessible. Un film sincère, à découvrir pour son authenticité et sa simplicité.
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Hakim Aoudia.